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17/10/2009
A l’ère du néolibéralisme la liquidation des Biens Publics en France
En France la liquidation des biens publics se poursuit depuis une trentaine d’années dans la ligne de la mondialisation capitaliste et de la globalisation financière.
L’EXEMPLE Français :
De 1933 à 1982 : période de constitution du Bien Public en – - France
– 1933 : Air France ;
1937 : SNCF ;
1944-45 : Charbonnages de France ;
1945 : Renault, Banque de France, BNCI, CNEP, Crédit Lyonnais, Société Générale ;
1946 : assurances, création d’EDF-GDF, AFP, Compagnie Générale Transatlantique
Fin 1980, le secteur public productif comprend les 32 groupes :
* Industrie : Aquitaine chimie, Bureau de recherches géologiques et minières, Charbonnages de France, Commissariat à l’énergie atomique, Compagnie française des pétroles, EDF, GDF, * Entreprise minière et chimique, Entreprise recherche activité pétrolière, Institut de développement industriel, Renault, Société nationale d’étude et de construction de moteurs d’aviation, Société nationale industrielle aérospatiale, Société nationale des poudres et explosifs, * Transports, communications : Agence Havas, Air France, Compagnie française des câbles sous-marins et de radio, Compagnie générale maritime et financière, RATP, SNCF, Société nationale des entreprise de presse, Société nouvelle de radiodiffusion, Télédiffusion de France, * Banques et assurances : Banque nationale de Paris, Caisse des dépôts et consignations, Caisse nationale des marchés de l’Etat, Centrale assurances générales de France, Crédit Lyonnais, Société centrale du GAN, Société centrale-Union des assurances de Paris, Société financière pour le développement des équipements collectifs, Société générale.
En 1981-1982 : les effectifs des groupes du secteur public, hors Seita et PTT, représentent 1 763 000 salariés (contre 1 088 000 en 1980) soit 16% des salariés et 40% des immobilisations des sociétés soumises à l’imposition sur les Bénéfices Industriels et Commerciaux. Avec les nationalisations, 14 groupes s’ajoutent aux précédents :
Industrie : Alsthom-Atlantique, Compagnie des machines Bull, Compagnie générale d’électricité, Saint Gobain Pont-à-Mousson, Thomson Brandt, Usinor, Péchiney Ugine Kuhlmann, Rhône-Poulenc, Sacilor),
Banques et assurances : Banque industrielle et immobilière privée, Compagnie financière de Suez, Crédit chimique, Crédit commercial de France, Financière de Paris et des Pays-Bas.
Il convient d’ajouter 6 groupes où les participations publiques deviennent majoritaires :
* Industrie : ITT- Société de produits industriels, Matra, Roussel Uclaf, Société centrale d’étude Marcel Dassault, * Banques : Banque Rothschild, Banque Worms.
De 1986 à 2006 : L’ère des dénationalisations totales ou partielles :
En 1986-88 : gouvernement Chirac 13 milliards d’euros :
Industrie : Saint Gobain, Compagnie générale de constructions téléphoniques, Matra,
communications : Agence Havas, TF1, Sud radio,
Banques et assurances : Mutuelle générale française accidents, Mutuelle générale française vie, Banque du bâtiment et des travaux publics, Banque industrielle et immobilière privée, Société générale, Compagnie financière du crédit commercial de France, Compagnie financière de Paribas, Compagnie financière de Suez.
En 1992 : gouvernement Bérégovoy : Industrie Total,
En 1993-97 : (gouvernements Balladur et Juppé : 26,4 milliards d’euros
Industrie : Elf, Rhône-Poulenc, Seita, Usinor, Péchiney, Renault, Bull),
Banques et assurances : BNP, BFCE, UAP, AGF
En 1997-2002 : gouvernement Jospin : 50 milliards d’euros
Industrie : Thomson, Aérospatiale, EADS, Renault ;
Communications : France-Telecom, Air France, Autoroutes du Sud de la France, SMC, RMC, SFP, TDF,
Banques et assurances : CIC, Crédit Lyonnais, Banque Hervet, CNP, GAN,
En 2002-2006 : gouvernement Raffarin puis De Villepin : de l’ordre de 100 milliards d’euros :
Industrie : EDF-GDF, Snecma, GIAT Industries, Areva, Direction des Chantiers Navals, Arsenaux,
Transports et communications (France Telecom, SNCM, ASF, Aéroports de Paris, Air France,
Banques et assurances : Caisse centrale de réassurance.
Cette liste ne prend pas en compte les opérations en cours qui sont souvent le prélude à la privatisation :
à la SNCF,
à la RATP,
à La Poste,
à la Banque de France,
à la Caisse des Dépôts et Consignations En 2007, il ne reste plus rien du secteur public industriel. Le secteur public social en voie de destruction massive :
Le patrimoine administratif : terrains, infrastructures, immeubles, monuments historiques – soit 1100 milliards d’euros - est en cours de vente,
En 2004 commence la vente :
* la vente du patrimoine des Hôpitaux de Paris – hôpital Laennec, classé monument historique, et hôpital Boucicaut, * la vente des immeubles du Quai d’Orsay à des fonds de pensions américains, * l’immeuble de l’Imprimerie nationale, elle-même en cours de démantèlement, est vendu en 2004 à la société américaine Carlyle, * Une agence est créée : l’Agence des propriétés immobilières de l’Etat à statut d’E.P.I.C ; elle acquiert les biens, les reloue à l’Etat (sic) avant la revente à des investisseurs privés.
Le patrimoine historique se délabre entre « décentralisation » et musées que l’on détruit : Musée de l’Homme, Musée national des arts africains et océaniens, Musée des arts et traditions populaires, et que l’on vide.
La protection sociale : – assurance maladie, accidents du travail, retraites - est démantelée au profit de l’épargne individuelle et des assurances privées. Le chômage devient également source de profits substantiels pour le privé.
l’ANPE perd le monopole du placement ouvert aux agences privées. Il s’agit des sociétés d’intérim, notamment, qui obtiennent des ASSEDIC de mirobolants contrats de « promesses de placement » Les biens d’usage collectif :
sites, espace public, eau, écosystèmes, subissent dégâts et privatisation :
destruction de bâtiments et de quartiers historiques,
bétonnage des côtes : le déjà faible budget du Conservatoire du littoral a été divisé par trois en 20 ans,
défigurations des paysages,
multiplication des autoroutes et autres voies de « contournement »,
mainmise sur l’eau par les entreprises privées,
baisse du financement et privatisation en cours de l’archéologie préventive depuis 2004 : les entreprises privées effectuent les fouilles,
pollution de l’air et du sous-sol,
augmentation des risques majeurs du nucléaire civil par l’introduction en Bourse en 2004 de 35% du capital d’Areva – ex COGEMA et Framatome - Sarkozy était alors Ministre de l’Economie. COMMENT FAIT-ON ?
corruption des responsables politiques et administratifs et impunité,
modifification de la législation : le décret du 23/12/98 permet au musée du quai Branly, dit des « arts premiers » de vendre ses collections,
la loi du 11/12/2001 permet la cession des biens immobiliers de l’Etat au privé. Le ministre de l’économie, Sarkozy l’ami des patrons, accentue, par ordonnance du 19/08/2004 le mouvement qui permet la vente au privé des immeubles de bureaux sans avoir à respecter la procédure de déclassement.
* Cession à prix bradés, * abandon de créances, * frais fictifs, * tout cela est possible ! Les infractions sont légion : abus de biens sociaux, pots-de-vin, faux-bilans. * Les responsables impunis, sont souvent récompensés par des parachutes dorés, indemnités et des retraites douillettes.
Les privatisations sont précédées, quand elles risquent d’être impopulaires, par le laisser aller voire le creusement volontaire des dettes de groupes qu’on laisse comme dans le privé faire des investissements aventureux et/ou délictueux : Crédit Lyonnais, EDF, France Telecom..).
Quand ça ne suffit pas, le gouvernement s’abrite derrière les directives européennes :
* « libéralisation » du fret ferroviaire, * des marchés publics de l’eau, des transports, des télécommunications, de l’énergie, des services portuaires, * Mais ces directives sur lesquelles il verse des larmes de crocodile, il LES A ADOPTEES !!!! * Et l’O.C.D.E fournit les modes d’emploi !
La sous-évaluation des biens publics livrés aux copains et aux coquins est systématique,
* en surestimant l’endettement par exemple * Pour EDF : en 2005, 20% des actions GDF ont été vendues 4,5 milliards d’euros pour une valeur de 6 milliards, * le GAN a été vendu à un tiers de sa valeur, * ASF a été vendue à 49% par Jospin en 2002 pour 1,8 milliards d’euros alors que ces autoroutes étaient estimées à 6,3 milliards, * Total bradé pour quelques milliards d’euros par Bérégovoy vaut aujourd’hui 125 milliards d’euros, * La vente des 1300 appartements de la Banque de France est réalisée en bloc et non à la découpe…gros profits en vue pour les repreneurs, * la Snecma est bradée en 2004 à General Electric, * la SNCM renflouée par l’Etat est vendue pour une bouchée de pain à la Connex – filiale de Vivendi- et à un fonds de pension contrôlé par un ami du premier ministre De Villepin
Les techniques utilisées :
* la vente totale ou partielle des entreprises publiques, * le démantèlement par filialisation avant vente des filiales les plus rentables, * le recours massif à la sous-traitance (informatique, communications, distribution, transports, maintenance, nettoyage, restauration…) et à la délocalisation. * Pour mieux vous entuber, on appellera ça « externalisations » o On peut vendre les murs pour les louer ensuite : c’est le cas à France-Telecom désormais locataire de 95% de ses surfaces, à la SNCF (gares), et dans les hôpitaux ! o On peut aussi vendre les véhicules de transport pour les louer après : La Poste (60000 véhicules), France-Telecom (48000 véhicules), EDF (50000 véhicules, SNCF (13000 véhicules), et aussi Bercy, les collectivités locales, les HLM…tout cela au profit d’une société de location comme Leaseplan, filiale de la banque ABN AMRO qui achète à prix réduit et loue à prix maximum. ABN AMRO a été acquis par un consortium de trois banques – Fortis, RBS et Santander – en octobre 2007. Le 3 octobre 2008, l’Etat néerlandais rachetait les intérêts d’ABN AMRO détenus par Fortis, remplaçant Fortis au sein du holding RFS et prenant la direction des activités d’ABN AMRO o la technique de l’asphyxie budgétaire qui conduit la recherche publique à se soumettre aux demandes des groupes privés en échange de financement. On vous concocte de jolis OGM !
