Dix-huit mois après le lancement d’une vaste grève, les travailleurs sans papiers repartent au combat, soutenus cette fois par 11 syndicats et associations. Ils demandent à nouveau leur régularisation, "régularisation égale pour tous", après avoir constaté "l’arbitraire préfectoral" dans le traitement de leurs dossiers.
Des sans-papiers, souvent intérimaires, qui font "le sale boulot", dans des conditions de sécurité très précaires. Comme en témoignent des images (que nous nous sommes procurées) filmées par quelques-uns d’entre eux sur leur lieu de travail, dans les profondeurs du métro...
Le piquet de grève, avant son évacuation, au dépôt RATP de la rue Championnet à Paris
© RF/Cécile Quéguiner
Pour lancer la "phase II" du mouvement des travailleurs sans-papiers, syndicats et associations ont convié hier symboliquement les journalistes dans un dépôt RATP du 18ème arrondissement de Paris.
Là, un piquet de grève posé depuis le matin même : 23 intérimaires travaillant pour un sous-traitant de la RATP, la société Asten, ont décidé d’établir dans le parking, sous deux tentes, leur campement !
Ce sont ces hommes, venant tous d’Afrique de l’Ouest, qui de nuit défont et refont les quais du métro parisien. "Pendant des heures d’affilée", ils racontent "casser l’asphalte du quai, remonter à la surface des plaques de plus de 50 kg sur leurs épaules ou leur tête, puis redescendre sous terre des seaux de goudron bouillant [1]".
Le tout, "sans pause, sans le casque de rigueur, sans chaussures de sécurité, sans masque... et sans jamais une visite médicale !" Car aucun, dans l’équipe, jurent-ils, n’a de papiers.
Grève des travailleurs sans-papiers : Mody et Anthioumana racontent des conditions de travail d’un autre âge. Ils triment en France, au jour le jour, en toute illégalité, depuis 2002 et 2000. (1'35") | |
Film-témoin au téléphone portable
Ce piquet de grève n’aura pas duré une nuit. Dès hier soir, les grévistes et militants CGT qui les accompagnaient ont été évacués par les CRS.
Mais ils n’entendent pas en rester là ! Prétextant tourner des images souvenirs "pour les envoyer au bled", ils ont filmé leurs conditions de travail "dignes du XIXème siècle".
Résultat : sans équipement adéquat, certains se brûlent. Sans oser, faute de papiers, aller se faire soigner.
Un des sans-papiers exhibe ses brûlures
Des conditions de travail difficiles, sans protection sociale, alors que ces travailleurs cotisent, payent des impôts et peuvent même produire des fiches de salaire, émanant d’agences d’intérim qui les emploient au jour le jour (comme Adecco ou Crit).
C’est toute la chaîne de travail qui est à revoir, selon Hervé Goix, de la CGT 75 (1'24") | |
Dans un communiqué hier, la RATP a déclaré qu’"à sa connaissance, aucun salarié travaillant sur ses sites n’était en situation irrégulière". La RATP qui précise tout de même qu’elle vient de demander des explications à son sous-traitant.
Celui-ci, Asten, joint par téléphone, a la même réponse : c’est impossible, car "les sociétés d’intérim nous attestent formellement de la régularité des employés qu’elles mettent à notre disposition", explique Jean Lamy, responsable des relations extérieures.
Asten, cependant, reconnaît qu’il semble bien s’agir sur les images d’un de ses chantiers. Puisque la société a décroché ce marché à la RATP pour quatre ans et que son chef de chantier admet avoir reconnu des visages d’ouvriers. Dans un communiqué, enfin, Asten précise les conditions de travail particulières dans le métro.
Mais la grève continue
Outre le cas de ces ouvriers en grève, plus de 35 autres sites sont occupés ce mercredi. Soit environ 2.000 sans-papiers grévistes en Ile-de-France, soutenus par plusieurs syndicats (CGT, CFDT, FSU, Solidaires, Unsa) et associations (Cimade, Ligue des Droits de l’homme, RESF, Femmes Égalité, Autremonde, Droits devant).
Ces travailleurs invisibles redeviennent visibles, selon Dominique Guibert, secrétaire général de la Ligue des droits de l’homme (1'11") |
france-info.com - 14.10.09
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