En revanche, trois pays membres de l’Union européenne – Autriche, Belgique et Luxembourg – sont, avec la Suisse, les incontestables vedettes d’une liste remarquable. Huit pays appelés « autres centres financiers » : on ne saurait donc les confondre avec de vulgaires paradis fiscaux, appellation dont la Suisse se défend bec et ongle depuis presque aussi longtemps qu’elle en est un.
Ces huit pays, tout comme Macao et Hong Kong, ont tout récemment informé l’OCDE de leur intention de se ranger à ses principes. Ils se sont engagés à renégocier leurs conventions bilatérales, afin de s’y engager à répondre favorablement aux demandes de renseignements fiscaux de ses partenaires, lorsque ceux-ci peuvent étayer leurs soupçons à l’égard d’un contribuable donné.
Mais cette bonne volonté a été jugée trop récente. Il est vrai qu’elle ne s’est pas encore traduite par la signature de nombreuses conventions bilatérales : cinq pour Brunei, une pour la Belgique. Avec treize conventions déjà signées, Jersey, Guernesey et l’Ile de Man, ont fait leur entrée dans la liste des quarante pays vertueux, comme l’Allemagne, les Etats-Unis, la France, ou la Chine.
La Chine ? Oui, la Chine, lestée toutefois de cet amusant renvoi de note : « Excluant les zones administratives spéciales qui se sont engagées à appliquer les normes fiscales internationales ». Et voilà comment Hong Kong et Macao sont anonymement exclus de la liste blanche, sans entrer toutefois dans la liste grise. Le paradis, c’est « ailleurs ».
Enfin il y a une liste noire : Costa-Rica, Malaisie, Philippines et Uruguay, qui n’avaient pas eu la présence d’esprit de faire connaître leurs bonnes intentions avant la réunion du G20. Quant à Israël, qui figura jusqu’en 2003 parmi les pays blanchisseurs d’argent sale, il n’est nulle part lui non plus : ni blanc, ni gris, ni noir.
La publication de ces listes constitue-t-elle un progrès ? Pas pour l’Union européenne, en tous cas, dont les conflits fiscaux internes se règlent désormais… au G20. On n’en serait pas là si la France et l’Allemagne avaient été moins laxistes en 2001, lorsque fut conclu l’accord européen sur la fiscalité de l’épargne : l’Autriche, la Belgique et le Luxembourg furent alors dispensés de l’échange automatique de renseignements fiscaux entre Etats membres, jusqu’à ce que la Suisse, Andorre, Saint Marin, Monaco et le Liechtenstein y consentent eux-mêmes – ce qui peut faire longtemps.
Enfin le communiqué du G20 proclame un peu hâtivement que « l’ère du secret bancaire est révolue ». Or le Royaume Uni figure dans la liste blanche, bien que la City soit le premier centre offshore du monde ; et que les riches étrangers établis à Londres bénéficient d’une exonération fiscale totale de leurs revenus.
En réalité, l’initiative du G20 fige pour très longtemps la situation créée par les travaux de l’OCDE. L’échange automatique d’informations fiscales - la seule mesure qui vaille comme on le sait depuis quatre-vingts ans – va devenir très vite une notion obsolète. C’est la demande au cas par cas qui prévaut, interdisant la « pêche aux renseignements ». Ce n’est pas la fin du secret bancaire, seulement une légère porosité, quasiment mesurable : 250 fraudeurs américains coincés en Suisse pour 53.000 intouchables.
Quant aux entreprises multinationales, dont l’optimisation fiscale guide maintenant la conception même des produits, elles continueront de jouer une partie très inégale contre les administrations fiscales. Comment ces dernières nourriront-elles leurs dossiers de demandes de renseignements fiscaux ? Ce sont les mêmes cabinets d’audit qui certifient leurs comptes et leurs conseillent les meilleurs techniques d’évasion.
Le Monde - 03.04.09
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