QUI SONT LES PREDATEURS ?
Ces requins qui tapent gaiement dans les bancs de menus fretin que nous sommes sont :
Pour l’essentiel de grandes sociétés multinationales :
* celles qui ont leur siège en France : Vivendi, Lyonnaise des eaux, Bouygues, Bolloré, Total, Lagardère, Dassault, Crédit agricole, Carrefour, * de grands groupes financiers multinationaux. En 2004 les fonds spéculatifs d’investissement – les actifs sous gestion de fonds d’investissement – représentaient 6200 milliards d’euros aux E.U et 4000 milliards en Europe. * les fonds de pension (actionnaires dans 3600 entreprises françaises pour 8% du PIB et 1000000 de salariés). * Les Hedge Funds et les Fonds Souverains asiatiques et du Golfe.
En comptant tous les actionnaires, concentrés à 90% en Amérique du Nord, en Europe et au Japon, on compte selon l’orfèvre Jean Peyrelevade « environ trois cent millions de personnes, femmes et enfants compris » soit 5% de la population mondiale sous domination financière.
Au sein des actionnaires, on peut différencier :
les « vraiment riches » qui ont au moins un million de dollars en actifs financiers), très peu nombreux. Ils concentrent la richesse : dix à douze millions d’individus (0,2%de la population mondiale) contrôlent la moitié de la capitalisation boursière de la planète et, vraisemblablement, une proportion à peine plus faible du patrimoine marchand de l’humanité.
à l’intérieur des « vraiment riches », une toute petite fraction, les « ultra-riches », 77 000 ménages (0,0025%de la population mondiale) détiennent environ 15% de la richesse mondiale.
salades-nicoises.net - 17.10.09
Une récession temporaire… ou la fin de la croissance ?
Alors que la croyance dominante attribue la crise économique actuelle aux seuls désordres du système financier, Richard Heinberg affirme qu’elle est une conséquence systémique du pic pétrolier. Dans cet article de fond, le « pape de la décroissance » expose ses arguments. Nous le publions dans nos colonnes parce qu’il présente des éléments de réflexion indispensables à la compréhension des enjeux actuels, même si nous ne partageons pas la philosophie malthusienne qui sous-tend son exposé. Au demeurant, au delà de la question de savoir s’il a entièrement tort ou raison, il est nécessaire de connaître et de comprendre une pensée qui exerce désormais une influence considérable dans le monde anglo-saxon en général, et sur les administrations Obama et Brown en particulier.
Tout le monde s’accorde sur ce fait : notre économie est mal en point. Les symptômes inévitables comprennent un déclin des dépenses et de la confiance des consommateurs, ainsi qu’un repli des échanges commerciaux mondiaux et du crédit disponible. Ajoutez à cela un effondrement des valeurs immobilières, un carnage dans les industries automobiles et le transport aérien, et vous obtenez effectivement un tableau très sombre.
Mais pourquoi l’économie états-unienne et, dans une perspective plus large, l’économie mondiale flanchent-elles toutes les deux ? Du côté des médias dominants, des dirigeants mondiaux et des économistes en chef états-uniens (Timothy Franz Geithner, le secrétaire au Trésor et Ben Shalom Bernanke, le directeur de la Réserve Fédérale) on observe une quasi-unanimité d’opinion : ces récents troubles s’expliqueraient principalement par la combinaison de mauvais prêts immobiliers et d’une règlementation insuffisante des produits dérivés de la finance.
Voilà pour le diagnostic conventionnel. S’il est correct, alors le traitement de notre maladie économique devrait logiquement inclure, d’une part, d’importantes sommes consacrées au renflouement des institutions financières, des banques de prêt immobilier et des constructeurs automobiles en déroute ; d’autre part, une meilleure règlementation des produits dérivés financiers et des marchés à terme ; et enfin des programmes de relance destinés à revigorer les dépenses de consommation.
Mais si ce diagnostic était erroné ? La métaphore ne nécessite guère d’explications : nous savons tous quelles tragédies peuvent résulter d’une erreur d’appréciation des symptômes de la part d’un médecin et de la confusion par celui-ci de plusieurs maladies.
Un phénomène semblable s’observe dans le cas de notre affection économique nationale et mondiale. Si nous ne comprenons pas pourquoi le métabolisme industriel et financier du monde souffre, il est peu probable que nous puissions appliquer le bon remède et nous risquons, au bout du compte, d’aggraver la situation bien au-delà de ce qu’il en serait autrement.
N’en doutons pas : le diagnostic conventionnel est certainement en partie pertinent. La relation causale entre les prêts à risque et les crises de Fannie Mae, Freddie Mac et Lehman Brothers a été largement examinée et ne fait plus guère de mystère. Clairement, au cours des quelques années passées, les bulles spéculatives dans les secteurs immobilier et financier furent gonflées à une échelle colossale, de sorte que leur éclatement était inévitable. Il semble difficile de contredire le point de vue du Premier ministre australien Kevin Rudd, dans sa tribune publiée par le Sydney Morning Herald : « Les racines de la crise s’enfoncent dans la décennie d’excès l’ayant précédée. Au cours de celle-ci, le monde a connu un boom extraordinaire[...]Cependant, comme nous l’apprîmes ultérieurement, le boom global reposait en grande partie[...]sur un château de cartes. Premièrement, dans de nombreux pays occidentaux le boom a été érigé sur une montagne de dette entre les mains des consommateurs, des entreprises et de certains gouvernements. Comme l’explique le magnat de la finance George Soros : “Pendant 25 ans [l’occident] a consommé davantage qu’il n’a produit... nous avons vécu au-dessus de nos moyens.” » [1] .
Néanmoins, afin de saisir pleinement les origines de l’effondrement économique mondial en cours, notre regard doit-il s’arrêter là ?
On peut arguer que les tragiques événements liés à l’immobilier, aux marchés de produits dérivés financiers, à l’industrie automobile et au transport aérien ne sont simplement eux-mêmes que des symptômes d’un dysfonctionnement systémique encore plus profond signifiant la fin de la croissance économique telle que nous l’avons connue.
En bref, je propose là un diagnostic alternatif. Cette explication de la crise économique est déconseillée aux âmes sensibles car, si celle-ci est avérée, elle implique que le patient est beaucoup plus gravement atteint que ne l’affirment même les économistes les plus pessimistes. Mais si elle est correcte, alors l’ignorer nous fait encourir des périls bien plus importants.
Croissance économique, crise financière et pic pétrolier
Depuis plusieurs années, un mouvement de commentateurs (dont je fais partie) pronostiquait un crash financier en se basant sur la constatation d’un plafonnement imminent de la production pétrolière mondiale. [2] Notre raisonnement s’articulait comme ceci :
L’accroissement continu de la population et de la consommation ne peut se poursuivre indéfiniment sur une planète limitée. Il s’agit là d’une observation axiomatique sur laquelle tous ceux familiarisés avec les mathématiques de la croissance exponentielle ne peuvent que tomber d’accord, quand bien même ils délimiteraient leur acquiescement en usant de vagues références à la « substitutionnabilité » et autres « transitions démographiques ». [3]
Ces limites axiomatiques de la croissance impliquent que la rapide augmentation tant de la population que de la consommation par individu, dont nous avons été témoins au cours des deux siècles passés, doit nécessairement prendre fin à un moment donné. Mais quand est-il probable que cela se produise ?
L’étude injustement décriée et intitulée Les Limites de la croissance, publiée à l’origine en 1972 et régulièrement actualisée depuis, a tenté d’apporter une réponse à cette question en s’appuyant sur une analyse des ressources disponibles et de leur déplétion, ainsi que plusieurs scénarios de croissance démographique future et de rythmes de consommation. Le plus pessimiste des scénarios de 1972 suggérait une fin de la croissance économique mondiale pour les environs de 2015. [4]
Or il existe peut-être un moyen plus simple de pronostiquer le crépuscule de la croissance.
L’énergie est le précurseur incontournable de la croissance (encore une fois, cette affirmation est axiomatique : tant la physique que la biologie nous enseignent que sans énergie, rien ne se produit.). L’expansion industrielle des deux derniers siècles s’est systématiquement basée sur un accroissement de la consommation d’énergie. [5] Plus spécifiquement, l’industrialisme a toujours été inextricablement lié à l’accessibilité et à la consommation d’énergie bon marché, du charbon au pétrole (et plus récemment, le gaz naturel). Cependant, les combustibles fossiles sont par nature des ressources sujettes à déplétion et non renouvelables. Ainsi (et selon la thèse du pic pétrolier), l’impossibilité à terme de maintenir un approvisionnement croissant en énergie fossile abordable conduira vraisemblablement à l’arrêt de la croissance économique en général, à moins que les sources d’énergie alternatives et l’efficacité de l’usage d’énergie puissent être accrues rapidement et dans des proportions suffisantes. [6]
Parmi les trois combustibles fossiles conventionnels, le pétrole est sans aucun doute le plus vital économiquement, car il fournit 95 % de toute l’énergie utilisée dans les transports. De plus, le pétrole est le combustible qui nous posera probablement des problèmes d’approvisionnement le plus rapidement, car les découvertes à l’échelle mondiale déclinent depuis des décennies et la plupart des pays producteurs de pétrole connaissent déjà une baisse de production. [7]
Ainsi, selon cette logique, la fin de la croissance économique (telle que définie conventionnellement) est inévitable et le pic pétrolier en est le probable facteur déclencheur.
