Bienvenue chez FCI Microconnections (ex-Areva, rachetée en 2005 par le fonds américain de capital investissement Bain Capital), à Mantes-la-Jolie (Yvelines), usine occupée, jour et nuit, depuis le 24 février, par la moitié de ses 400 salariés.
Le site, qui réalise des microcircuits électroniques pour cartes à puce, comprend un centre de recherche et développement - les salariés non grévistes, que la direction a dispensé de venir travailler - et une unité de fabrication - les grévistes. Cette division possède également une autre usine, à Singapour.
Malgré l'ordonnance de référé, prise jeudi 26 mars par le tribunal de grande instance de Versailles, qui donne aux grévistes "24 heures pour quitter (les lieux) spontanément", sinon " la force publique pourra" les expulser, les intéressés étaient toujours là, samedi matin 28 mars, se préparant à faire la quête qu'ils organisent chaque jour dans la région. Car les 26 et 27 mars, les réunions avec la direction n'ont pas permis de débloquer la situation.
Une grève atypique, en raison de sa durée, mais aussi de son motif. Qui n'est pas l'annonce d'un plan social, mais la forte inquiétude que ressentent les salariés. Le 26 mars, pourtant, la direction a indiqué, dans une note d'information, qu'il n'y a "aucune délocalisation" et qu'elle "s'est engagée à ce qu'il n'y ait aucun plan social en 2009 ou en 2010". Mais les grévistes n'y croient pas. "Nous avons suffisamment d'éléments écrits démontrant qu'à moyen terme le site est voué à être fermé" au profit de celui de Singapour, explique Rachid Brihi, avocat du cabinet Grumbach et associés, qui défend les grévistes.
Les volumes de production du site ne cessent de diminuer (2,4 milliards d'unités en 2007, 2,2 en 2008, 2 prévus par la direction en 2009, indique la CGT). Et selon les syndicats, depuis mi-2008, la production est devenue plus importante à Singapour qu'à Mantes-la-Jolie. "Nous demandons la communication de la comptabilité et des volumes des deux sites, et qu'il y ait une répartition équitable entre eux, mais la direction ne veut nous donner aucun chiffre sur Singapour", dénonce Eric Scheltienne, délégué syndical CGT.
Sa méfiance est alimentée par des informations inquiétantes, données par la direction, avant les promesses rassurantes. Ainsi, le 28 janvier, lors du comité d'entreprise, FCI évaluait, dans ses prévisions pour le premier trimestre, un sureffectif variant de 34 à 42 salariés, selon les mois. Et le 16 février, elle annonçait encore des mesures de restriction : le gel des embauches, la fin de l'intérim, le report des augmentations salariales, etc. "Nous avons aussi appris qu'elle avait proposé à des salariés des licenciements négociés déguisés en faute, indique M. Scheltienne. Tout cela a fait déborder le vase." "Nous avons tous grandi dans la région, nous connaissions FCI avant même d'y entrer, raconte un opérateur. C'est une bonne boîte, le travail est intéressant. Mais on nous a menti."
Lors du rachat de l'entreprise, "le maintien des quatre sites français avait été garanti pour trois années. Nous serons arrivés à l'échéance... en novembre 2008", remarque Gilles Visse, le délégué syndical CFDT. Tout est donc possible désormais. D'ailleurs, l'usine de La Ferté-Bernard (Sarthe) fermera en avril.
"Nous voulons négocier, dès aujourd'hui, des indemnités élevées, à verser en cas de futur plan social, précise M. Scheltienne. Car demain, quand Singapour aura la maîtrise de tout le processus, nous ne serons plus en position de force pour le faire." Mais la direction de FCI refuse, comme elle a rejeté la proposition syndicale d'une médiation.
Le Monde - 29.03.09
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