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01/04/2009

Un autre monde frappe à la porte du G 20

Les pays les plus puissants de la planète se retrouvent aujourd’hui à Londres pour tenter de rafistoler le capitalisme alors que les défis aigus qui surgissent dans la crise appellent un dépassement du vieux système.

Comment soigner une économie mondiale malade, contaminée par une crise systémique qui met donc en cause les fondements même du capitalisme moderne ? Les vingt pays les plus puissants de la planète (les membres du G8 et les grands pays émergents, voir encadré) qui s’étaient réunis une première fois à Washington le 15 novembre se retrouvent aujourd’hui à Londres en clamant leur volonté d’avancer des décisions concrètes, coordonnées, pour la relance de l’économie comme pour la régulation financière. En l’espace de six mois l’urgence des défis à relever n’a fait que s’accentuer. Toutes les institutions ont revu successivement leurs prévisions à la baisse et sont désormais d’accord sur une plongée dans la récession à l’échelle planétaire. Pour la zone euro, l’Organisation pour la coopération économique et le développement (OCDE) prévoit désormais - 4,1 % de croissance. Du jamais-vu depuis 1945. Le rythme des charrettes de licenciements s’accélère partout et le flux vital du crédit reste paralysé.

Face à l’ampleur des défis posés, « la cohérence des décisions et la cohésion des Vingt » sont indispensables, souligne-t-on dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, qui a menacé de pratiquer la politique de la chaise vide s’il n’y avait « pas suffisamment de résultats concrets ». D’autres paroles « fortes » ne manquent pas. « Il faut que la planète entière se mobilise pour la relance », affirme-t-on du côté de Washington. « On va inventer des nouvelles règles », clame-t-on à Bruxelles. La rhétorique est inhabituelle. Les dispositions déjà avancées, les idées généralement émises pour affronter les défis posés à l’humanité le sont beaucoup moins. Elles visent toutes à tenter de rafistoler le système (« refonder le capitalisme », plastronne le président français) tout en restant plus soumises que jamais aux critères des marchés financiers, ceux-là même qui sont à l’origine de la débâcle d’aujourd’hui. Barack Obama est arrivé hier soir à Londres avec la volonté d’affirmer « un nouveau leadership » des États-Unis. Pas question de remettre en cause une organisation du monde, fondée, de fait, sur la domination conjointe du roi dollar et de l’US army. Et on saisit là toute la cohérence de la proximité immédiate du sommet du G20 et de celui de l’OTAN qui aura lieu dans la foulée.

Et pourtant ce monde-là se fissure. Les guerres épuisent l’empire. Et la dette phénoménale accumulée par Washington aux crochets du reste de la planète suscite de plus en plus d’inquiétudes. Au point que la Chine, premier détenteur de bons du Trésor US, avance ouvertement l’idée d’une autre monnaie de réserve internationale, fondée sur les droits de tirage spéciaux du FMI. Illustration de la montée en puissance de Pékin, incontournable désormais avec les autres « émergents » dans les réunions au sommet, l’irruption de ce débat souligne aussi combien le besoin d’une véritable monnaie commune mondiale qui ne soit plus le billet vert frappe à la porte (lire notre entretien avec Paul Boccara dans l’Humanité de jeudi).

Et comment, à moins de sombrer dans une bien étrange Obamania, s’extasier de l’exemplarité des plans de relance made in USA ? Le dernier plan de sauvetage des banques du secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, parie sur… la spéculation. Il entend en effet rendre attractifs les millions de titres pourris qui pèsent toujours aussi lourdement sur le bilan des banques US en les subventionnant massivement. Dans l’espoir que des financiers de Wall Street, à l’affût de la bonne affaire, les rachètent à bon compte (lire également dans l’Humanité de ce jeudi notre éclairage sur le contenu du plan Geithner).

Autrement dit : moyennant quelques arrangements à la marge, on reprend les mêmes et on recommence. Alors que tout commanderait au contraire de s’émanciper des marchés spéculatifs pour pouvoir mobiliser enfin le crédit au service de l’emploi et de la formation. Conformément aux attentes qui se manifestent avec de plus en plus de force dans les opinions publiques, parmi les syndicats. Un rapport du Bureau International du travail estime à 50 millions le nombre de chômeurs supplémentaires sur la planète cette année si l’on reste soumis au seul jeu du marché du travail, et appelle à un « pacte mondial pour l’emploi ». Et dans ce contexte les aspirations à la sécurisation des parcours professionnels montent en France comme dans d’autres pays.