Pourquoi le pic pétrolier conduirait-il non seulement à des problèmes dans le secteur des transports, mais aussi à une crise économique et financière générale ? Au cours du siècle dernier, la croissance s’est institutionnalisée au cœur même de notre système économique. Toutes les villes et entreprises veulent croître. Ce fait est compréhensible ne serait-ce qu’en raison de la nature humaine : pratiquement tout le monde cherche un avantage compétitif par rapport à quelqu’un d’autre, et la croissance fournit l’occasion d’y parvenir. Mais un mobile lié à la survie financière est également à l’œuvre : sans croissance, les entreprises et les gouvernements sont dans l’impossibilité d’honorer leur dette. En outre la dette est devenue partie intégrante du système industriel. Durant les deux décennies écoulées, le secteur des services financiers s’est développé plus rapidement que tout autre secteur de l’économie, dépassant même l’augmentation des dépenses de santé et représentant un tiers de toute la croissance enregistrée par l’économie états-unienne. De 1990 à aujourd’hui, le rapport dette / PIB est passé de 165 % à plus de 350 %. La santé de l’économie repose essentiellement sur la dette, et le corollaire de celle-ci est le pari selon lequel les niveaux de production et de consommation de l’année suivante seront plus élevés que ceux de l’année en cours.
Sachant que la croissance ne peut perdurer sur une planète limitée, ce pari et son incarnation par les institutions financières peuvent être qualifiés de plus grand « jeu de Ponzi » de l’histoire. Nous justifions l’emprunt actuel par la croyance irrationnelle selon laquelle la croissance perpétuelle est possible, nécessaire et inévitable. En fait, nous avons emprunté aux générations futures de manière à pouvoir dilapider aujourd’hui leur capital.
Jusqu’à une période récente, l’argument du pic pétrolier s’articulait autour d’une prévision : le déclin inéluctable de la production pétrolière mondiale, lorsqu’il surviendrait, anéantirait la croissance. Mais voici qu’alors la prévision devient diagnostic : dans la période s’étalant entre 2005 et 2008, l’énergie a cessé de croître et le prix du pétrole a grimpé jusqu’à des niveaux records. Au mois de juillet 2008, le cours du baril de pétrole frôlait les 150 dollars – après ajustement en fonction de l’inflation, la moitié du record précédent – et l’économie commença à vaciller. Les secteurs de l’automobile et du transport aérien tremblaient ; le consommateur ordinaire parvenait difficilement à faire le plein pour se rendre au travail tout en payant les traites de son logement. Les dépenses de consommation commencèrent à baisser. Au mois de septembre, la crise économique devint aussi une crise financière lorsque les banques se mirent à trembler et imploser. [8]
Compte tenu de l’enjeu, il est important de peser les deux diagnostics en se basant sur les faits et non pas des idées préconçues.
Il n’est pas nécessaire d’examiner les éléments appuyant ou réfutant le diagnostic conventionnel, car sa validité n’est pas mise en doute en tant qu’interprétation partielle des événements observés. La question est plutôt de savoir s’il constitue une explication suffisante, et donc une base adéquate afin de formuler une réponse efficace.
Quels sont les éléments pesant en faveur de l’alternative ? Il me paraît pertinent de commencer par un article récent de l’économiste James Hamilton de l’Université de Californie, à San Diego, intitulé Causes and Consequences of the Oil Shock of 2007-2008 (« Causes et conséquences du choc pétrolier de 2007-2008 »), qui traite des cours pétroliers et de leur impact économique avec clarté, logique et chiffres à l’appui, expliquant pourquoi et comment le crash économique est lié au choc pétrolier de 2008. [9]
Hamilton commence par citer des études précédentes montrant une nette corrélation entre les sommets atteints par les cours pétroliers et les récessions. Sur la base de cette corrélation, chaque économiste attentif aurait dû pronostiquer une sévère récession pour 2008. « En effet, » écrit Hamilton, « cette relation pourrait expliquer la totalité de la chute de 2007-2008[...]Si quelqu’un avait pu savoir à l’avance comment les cours pétroliers évolueraient en 2007-2008, en utilisant la relation estimée historiquement [entre la hausse du cours et son impact économique] [...]il aurait alors pu prédire le niveau de PIB réel tant pour le troisième trimestre 2008 que le quatrième de façon assez précise. »
Encore une fois, il ne s’agit pas d’ignorer le rôle joué par les secteurs financier et immobilier dans le malaise économique global. Mais selon le diagnostic alternatif, l’effondrement des marchés du logement et des produits dérivés financiers est perçu comme ayant amplifié un signal émanant à l’origine de l’échec à accroître l’afflux de ressources en voie d’épuisement. Hamilton poursuit : « Il est tout du moins clair que quelque chose d’autre que l’immobilier s’est détérioré pour aboutir à la transformation d’une croissance lente en récession. Selon moi, cela comprend la chute des ventes d’automobiles, un ralentissement des dépenses générales de consommation et la détérioration de la confiance des consommateurs, à quoi le choc pétrolier est un facteur ayant indéniablement contribué. »
De plus, Hamilton souligne l’existence d’un « effet d’interaction entre le choc pétrolier et les problèmes dans l’immobilier. » C’est-à-dire que, dans beaucoup de zones urbaines, les prix des logements en 2007 poursuivaient leur hausse dans les agglomérations les plus proches des centres urbains, mais chutaient déjà rapidement dans les agglomérations nécessitant de longs trajets. [10]
Pourquoi les cours pétroliers ont-ils atteint des sommets ?
Ceux qui adhèrent au diagnostic conventionnel concernant l’effondrement économique en cours seraient peut-être d’accord sur le fait qu’il y ait eu, dans une certaine mesure, un lien causal entre l’ascension des cours pétroliers et la récession, mais ils réfuteraient le fait que la hausse du baril soit liée d’une façon ou d’une autre aux limites en termes de ressources, car —affirment-ils— elle était surtout imputable à la spéculation sur les marchés pétroliers à terme, et n’avait pas grand chose à voir avec les fondamentaux de l’offre et de la demande.
À cet égard, le diagnostic conventionnel est, une fois de plus, en partie fondé. La spéculation sur les marchés pétroliers à terme durant la période en question a presque certainement contribué à tirer les cours plus haut que les fondamentaux ne le justifiaient. Mais pourquoi les investisseurs misaient-ils sur le pétrole ? L’engouement pour les contrats pétroliers n’était-il qu’une autre bulle, comme la frénésie boursière de l’Internet à la fin des années 1990 ou le boom de l’immobilier entre 2003 et 2006 ?
Au cours de la période s’étalant de 2005 à la mi-2008, la demande en pétrole s’amplifiait, particulièrement en Chine (qui passa d’une situation d’autosuffisance en 1995 au rang de second pays importateur au monde après les États-Unis en 2006). Or l’approvisionnement mondial en pétrole restait plus ou moins stable : les données mensuelles de la production de brut oscillaient dans une fourchette relativement étroite, entre 72 et 75 millions de barils par jour. Tandis que les cours étaient à la hausse, les volumes produits décollaient à peine. Tout indiquait alors que l’ensemble des producteurs pompaient à un débit maximum : même les saoudiens semblaient se précipiter pour tirer bénéfice de la manne occasionnée par les prix.
Il serait ainsi judicieux de noter que la spéculation sur les marchés pétroliers à terme ne faisait qu’amplifier une tendance des cours inévitable au regard des fondamentaux de l’offre et de la demande. James Hamilton (dans la publication mentionnée plus haut) le formulait comme ceci : « Avec le recul, il paraît difficile de nier le fait que les cours sont montés trop haut en juillet 2008, et que ce mauvais calcul était en partie influencé par l’afflux d’investissements dans les contrats d’approvisionnement à terme. Il serait toutefois important de souligner que les deux ingrédients nécessaires pour rendre cohérente une telle vision, à savoir une faible élasticité de la demande en termes de prix et l’impossibilité d’accroissement de la production physique, sont les mêmes composantes essentielles d’une explication du même phénomène basée sur les fondamentaux. Aussi conclurai-je que ces deux facteurs, plutôt que la spéculation en elle-même, devraient être désignés comme la cause principale du choc pétrolier de 2007-2008. »
Conséquences du pic
À quel point les tourments du secteur automobile, des transports routiers et aériens seraient-ils imputables à l’escalade des prix, ou au crash de l’économie, cela fait également l’objet d’une controverse. Bien entendu, dans l’hypothèse que le diagnostic alternatif soit correct, ces deux derniers événements sont de toute façon liés causalement. Il pourrait néanmoins être utile d’examiner la situation de plus près.
Personne n’ignore que General Motors et Chrysler ont cette année fait faillite en raison de la chute dramatique des ventes d’automobiles. La prévision actuelle table sur des ventes d’environ 10,3 millions de véhicules aux États-Unis en 2009, en baisse par rapport aux 13,2 millions de l’année passée et 16,1 millions pour 2007. Les ventes d’autos états-uniennes n’ont jamais atteint un aussi bas niveau depuis les années 1970. Les ventes de camionnettes, celles qui génèrent le plus de profits, ont le plus accusé le coup en 2008, alors que le prix des carburants grimpait et que les acheteurs évitaient les véhicules consommant beaucoup. C’est à ce moment-là que les constructeurs automobiles ont réellement commencé à souffrir.
Les maux affectant le secteur du transport aérien sont résumés par une récente publication du GAO [11] :« Après 2 ans de profits, le secteur du transport aérien commercial a accusé une perte de 4,3 milliards de dollars au cours des trois premiers trimestres de l’année 2008 [à mesure que le prix du kérosène augmentait]. Collectivement, les compagnies aériennes états-uniennes ont réduit leur capacité sur le plan domestique, comme en atteste le nombre de places mises en service, dans une proportion de 9 % entre le quatrième trimestre de l’année 2007 et la même période en 2008 [...] Pour réduire leur capacité, elles ont par ailleurs diminué le nombre d’appareils en service de 18 % [...] Les compagnies ont en outre dans l’ensemble réduit leur personnel d’environ 28 000 postes, soit près de 7 %, entre fin 2007 et fin 2008 [...] Le repli du secteur aérien en 2008 a fait chuter les revenus des aéroports, l’accès des passagers au réseau aérien national, et les revenus des caisses de prévoyance. » [12]
Concernant le transport routier, les dépenses en carburant représentent près de 40 % des coûts généraux de fonctionnement. En 2007, tandis que le prix du diesel grimpait, les transporteurs commencèrent à essuyer des pertes financières et apposèrent des surcharges de carburant ; simultanément les volumes transportés commencèrent à chuter. Après le mois de juillet 2008, lorsque les cours pétroliers chutèrent, le tonnage poursuivit son déclin. Globalement, la baisse cumulée des charges embarquées sur semi-remorques, camions-citernes et fourgons atteignait 15 à 20 % pour la seule période allant de juin à décembre 2008. [13]
Cette dernière série de chiffres soulève quelques questions cruciales en vue de la compréhension du diagnostic alternatif : pourquoi, si la production pétrolière mondiale venait de plafonner, les cours du brut chutèrent-ils pendant les cinq derniers mois de l’année 2008 ? Par ailleurs, si le prix du pétrole représente un facteur essentiel dans la crise économique, alors pourquoi l’économie n’a-t-elle pas entamé un virage après le radoucissement des cours du brut ?
Pourquoi le prix du pétrole a-t-il chuté ?
Et pourquoi un cours plus bas n’a-t-il par entraîné une reprise rapide ?
La thèse du pic pétrolier prévoit, tandis que la production pétrolière mondiale atteint son niveau maximum puis commence à décliner, une augmentation dramatique des cours du brut. Mais elle envisage en outre un sévère accroissement de la volatilité des prix.
Voici comment s’articule sa logique : à mesure que s’épuisera le pétrole, son prix augmentera jusqu’à ce qu’il commence à saper les bases de l’économie en général. Le repli économique engendrera à son tour une baisse substantielle de la demande en pétrole, qui elle-même provoquera une baisse temporaire du prix du brut. Alors l’un des deux scénarios suivants se déroulera : soit (a) l’économie entamera une reprise, attisant un renouveau de la demande en pétrole, celui-ci conduisant derechef à des cours élevés qui de nouveau mineront l’activité économique ; ou (b), si l’économie ne s’en remet pas rapidement, la production pétrolière chutera progressivement en raison de la baisse de la demande jusqu’à ce que la capacité de production supplémentaire (engendrée par la demande plus faible) soit effacée par l’épuisement des gisements, ce qui conduira de nouveau à des prix élevés et encore davantage de contraction économique. Dans les deux cas, les cours pétroliers demeurent volatiles et l’économie connaît un repli.
Ce scénario correspond très précisément à la réalité qui se déroule devant nos yeux, bien qu’il reste à voir si la situation (a) ou (b) lui succède.
Durant les trois dernières années, les cours du brut ont augmenté et chuté plus brutalement que cela n’aurait été le cas sans un phénomène de spéculation généralisée sur les marchés pétroliers à terme. Toutefois la direction générale des prix, à savoir très haut, puis très bas, puis en partie de nouveau vers le haut, s’inscrit parfaitement dans le cadre de la thèse du pic pétrolier et du diagnostic alternatif.
Pourquoi l’économie n’a-t-elle pas connu de reprise rapide, sachant que les cours du brut se situent dorénavant à la moitié de leur niveau de juillet 2008 ? Encore une fois, le pic pétrolier n’est pas la cause unique de la crise économique actuelle. D’énormes bulles dans les secteurs de l’immobilier et de la finance constituaient autant d’accidents prêts à survenir, et l’implosion de ces bulles a engendré une sévère crise du crédit bancaire (ainsi qu’une crise de la solvabilité et une autre, émergente, de la monnaie) qui nécessitera probablement plusieurs années avant de se résorber même si l’approvisionnement énergétique ne pose pas problème.
Mais dorénavant le potentiel pour un retour d’un niveau de prix du brut élevé agit comme un plafond vis-à-vis de la reprise économique. Ainsi, lorsque l’économie semble effectivement montrer des signes de reprise (comme nous l’avons vu entre mai et juillet de cette année, avec des marchés boursiers en hausse et le rythme général de la contraction économique ralentissant quelque peu), le prix du brut décolle de nouveau tandis que les spéculateurs pétroliers anticipent un rétablissement de la demande. En effet, les cours du pétrole ont rebondi de 30 dollars en janvier à près de 70 dollars actuellement, provoquant une inquiétude générale quant à la possibilité qu’un niveau de prix de l’énergie élevé tue la reprise dans l’œuf. [14]
Maintenant que tous les gisements les plus faciles d’accès sont en exploitation, un baril de pétrole en provenance de sources récemment développées coûte approximativement 60 dollars à produire : aujourd’hui, découvrir de nouveaux champs pétrolifères implique généralement de forer à des profondeurs de plusieurs kilomètres sous la surface des mers, ou dans des pays politiquement instables sur le sol desquels l’équipement et le personnel encourent des risques importants. [15] Ainsi, dès que la demande des consommateurs en pétrole reprendra de la vigueur, les cours devront se maintenir significativement au-dessus de ce seuil afin d’encourager les exploitants à forer.
La volatilité des cours inflige des dégâts en amont, mais aussi en aval. La chute du prix du brut d’août à décembre 2008, combinée à une aggravation de la crise du crédit, a provoqué un repli dramatique des investissements dans le secteur pétrolier, ce qui a conduit au gel de nouveaux projets d’exploitation représentant une somme d’environ 150 milliards de dollars en investissements, alors que la capacité de production potentielle de ces nouveaux projets est nécessaire pour compenser le déclin de production des champs déjà en exploitation et maintenir ainsi un niveau de production mondiale stable. [16] Cela signifie que même si la demande se maintient à un niveau faible, la capacité de production diminuera presque certainement afin de s’aligner sur ce niveau de demande, engendrant une nouvelle hausse des cours en termes réels à un moment ou l’autre, peut-être d’ici à deux ou trois ans. Des cours pétroliers volatiles nuisent en outre au développement des énergies alternatives, comme nous l’avons vu ces derniers mois lorsque la baisse du prix du brut a porté atteinte à la santé financière des producteurs d’éthanol. [17]
D’une façon ou d’une autre, la croissance sera hautement problématique, si elle n’est pas tout simplement inatteignable.
Diagnostic général : en suivant la piste de la logique
À ce stade de la discussion, de nombreux lecteurs se demanderont pourquoi les sources d’énergie alternatives, et les mesures visant à améliorer l’efficacité énergétique, ne peuvent être mises en œuvre afin d’apporter une solution à la crise du pic pétrolier. Après tout, à mesure que le pétrole deviendra plus onéreux l’éthanol, le biodiesel et les voitures électriques seront susceptibles de devenir plus attrayants tant pour les producteurs que pour les consommateurs. La magie du marché n’interviendra-t-elle pas afin d’enrayer l’impact des pénuries de pétrole sur la croissance future ?
Il ne m’est pas possible, dans le cadre de cette discussion, d’expliquer de manière détaillée pourquoi le marché n’est probablement pas en mesure de résoudre le problème du pic pétrolier. Une telle explication nécessite de traiter la question des critères de bilan énergétique, ainsi que l’examen de nombreuses alternatives énergétiques individuelles à la lumière de ces critères. J’ai proposé de brefs aperçus à ce sujet auparavant, et une étude beaucoup plus poussée est en cours d’impression. [18]
Le résumé de mes conclusions à cet égard est le suivant.
Environ 85 % de notre énergie actuelle provient de trois sources primaires, à savoir le pétrole, le gaz naturel et le charbon, qui sont non renouvelables, dont le prix aura vraisemblablement tendance à augmenter radicalement au cours des prochaines années et décennies, engendrant de sévères pénuries, et enfin dont l’impact environnemental est inacceptable. Si ces sources ont historiquement été pourvues d’une valeur économique importante, nous ne pourrons pas en dépendre à l’avenir ; en effet plus nous retarderons la transition vers les sources d’énergie alternatives, plus cette transition sera éprouvante, à moins qu’un éventail pratique de systèmes énergétiques alternatifs et revêtant des caractéristiques économiques et environnementales supérieures, soit identifié.
Néanmoins, déterminer un tel éventail est plus difficile qu’on pourrait le penser a priori. Chaque source d’énergie présente des caractéristiques hautement spécifiques. De fait, ce sont les caractéristiques de nos sources d’énergie actuelles (principalement le pétrole, le charbon et le gaz naturel) qui nous ont permis de développer une société à grande mobilité, large population et taux de croissance élevés. L’examen des sources d’énergie alternatives disponibles selon des critères de densité énergétique, impacts environnementaux, dépendance vis-à-vis de matières premières en voie d’épuisement, intermittence ou constance de l’approvisionnement et pourcentage d’énergie produite en fonction de l’énergie investie, nous indique qu’aucune ne semble en mesure de perpétuer ce genre de société.
De plus, les infrastructures nationales de production d’énergie sont onéreuses et lentes à développer. La performance énergétique, de la même façon, nécessite des investissements qui, incrémentés dans le temps, présentent généralement des retours en diminution, car il est impossible de réaliser du travail sans aucune énergie au départ. Où sont la volonté et la capacité à rassembler suffisamment de capital en vue du déploiement de sources d’énergie alternatives et de la mise en œuvre de mesures d’économie à l’échelle requise ?
S’il existe de nombreuses installations productrices d’énergie alternative fonctionnelles dans le monde (allant des petits systèmes photovoltaïques individuels aux grandes « fermes » de turbines éoliennes de trois mégawatts), il y a en revanche peu de nations modernes et industrielles capables d’obtenir actuellement l’essentiel de leur énergie par des sources autres que le pétrole, le charbon et le gaz naturel. La Suède représente à cet égard un bon exemple, car elle tire une grande partie de son énergie du nucléaire et de l’hydroélectrique. Un autre exemple est l’Islande, qui bénéficie de ressources géothermiques exceptionnellement importantes et inexistantes dans la plupart des autres pays. Même pour ces deux nations, la situation est complexe : la construction de l’infrastructure de leurs centrales s’est essentiellement appuyée sur les combustibles fossiles pour ce qui est de l’extraction des minerais et matières premières, pour la transformation des matériaux, pour les transports, pour la fabrication de leurs éléments, pour l’énergie nécessaire à leur construction, etc. Dès lors toute transition réelle hors des combustibles fossiles ne reste que théorie et optimisme inconscient, certainement pas réalité.