La véritable audace face à de tels défis serait d’avancer non pas des mesures de replâtrage du capitalisme mais des remèdes bien plus efficaces car capables d’impulser son dépassement progressif. Il en va ainsi des paradis fiscaux, si consubstantiels du système. Les Vingt ont amorcé une sorte de danse du scalp autour d’eux dans l’espoir de fournir au moins quelques gages à des opinions très remontées. Certains de ces « centres off shore non coopératifs », comme il est convenu de les appeler dans le communiqué final du G20 en préparation, pourraient même être inscrits sur une « liste noire ». Mais quid des autres et que penser de la « levée du secret bancaire » quand celle-ci reste strictement limitée à des individus ou à des sociétés qui font « déjà l’objet d’une enquête » dans leur pays d’origine ? Et quelle mesure mettre en œuvre quand certains hauts lieux du capitalisme financier, comme ici même la City de Londres, portent toutes les caractéristiques des îlots « paradisiaques » les plus suspects. La véritable témérité recommanderait de soigner le mal à la racine en maîtrisant les flux du crédit afin de les orienter vers l’emploi et les dépenses utiles à la communauté humaine, tout en coupant par contre l’alimentation des circuits des « paradis » de la spéculation sur lesquels sont installées les multinationales et les grandes banques.

Les Vingt semblent affectés de la même pusillanimité à l’égard du Fonds monétaire international. Alors qu’une réforme profonde de l’institution serait nécessaire, il n’est que très peu question, pour l’heure, de remettre en cause les conditions d’attribution des aides, de contester les privilèges du dollar ou même cette minorité de blocage dont disposent les États-Unis au sein de l’institution. Bref de revoir tout ce qui fait du FMI un instrument clé de la domination de Wall Street sur l’économie mondiale.

Dominique Strauss Kahn, le président du Fonds, et la plupart des dirigeants du G 20 revendiquent certes un nouveau rôle de supervision pour un FMI doté de davantage de moyens et appelé à devenir une sorte de garant suprême de « la transparence » et du contrôle des « organismes de notation » chargés de l’évaluation des risques financiers.

Mais plusieurs dirigeants membres du G20, dont Barack Obama, ont prévenu : ils n’iront pas plus loin. On ne touchera pas à l’essentiel : la « sphère financière » doit être maintenue la plus éloignée possible du commun des salariés et des citoyens. Pourtant ce sont eux qui subissent les formidables détournements de fonds par la spéculation, la confiscation des ressources par des patrons prompts à se saisir de toutes les ficelles de l’industrie financière pour s’assurer des revenus astronomiques. Dotés de pouvoirs réels d’intervention, ces salariés citoyens seraient les seuls garants d’une vraie régulation fondée sur un contrôle et une transparence effectifs. À condition d’oser sortir enfin de l’âge de pierre de la démocratie à l’entreprise.

L'Humanité - 01.04.09

1 comentário:

souklaye.sylvain disse...

Je ne sais plus si ce sont les grandes manœuvres qui font les évènements majeurs ou l’inverse ?

Le spectacle qui va être donné dans les jours à venir est à mi-chemin entre la frape préventive communautairement individuelle et la désertion responsable votée à l’unanimité des participants.
Le paradoxe du consensus réside dans le fait d’offrir un visage universel à une infinité de particularismes territoriaux, tout en prêchant pour sa chapelle tout en stipulant que l’on connaît encore les rudiments de la guerre sainte.
Quand les mêmes personnes multifonction prétendent et claironnent régler toutes les crises, on peut se dire qu’il n’y a pas un problème de maladie, mais de diagnostic.

L’avenir de la guerre froide va s’appeler la paix palliative. La maladie humaine se condamne elle-même à la mise en bière depuis qu’elle a découvert que la boulimie était plus jouissive que l’obésité.
La suite ici :
http://souklaye.wordpress.com/2009/04/01/bloc-note-le-bal-des-seconds-couteaux/

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