Ainsi la conclusion que j’ai tirée d’un examen attentif des énergies alternatives, c’est qu’il est peu probable que les combustibles fossiles conventionnels comme les sources d’énergie alternatives puissent fournir la quantité et la qualité d’énergie nécessaires au maintien de la croissance économique, ni même les niveaux actuels d’activité économique, pour le reste du siècle en cours. [19]
Or, le problème s’étend bien au-delà du pétrole et des autres combustibles fossiles : les ressources mondiales en eau sont mises à contribution au point que des milliards d’êtres humains risquent de bientôt se retrouver avec seulement un accès précaire à l’eau potable et pour l’irrigation. La biodiversité décline rapidement. À cause de l’érosion, nous perdons 24 milliards de tonnes de terre cultivable chaque année. Par ailleurs, de nombreux minerais économiquement significatifs, de l’antimoine au zinc, sont en voie d’épuisement rapide, nécessitant l’extraction de minerais de qualité moindre dans des zones toujours plus reculées. Aussi la crise du pic pétrolier n’est-elle que le côté tranchant d’un dilemme de pic général plus large.
De manière générale, l’humanité est confrontée à un péril entièrement prévisible : notre population s’est prodigieusement accrue au cours des 200 dernières années (passant de moins d’un milliard d’individus à près de sept milliards), tandis que notre consommation de ressources par individu a également augmenté. Pour de nombreuses espèces, c’est pratiquement la définition du succès biologique. Pourtant, tout cela s’est déroulé dans le contexte d’une planète limitée et dotée d’une quantité déterminée de ressources non renouvelables (combustibles fossiles et minerais), d’une capacité limitée à générer des ressources renouvelables et à absorber les déchets industriels (dont le dioxyde de carbone). Si nous prenons un peu de recul et observons la période industrielle dans une perspective historique large et en ayant conscience des limites écologiques, il est difficile de passer outre la conclusion que nous vivons aujourd’hui la fin d’une parenthèse relativement brève : une phase d’expansion rapide de 200 ans rendue possible par une manne énergétique temporaire (sous forme de combustibles fossiles très bon marché) et qui sera inéluctablement suivie d’un repli encore plus rapide et dramatique avec l’épuisement de ces combustibles.
La survenue de cet élan croissance-contraction ne signifie pas nécessairement la fin du monde, mais cela implique effectivement la fin d’une certaine forme d’économie. D’une façon ou d’une autre, l’humanité doit revenir à un mode plus normal d’existence se caractérisant par son appui sur l’afflux solaire immédiat (par les cultures, le vent ou la conversion directe du rayonnement solaire en électricité) plutôt que sur une ancienne énergie solaire stockée.
Il ne s’agit pas d’affirmer que le reste du XXIe siècle doive consister en un effondrement de l’industrie, une disparition de l’essentiel de la population humaine et un retour des survivants à un mode de vie pratiquement identique à celui des paysans du XVIe siècle ou des chasseurs-cueilleurs primitifs. Il est possible en revanche d’imaginer des façons acceptables et même attirantes pour l’humanité de s’adapter aux limites écologiques tout en développant plus encore sa richesse culturelle, sa compréhension scientifique et sa qualité de vie (voir ci-dessous).
Mais peu importe comment elle est amenée, la transition sera synonyme de fin de la croissance économique au sens conventionnel. Et il semble que cette transition ait démarré.
Comment savoir quel diagnostic est le bon ?
Si le patient est un être individuel et que la cause du trouble est incertaine, de nouveaux examens de diagnostic peuvent être prescrits. Mais à quelles sortes de tests sanguins, rayons X et scanner pouvons-nous soumettre l’économie nationale ou mondiale ?
D’une certaine façon, ces examens ont déjà été menés. Durant les quelques décennies passées, des milliers d’enquêtes scientifiques ayant pour objet les ressources naturelles, la biodiversité et les écosystèmes ont montré des taux d’épuisement et de déclin croissants. [20] L’augmentation continue de la population, de la pollution et de la consommation est également bien documentée. Cette somme d’informations constituait la base de l’étude Les Limites de la croissance mentionnée plus haut, qui a recours à un modèle informatique pour montrer comment les tendances actuelles se préciseront probablement, et la plupart des scénarios obtenus indiquent qu’elles conduiront à la fin de la croissance économique et à un effondrement de la production industrielle, à un moment ou à un autre, au cours du début du XXIe siècle.
Pourquoi les résultats de ces tests de diagnostic ne sont-ils pas universellement acceptés comme remettant en question le principe de croissance continue ? Premièrement parce que leurs conclusions vont à l’encontre des croyances et affirmations de la plupart des économistes, qui maintiennent qu’il n’existe pas de limites pratiques à la croissance. Ils récusent le fait que les contraintes en termes de ressources constituent au bout du compte un plafond à la production et à la consommation. Aussi leurs efforts diagnostics tendent-ils à ignorer les facteurs environnementaux en faveur des aspects internes et facilement mesurables de l’économie humaine comme la circulation de l’argent, la confiance des consommateurs, les taux d’intérêt et les indices de prix.
L’écologiste Charles Hall, parmi d’autres, a argumenté que la discipline de l’économie, telle qu’elle est aujourd’hui pratiquée, ne constitue pas une science car elle fonctionne principalement sur la base de la logique corrélative, plutôt que par l’élaboration de la connaissance au moyen d’un procédé continu et rigoureux de proposition et de test d’hypothèses. [21] Si l’économie a recours à une terminologie et à des mathématiques complexes, comme le fait la science, ses affirmations basiques quant au monde, telles que le principe de la substitutionnabilité infinie, qui considère que pour toute ressource se faisant rare, le marché trouvera un substitut, ne font en revanche pas l’objet d’un examen expérimental rigoureux. (Il est intéressant de noter à ce propos que Hall et ses associés ont fait l’effort de poser les fondations conceptuelles d’une nouvelle discipline économique basée sur les méthodes et principes scientifiques, qu’ils prénomment « économie biophysique ». [22]
De surcroît, les économistes classiques ont globalement échoué à prévoir le crash actuel. Nous n’avons pas vu d’effort consistant ou concerté de la part du secrétaire au Trésor, des directeurs de la Réserve Fédérale ou des économistes titulaires du prix « Nobel » pour avertir les milieux décisionnaires ou le grand public que, à un moment donné au début du XXIe siècle, l’économie mondiale commencerait à vaciller. [23] On serait tenté de penser que cet échec de pronostic, à savoir l’incapacité à entrevoir un événement aussi significatif historiquement que le repli rapide de presque toute l’économie mondiale et impliquant la déroute de banques et d’industries parmi les plus importants au monde, les aurait incités à s’arrêter un moment et remettre en question leurs hypothèses de base. Pourtant peu de choses donnent à penser que cela est le cas.
Au risque de me répéter, j’insisterai sur ce point : les scientifiques concrets dans différentes disciplines ont effectivement prévu la fin de la croissance économique pour le début du XXIe siècle, et ont averti les preneurs de décisions ainsi que le grand public en de nombreuses occasions.
Qui devrions-nous croire ?
Dans le détail, le diagnostic alternatif est modulable. Si l’activité économique rebondissait au-delà de son niveau de 2007, ou si la production de pétrole s’élevait au-dessus de son plafond de juillet 2008, alors l’explication de la crise économique actuelle par les limites de la croissance liées aux ressources pourrait être considérée comme en partie infirmée. Néanmoins, même si cela devait se produire, le raisonnement sous-jacent au diagnostic alternatif tiendrait peut-être toujours debout. Si le pic de production mondial était retardé jusqu’en, disons, 2015 ou 2020, et si un autre crash économique, cette fois sans fond, s’en suivait, alors le résultat final serait essentiellement identique. En revanche si pendant ce temps le diagnostic alternatif était pris au sérieux et mis en application, les conséquences en seraient bénéfiques : une décennie aura été consacrée à la préparation à cet événement.
Le diagnostic alternatif pourrait-il être erroné dans son ensemble ? C’est-à-dire, le jugement des économistes conventionnels serait-il fondé lorsqu’ils estiment que la croissance peut se poursuivre indéfiniment ? On répète souvent que tout est possible, or certaines choses sont davantage possibles que d’autres. La croissance perpétuelle de la population humaine et de la consommation dans le cadre d’une planète limitée semble en effet être une idée assez exagérée, en particulier du fait que les signes d’avertissement sont partout et nous montrent clairement que nous atteignons déjà, et outrepassons même, les limites écologiques. [24]
Ce qu’il ne faut pas faire : prescrire des placebos au coût pernicieusement prohibitif
Si les scientifiques du concret avertissant des limites de la croissance ont raison, alors faire face au déclin économique global implique bien plus que simplement remettre sur pied les banques et organismes de prêt immobilier. En effet, dans ce cas nous sommes confrontés à un changement fondamental de notre économie aussi significatif que l’avènement de la révolution industrielle. Nous sommes à un point d’inflexion historique, à savoir la fin de dizaines d’années d’expansion et le début d’une période de contraction inévitable qui se prolongera jusqu’à ce que l’humanité vive de nouveau dans le respect des limites des systèmes régénératifs de la Terre.
Mais nous ne voyons guère de signes indiquant que les preneurs de décisions y comprennent quoi que ce soit. Leur raisonnement semble principalement calqué sur les certitudes des économistes dans le vent, selon lesquelles la croissance peut et doit continuer dans un avenir indéterminé, et que le repli économique dont souffre actuellement le monde n’est que temporaire : un problème qui peut et doit être résolu.
Ceci étant dit, il ne s’agit pas d’un problème mineur aux yeux des économistes et dirigeants. En témoigne l’ampleur considérable des plans de sauvetage du Trésor et de la Réserve Fédérale ayant été mis en œuvre dans une tentative possiblement futile de mettre fin à la contraction et relancer la croissance. Selon le commissaire général spécial du gouvernement états-unien en charge du Troubled Asset Relief Program (TARP, plan de soutien du gouvernement américain au secteur financier), dans ses remarques soumises au Comité parlementaire pour la supervision et la réforme gouvernementale le 21 juillet, 23,7 trillions de dollars (NDT. 23 700 milliards de dollars) ont été déboursés dans le cadre du « soutien potentiel total du gouvernement fédéral ». Il s’agit effectivement bien d’un remède onéreux. Ne serait-ce que commencer à saisir l’énormité de ce chiffre nécessite déjà un moment de réflexion. Cela représente environ la moitié du PIB mondial annuel, et plus de trois fois la somme déboursée par le gouvernement états-unien, en dollars ajustés à l’inflation, pour l’ensemble des guerres de 1776 à aujourd’hui. C’est presque 50 fois le coût du New Deal.
D’autres nations, dont le Royaume-Uni, la Chine et l’Allemagne se sont engagées à financer des plans de soutien et de sauvetage qui, bien que nettement moins importants en termes absolus, représentent une part impressionnante (devrions-nous dire effrayante ?) du PIB national.
Si le diagnostic alternatif est valable, rien de tout cela ne fonctionnera au bout du compte, car les institutions financières existantes, avec leur socle de dette et intérêts et leur besoin d’expansion permanente, ne peuvent être rendues opérationnelles dans un contexte de plafond effectif imposé par les contraintes d’énergie et de ressources à la production industrielle et au transport.
Les plans de sauvetage et de soutien fonctionnent-ils ? Beaucoup d’éléments suggèrent que ce n’est pas le cas, sauf dans des proportions limitées. Aux États-Unis, le chômage continue de croître, tandis que la chute des valeurs immobilières se poursuit. Et la plupart des « nouveaux bourgeons » repérés dans l’économie jusqu’à présent ne représentent qu’une baisse contestable du rythme de contraction. Par exemple, l’index des prix de l’immobilier publié le 28 juillet de cette année montrait qu’en mai les prix ajustés à la saison ont chuté de seulement 0,16 % par rapport au mois précédent. Cela équivaut à un taux de déclin annuel d’un peu moins de 2 %, représentant une amélioration significative au regard du taux annuel de plus de 20 % qui prévalait de septembre 2008 à mars 2009. De nombreux observateurs se sont emparés de cette nouvelle pour annoncer un rebondissement imminent. Pourtant les ventes de nouveaux logements sont en baisse : de 1,4 million par an en 2005 à 350 000 par an aujourd’hui, et le prix des logements est 50 % au-dessous de leur niveau observé au plus haut de la bulle, cette baisse se poursuivant dans la plupart des zones. De plus, la production industrielle chute toujours, les petites entreprises souffrent et des signes de danger sont toujours visibles à l’horizon, parmi eux une nouvelle vague d’hypothèques, une plongée probable des valeurs immobilières et la réalité émergente que nous devons toujours nous occuper des titres financiers pourris qui sont au centre de la crise bancaire. [25]
Le président Obama a avancé l’argument selon lequel les renflouements sont justifiés afin de stabiliser le système assez longtemps pour que les dirigeants opèrent des changements fondamentaux dans les institutions et les règlementations, permettant à l’économie de repartir de l’avant plus saine et immune à de futures crises similaires. Mais pas grand-chose ne suggère que le genre de transformations systémiques véritablement nécessaires (celles qui seraient capables de faire fonctionner l’économie durant une période de repli prolongée) est en préparation ni même envisagé. Parallèlement, tandis que les institutions dépendantes de la croissance sont temporairement regonflées, l’ampleur finale des dégâts risque bien de ne faire que s’étendre : lorsque l’effondrement inévitable de ces institutions se produira effectivement, les conséquences seront vraisemblablement pires, tant la somme de capitaux dilapidée afin de tenter de les sauver aura été importante.
En épuisant les ressources non renouvelables comme les métaux, les minerais et les combustibles fossiles, nous avons volé le bien des générations futures. En réalité, désormais nous volons à ces générations les moyens financiers qui auraient pu être déployés afin d’ériger un pont vers une économie soutenable. La construction d’une infrastructure de production d’énergie renouvelable (non seulement une capacité de génération, mais également de distribution et de stockage, ainsi que des solutions agricoles et de transport pour l’après pétrole) nécessitera des investissements énormes et des décennies de labeur. D’où proviendra le capital à investir si les gouvernements sont déjà noyés dans les dettes ? Si nous avons dépensé près de 24 000 milliards de dollars pour remettre sur pieds une vieille économie dépourvue de perspectives de survie, que nous reste-t-il pour financer la nouvelle ?
Si la prescription actuelle destinée à soigner notre maladie économique se fourvoie, il en va de même pour beaucoup de remèdes proposés en vue de régler nos problèmes d’énergie. Selon le diagnostic conventionnel, le niveau élevé du prix actuel du brut est à mettre au compte de la spéculation ; la solution devrait donc consister en une règlementation plus stricte des marchés pétroliers à terme (ce qui est peut-être une bonne idée, même si cela ne touche pas le cœur du problème), tout en permettant davantage aux compagnies pétrolières de prospecter le pétrole domestique (bien que les taux probables de production des champs pour le moment interdits d’accès soient relativement maigres, et auraient un effet négligeable sur les cours du pétrole). Pourtant, en réalité les investissements supplémentaires dans des systèmes de production de combustibles fossiles (dont la technologie du « charbon propre ») engendreront des retours déclinants, sachant que les ressources de meilleure qualité ont déjà été exploitées ; et simultanément cela détourne des capitaux qui pourraient autrement être investis dans l’énergie renouvelable sur laquelle nous devrons nous appuyer de manière croissante à mesure que les combustibles fossiles déclineront. [26]
Ce qui est nécessaire, mais pour le moment totalement inexistant, c’est une reconnaissance fondamentale du fait que les circonstances ont changé : ce qui fonctionnait durant les décennies passées ne saurait s’appliquer à l’avenir.
Ce qu’il faut faire : s’adapter à la nouvelle réalité
Si le diagnostic alternatif est correct, il n’y aura pas de solution simple à l’effondrement économique actuel. Certaines maladies ne sont pas guérissables et nécessitent simplement que nous nous y adaptions et que nous tirions le meilleur de notre nouvelle situation.
Si l’humanité s’est effectivement embarquée dans la phase de contraction du mouvement industriel, nous devrions accepter le fait de trouver devant nous des niveaux de revenus bien moindres (pour pratiquement tout le monde dans les pays riches, et pour les hauts salaires des pays plus pauvres), des possibilités de carrière différentes (moins d’emploi dans la vente, le marketing et la finance ; davantage dans la production basique), une énergie, des transports et de la nourriture plus chers. De plus, nous devrions accepter le fait que les aspects clés de notre système économique inextricablement liés à un besoin de croissance future cesseront d’être fonctionnels dans ce nouveau contexte.
Plutôt que de tenter de renflouer les banques et compagnies d’assurances à coup de trillions de dollars, il serait peut-être mieux de les laisser simplement couler, peu importe les conséquences néfastes à court terme, car elles couleront de toute façon à un moment ou à un autre. Plus tôt elles seront remplacées par des institutions remplissant des fonctions essentielles dans une économie en repli, mieux tout le monde se portera.
Pendant ce temps les leaders d’opinion dans la société, et en particulier le président, doivent commencer à faire circuler l’information, de façon compréhensible et mesurée, selon laquelle la croissance ne reviendra pas et le monde est entré dans une phase économique nouvelle et sans précédent, mais que nous pouvons tous survivre et prospérer dans cette période transitoire pleine de défis si nous nous y appliquons et travaillons ensemble. Au cœur de cette rééducation générale doit figurer la reconnaissance publique et institutionnelle de trois règles fondamentales de la soutenabilité : la croissance démographique n’est pas soutenable ; l’extraction actuelle des ressources non renouvelables ne l’est pas davantage et l’utilisation des ressources renouvelables ne le sera que si elle est faite à un rythme inférieur à celui de leur régénération naturelle.
Sans énergie bon marché, les échanges commerciaux mondiaux ne peuvent s’accroître. Cela ne signifie pas la fin du commerce, mais seulement que les avantages économiques se déplaceront, à mesure que le coût des transports augmentera, vers la production et la consommation locales. Or c’est peut-être là une manière trop enjolivée de présenter les choses : si et quand les pénuries de combustible surviennent, les systèmes d’approvisionnement fragiles et étirés de par le globe pourraient s’interrompre, entraînant de graves conséquences pour les consommateurs se retrouvant coupés de sources de biens essentiels. Aussi devrait-on accorder une nette priorité à l’organisation de la résilience collective en privilégiant les sources d’approvisionnement locales et l’entretien de stocks régionaux plus importants, particulièrement en nourriture et combustibles. [27]
Il faut actuellement en moyenne 8,5 calories d’énergie provenant du pétrole et du gaz pour produire chaque calorie alimentaire. Sans combustibles bon marché pour l’agriculture, la production alimentaire plongera et les agriculteurs feront faillite, à moins que des efforts proactifs soient entrepris afin de réformer le système et réduire sa dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles. [28]
Manifestement, les sources d’énergie alternatives et les stratégies améliorant l’efficacité doivent être au centre des priorités, et doivent faire l’objet de recherches intensives à l’aide d’une panoplie de critères soigneusement sélectionnés. Les meilleurs candidats devront être solidement financés, et même pendant que les combustibles fossiles sont toujours relativement peu onéreux : le temps de déploiement des infrastructures de production d’énergie renouvelable se mesurera inévitablement en décennies et nous devons donc lancer le processus dès maintenant, plutôt que d’attendre que le marché montre la voie.
Face aux crises du crédit et (potentiellement) de la monnaie, de nouveaux modes de financement de tels projets seront exigés. Sachant que nos systèmes monétaire et financier actuels sont basés sur un besoin de croissance, il nous faudra inventer de nouveaux moyens de créer et prêter de l’argent. D’importants efforts de réflexion visant à trouver des solutions en ce sens sont mis en œuvre, et certaines collectivités expérimentent déjà des coopératives à capital local, des monnaies alternatives et des banques sans intérêt. [29]
Le pétrole devenant de plus en plus cher en termes réels, nous devrons imaginer des moyens plus efficaces pour transporter les personnes et les biens. Notre première priorité à cet égard doit être de réduire le besoin en transports par une meilleure urbanisation et des systèmes de production relocalisés. Mais là où le transport est nécessaire, le rail lourd et léger sera probablement préférable aux automobiles et camions. [30]
Nous aurons également besoin d’une révolution dans les constructions pour minimiser le besoin en chauffage, en climatisation et en éclairage artificiel dans toutes nos habitations et bâtiments publics. Cette révolution est déjà lancée, mais progresse actuellement beaucoup trop lentement en raison de l’inertie des intérêts établis dans le secteur du bâtiment. [31].
Ces projets nécessiteront davantage que des crédits locaux et des fonds ; ils feront en outre appel à des travailleurs qualifiés. Cela fera non seulement naître une demande en installateurs de panneaux solaires et d’isolation de bâtiments, mais des millions de nouveaux producteurs agricoles et bâtisseurs d’infrastructures à faible coût énergétique seront également mis à contribution. Toute une gamme de nouvelles carrières pourraient émerger et remplacer les emplois du marketing et de la finance en voie de disparition, pour peu que des formations abordables soient proposées dans les établissements d’enseignement locaux.
Il est intéressant de noter que les 23,7 trillions de dollars récemment consacrés aux sauvetages et garanties de remboursement aux États-Unis représentent presque 80 000 dollars pour chaque homme, femme et enfant du pays. Un niveau d’investissement s’élevant à ne serait-ce qu’une fraction conséquente de cela pourrait financer toutes les formations nécessaires, tout en assurant un approvisionnement universel en biens de consommation essentiels durant la transition. Qu’obtiendrions-nous pour notre argent ? Une notion collective que, en temps de crise, personne n’est laissé au bord de la route. Sans le sentiment d’engagement coopératif qu’un tel filet de sécurité aiderait à susciter, un peu comme ce qui fut réalisé avec le New Deal mais à une échelle plus vaste, la contraction économique pourrait se muer en une horrible bataille pour les miettes de la période industrielle agonisante.
Aussi controversée qu’elle puisse être, la question de la démographie doit être prise en considération. Tous les problèmes liés aux ressources sont plus difficiles à résoudre lorsqu’il y a davantage d’individus nécessitant ces ressources. Les États-Unis doivent encourager les familles plus petites et mettre en place une politique d’immigration cohérente en vue d’une croissance démographique zéro. Ce qui n’est pas sans implications en termes de politique étrangère : nous devons aider les autres nations à réaliser leur propre transition économique de façon à ce que leurs citoyens n’aient pas besoin d’émigrer pour survivre. [32]
Si la croissance économique cesse d’être un objectif réalisable, la société devra trouver de meilleures façons de mesurer le succès. Les économistes doivent arrêter de mesurer le bien-être à l’aide de l’outil contondant qu’est le PIB, et commencer à s’intéresser davantage aux indices de capital humain et social dans des domaines comme l’éducation, la santé et la culture. Cette redéfinition de la croissance et du progrès s’est déjà amorcée dans certains secteurs, mais pour l’essentiel elle demande toujours à être mise en œuvre par les gouvernements. [33]
On peut d’ailleurs avancer l’argument selon lequel, quand tout cela aura été mis en place, il en résultera un mode de vie plus gratifiant pour la majorité des citoyens : un sens collectif plus accru, une meilleure connexion avec le monde naturel, un travail plus satisfaisant et un environnement plus sain. Des études ont montré à plusieurs reprises que des niveaux de consommation plus importants ne se traduisent pas nécessairement en niveaux de bien-être vital plus élevés [34]. Cela signifie que si l’on peut envisager le « progrès » en termes de bonheur et bien-être, plutôt que comme un processus toujours plus rapide d’extraction de matières premières, leur transformation en produits qui eux-mêmes deviennent rapidement des déchets, alors le progrès peut certainement perdurer. Dans tous les cas, « vendre » ce projet ambitieux et inédit au grand public implique d’en souligner les bénéfices. Plusieurs organisations explorent d’ores et déjà les possibilités de message et de communication autour de la transition. [35] Mais les décideurs doivent comprendre que regarder le bon aspect des choses ne signifie pas promettre ce qui ne peut être réalisé, comme le retour à une époque de croissance prolongée et de consommation écervelée.
Le pouvons-nous ? Le ferons-nous ?
Il est important de préciser les implications de tout cela aussi clairement que possible. Si le diagnostic alternatif est correct, il n’y aura pas de « reprise » économique complète, pas cette année, la prochaine, ni dans cinq ou dix ans. On pourrait assister à des rebonds temporaires nous ramenant à une fraction du pic d’activité économique, mais il ne s’agira que de brefs moments de répit.
Nous sommes entrés dans une nouvelle ère économique au cours de laquelle les anciennes règles ne s’appliquent plus. Les taux d’intérêts bas et les dépenses gouvernementales ne se traduisent plus en stimulation de l’emprunt et créations d’emplois. L’énergie bon marché n’apparaîtra pas simplement parce qu’il existe une demande. Dans la plupart des cas, nous ne trouverons tout simplement pas de substituts aux ressources essentielles. Globalement, l’économie continuera de se rétracter dans des crises et tressaillements jusqu’à ce qu’elle puisse être maintenue à niveau par l’énergie et les ressources matérielles que la Terre peut fournir de façon continue.
Bien entendu tout cela constitue une nouvelle très pénible à entendre. On peut le comparer à votre médecin vous annonçant que vous avez contracté une maladie systémique et potentiellement fatale ne pouvant être guérie, mais seulement traitée par un remède d’appoint ; ce remède consistant à opérer des changements profonds dans votre mode de vie.
Certains lecteurs ne manqueront pas de faire remarquer que le changement climatique n’occupe pas une place proéminente dans cette discussion. Il s’agit, après tout, de la plus grave catastrophe environnementale de l’histoire de l’humanité. En effet, ses conséquences pourraient être bien plus sérieuses que la simple destruction des économies nationales : des centaines de millions d’êtres humains et des millions d’autres espèces pourraient être mis en péril. La raison pour laquelle j’ai choisi de limiter ici mon évocation du changement climatique est (en considérant que le diagnostic alternatif soit correct) que ce n’est pas ce phénomène qui s’est avéré être l’obstacle le plus immédiat à la croissance économique, mais bien l’épuisement des ressources. Néanmoins, si ce point ne fait pas encore l’unanimité, le changement climatique en lui-même et les mesures requises pour le minimiser représentent dans l’ensemble des limites pour la croissance, tout comme l’épuisement des ressources. De plus, si nous échouons à encadrer efficacement le repli économique qui caractérisera les décennies à venir, il ne subsistera pas d’espoir de mise en place d’une réponse organisée et cohérente au changement climatique, une réponse se matérialisant par des efforts tant pour réduire l’impact du climat que pour s’y adapter. Il est important de souligner, cependant, que les mesures défendues ici (dont le développement de sources d’énergie renouvelables et d’une meilleure efficacité énergétique, une diminution rapide de la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles dans les transports et l’agriculture, et la stabilisation des niveaux démographiques) figurent parmi les mesures susceptibles de contribuer à la réduction des émissions de carbone.
Est-il possible que cet essai influence la réflexion et les actions des dirigeants ? Malheureusement, c’est peu probable. Leur croyance en la possibilité et la nécessité d’une croissance continue est pernicieuse, et la notion selon laquelle la croissance n’est peut-être plus possible est à leurs yeux impensable. Mais le diagnostic alternatif doit figurer dans les registres. Cet essai, rédigé par un simple journaliste, représente à bien des égards la réflexion de milliers de scientifiques concrets ayant travaillé depuis des décennies sur des problèmes liés à la démographie, aux ressources, à la pollution et à la biodiversité. Ignorer le diagnostic en lui-même, tel qu’articulé ici ou développé dans des dizaines de milliers d’articles scientifiques, pourrait nous faire passer à côté de notre dernière chance d’éviter un effondrement total, non seulement de l’économie, mais également de la civilité et de l’existence humaine organisée. Cela pourrait nous exposer à un risque de discontinuité historique trouvant ses antécédents qualitatifs dans l’effondrement des civilisations romaine et maya. [36] Or il n’existe pas de véritable précédent pour ce qui vraisemblablement nous attend, car ces exemples anciens d’effondrement affectaient des sociétés géographiquement délimitées dont l’influence sur leur environnement était tout aussi limitée. La civilisation actuelle est globale, et son destin, celui de la Terre et de l’humanité, sont inextricablement liés.
Cependant même si les dirigeants continuent d’ignorer de tels avertissements, les individus et collectivités peuvent en tirer des leçons et entamer le processus d’élaboration de résilience, de détachement de la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles et des institutions enchaînées à la machine de croissance perpétuelle. Nous ne pouvons nous permettre de rester spectateurs alors que les dirigeants mondiaux gâchent les occasions nous permettant de prendre conscience et de nous adapter aux limites de la croissance. Nous pouvons initier des changements dans nos vies, et nous pouvons nous serrer les coudes avec nos voisins. Et nous pouvons faire comprendre à nos milieux décisionnaires que nous désapprouvons leur allégeance au statu quo, mais qu’en revanche il existe d’autres options.
Est-il trop tard pour entamer une transition contrôlée vers une société post-énergies fossiles ? Peut-être. Mais nous ne le saurons pas si nous n’essayons pas. Et si nous sommes amenés à fournir cet effort, nous devons commencer par admettre une réalité simple et crue : la croissance telle que nous l’avons connue ne peut plus faire partie de nos objectifs.
[1] “Pain on the Road to Recovery”, par Kevin Rudd, The Sydney Morning Herald, 25 juillet 2009.
[2] Voici, par exemple, quelques extraits pertinents de mon livre La fête est finie ! Avenir des sociétés industrielles après le pic pétrolier (Éditions Demi-Lune, collection Résistances, 2008. Première édition en langue anglaise en 2003 chez New Society Publishers, révisée en 2005.) : « Notre système financier actuel fut élaboré durant une période de hausse soutenue de la quantité d’énergie disponible, ses concepteurs étant persuadés du fait qu’une croissance économique durable était à la fois inévitable et souhaitable. Cette idéologie de la croissance s’est incarnée dans des structures financières systémiques pour la survie desquelles la croissance est nécessaire.[...]Jusqu’à présent ce lien indirect, entre un système financier reposant sur la hausse perpétuelle de l’afflux de liquidités d’une part, et d’autre part une économie se développant année après année grâce à l’augmentation de l’énergie et des autres ressources disponibles, s’est relativement bien maintenu à l’exception de quelques exemples notoires comme la Grande Dépression.[...]Cependant,[lorsque la production pétrolière mondiale plafonnera] le système financier ne réagira pas nécessairement de façon rationnelle.[...]Cela pourrait logiquement déclencher une crise financière[...] »
[3] Voir Albert Bartlett : Arithmetic, Population and Energy (transcription de présentation).
[4] Donella H. Meadows, Dennis L. Meadows, Jorgen Randers et William W. Behrens III, Limits to Growth (New York : Universe Books, 1972) – Version française : Halte à la croissance ? Rapport sur les limites de la croissance (éd. Fayard, 1973 - enrichi d’une Enquête sur le Club de Rome par la traductrice de l’ouvrage Jeanine Delaunay) ; Donella H. Meadows, Dennis L. Meadows et Jorgen Randers, Beyond the Limits (Post Mills, VT : Chelsea Green, 1992. Non traduit en français.) ; Donella H. Meadows, Dennis L. Meadows et Jorgen Randers, Limits to Growth : The 30 Year Update (White River Junction, VT : Chelsea Green, 2003. Non traduit.). Voir également la récente étude du CSIRO, A Comparison of the Limits to Growth with Thirty Years of Reality (2009, non traduit.) (http://www.csiro.au/files/files/plje.pdf).
[5] Voir par exemple Robert U. Ayres et Benjamin Warr : The Economic Growth Engine : How Energy and Work Drive Material Prosperity (Cambridge, UK : Edward Elgar Publishing, 2005. Non traduit.) ; Robert Barro et Xavier Sala-i-Martin, Economic Growth (Cambridge, MA : MIT Press, 2003. Non traduit.) (http://www.bookrags.com/research/ec...).
[6] Voir La fête est finie ! Avenir des sociétés industrielles après le pic pétrolier (Par Richard Heinberg, Éditions Demi-Lune, collection Résistances, 2008.) ; Powerdown : Options and Actions for a PostCarbon World (2004, non traduit) ; et The Oil Depletion Protocol : A Plan to Avert Oil Wars, Terrorism, and Economic Collapse (2006, non traduit) ; ainsi que les livres de Kenneth Deffeyes, Colin Campbell et Matthew Simmons, les sites Internet www.oleocene.org et www.picpetrolier.net. L’association pour l’étude des pics pétrolier et gazier (ASPO) organise des conférences internationales pour étudier les problèmes liés à la déplétion (raréfaction) du pétrole et du gaz naturel (www.peakoil.net et www.aspofrance.org), la section française de l’ASPO publie des bulletins http://aspofrance.org/news/bulletin... et celle des USA publie chaque semaine un recensement des informations importantes à ce sujet, le Peak Oil Review, compilé par l’ancien analyste de la CIA Tom Whipple. Lors de la conférence annuelle de l’ASPO à Cork, Irlande, en septembre 2007, l’ancien secrétaire états-unien à l’énergie James Schlesinger, déclarait : « D’un point de vue conceptuel, la bataille est finie. Les piquistes ont gagné. Nous sommes dorénavant tous des piquistes. » Voir également Warning : Oil supplies are running out fast, par Steve Connor, The Independent, 3 août 2009 (http://www.independent.co.uk/news/s...).
[7] Le taux de déclin des découvertes de nouveaux champs pétroliers et la liste des pays ayant dépassé leur pic de production sont largement documentés ; par exemple : The Future of Global Oil Production : Facts, Figures, Trends and Projections by Region par Roger D. Blanchard (Jefferson, NC : McFarlane and Co., 2005). Non traduit.
[8] Un rapport du 4 mai 2009 rédigé par Raymond James Associates (Stat of the Week) avance que la production mondiale de pétrole a culminé en juillet 2008 (http://blogs.wsj.com/environmentalc...). Dans une interview donnée ultérieurement l’auteur du rapport, Marshall Adkins, suggère que la plupart des acteurs importants de l’industrie pétrolière acceptent dorénavant la thèse du pic pétrolier sous une forme ou une autre, bien qu’ils ne le reconnaissent pas forcément publiquement.
[9] Brookings Papers on Economic Activity, mars 2009.
[10] Voir Driven to the Brink : How the Gas Price Spike Popped the Housing Bubble and Devalued the Suburbs, par Joe Cortright, article de discussion, CEOs for Cities, 2008.
[11] NDT. Government Accountability Office, organisme d’audit, d’évaluation et d’investigation du Congrès des États-Unis, chargé du contrôle des comptes publics.
[12] U.S. Government Accountability Office, Commercial Aviation : Airline Industry Contraction Due to Volatile Fuel Prices and Falling Demand Affects Airports, Passengers, and Federal Government Revenues, 21 avril 2009. Pour une étude détaillée du probable impact futur des cours pétroliers élevés et des pénuries pétrolières sur le secteur aérien, voir The Oil Price Spike of 2008 : The Result of Speculation or an Early Indicator of a Major and Growing Future Challenge to the Airline Industry ?, par Charles Schlumberger, Annals of Air and Space Law, Vol. XXXIV, [2009], Université McGill.
[13] American Trucking Association.
[14] Voir, par exemple, Troubling Signs That Oil Prices Could Hamper Recovery(D’inquiétants signes montrant que les cours pétroliers pourraient décimer la reprise), Wall Street 24/7, May 8, 2009 (http://247wallst.com/2009/05/08/tro...)
[15] Voir, par exemple : Low Oil Prices, Credit Woes Could Spell Trouble for UK North Sea (Des cours pétroliers bas et des soucis de crédit pourraient causer d’importants problèmes aux exploitations britanniques de la Mer du Nord) par James Herron, Rigzone, 14 novembre 2008.
[16] Big Oil Projects Put in Jeopardy by Fall in Prices(D’importants projets pétroliers sont compromis en raison de la chute des cours), par Jad Mouawad, New York Times, 15 décembre 2008.
[17] Voir Low oil prices take wind out of renewable fuels, par David R. Baker, San Francisco Chronicle, 27 octobre 2008.
[18] Voir La fête est finie ! (Editions Demi-Lune, 2008.), chapitre 4 ; Powerdown (non traduit), chapitre 4 ; The Oil Depletion Protocol (non traduit), pages 23-31. Une discussion plus étendue sur ce thème, provisoirement intitulée Energy Limits to Growth (Les limites énergétiques de la croissance), sera publiée par l’International Forum on Globalization et le Post Carbon Institute en septembre.
[19] Cette conclusion trouve un écho, par exemple, chez Ted Trainer, Renewable Energy Cannot Sustain a Consumer Society (Dordrecht, Pays-Bas : Springer, 2007) ; et (avec certaines réserves), chez David J. C. McKay, Sustainable Energy Without the Hot Air (Cambridge, Royaume-Uni : UIK Cambridge, 2008).
[20] Juste un exemple provenant d’une coupure de presse du 20 avril 1998 décrivant les résultats d’un sondage diligenté par le Musée états-unien d’histoire naturelle : « Le Muséum états-unien d’histoire naturelle a aujourd’hui annoncé les résultats d’une enquête nationale intitulée "La biodiversité du prochain millénaire, réalisée par le Muséum en collaboration avec Louis Harris et associés, Inc. Cette enquête révèle que 7 biologistes sur 10 considèrent que nous sommes au cœur d’une extinction de masse des êtres vivants, et que cette perte d’espèces représentera une grave menace pour l’existence des êtres humains au siècle prochain. »
[21] Charles A.S. Hall et Kent A. Klitgaard, International Journal of Transdisciplinary Research, Vol. 1, No. 1 (2006) The Need for a New, Biophysical-Based Paradigm in Economics for the Second Half of the Age of Oil,, Charles A. S. Hall, D. Lindenberger, R. Kummell, T. Kroeger et W. Eichorn, The Need to Reintegrate the Natural Sciences with Economics. Bioscience 51:663-673, 2001.
[22] Cutler J. Cleveland, Biophysical Economics, The Encyclopedia of Earth. Voir également la discipline apparentée appelée économie écologique, et particulièrement les ouvrages de Herman Daly, dont Toward a Steady State Economy (New York : Freeman, 1973) et, avec Joshua Farley, Ecological Economics : Principles and Applications (Washington : Island Press, 2004).
[23] Les guillemets autour de Nobel sont justifiés par le fait que la famille Nobel n’a jamais reconnu l’économie en tant que science : le soi-disant « prix Nobel d’économie » est en fait remis par une banque suédoise.
[24] Voir The Millennium Ecosystem Assessment.
[25] Voir, par exemple, J.S. Kim, Irrational Exuberance of the Green Shoots, 24 juillet 2009.
[26] Voir Richard Heinberg, Blackout : Coal, Climate and the Last Energy Crisis (Gabriola Island, BC : New Society, 2009. Non traduit.), pages 137-143, 145-168.
[27] Voir Jeff Rubin, Why Your World Is About to Get a Whole Lot Smaller : Oil and the End of Globalization. (New York : Random House, 2009. Non traduit.)
[28] Voir Richard Heinberg et Michael Bomford, The Food and Farming Transition (Sebastopol, CA : Post Carbon Institute, 2009. Non traduit.).
[29] Voir Bernard Lietaer, White Paper on All the Options for Managing a Systemic Bank Crisis. JAK, en Suède, est une banque coopérative et auto-administrée fonctionnant sans intérêts.
[30] Voir Richard Gilbert et Anthony Perl, Transport Revolutions : Moving People and Freight Without Oil (Gabriola Island, BC : New Society, 2009. Non traduit.).
[31] L’institut Passivhaus développe des méthodes de construction réduisant l’utilisation d’énergie pour les bâtiments, souvent à zéro. Près de 20 000 habitations passives ont d’ores et déjà été bâties en Europe, pour seulement environ 12 000 aux États-Unis.
[32] Voir les sites web du Population Media Center, et SUSPS.
[33] L’organisation Redefining Progress (« Redéfinir le progrès ») a développé un indicateur de progrès réel (« Genuine Progress Indicator », GPI) incorporant beaucoup de critères de ce type.
[34] Voir, par exemple, Understanding Human Happiness and Well-Being, The Sustainable Scale Project.
[35] Le mouvement naissant des villes en transition (www.transitiontowns.org/) part du principe que “la vie peut être plus belle sans combustibles fossiles.” YES ! Magazine est une publication du Positive Futures et illustre par l’exemple des modes de vie présentant une faible empreinte carbone en même temps que des avantages personnels et sociaux. Le Simple Living Network fournit quant à lui des “infos, des outils, des exemples et des adresses pour une vie simple, saine et responsable.”
[36] Voir Jared Diamond, Collapse How Societies Choose to Fail or Succeed (New York : Viking, 2005) ; Joseph Tainter, The Collapse of Complex Societies (Cambridge, UK : Cambridge University Press, 1988) ; et John Michael Greer, The Long Descent (Gabriola Island, BC : New Society, 2008).
voltairenet.org - 14.10.09