Gordon Brown a fait une envolée sur le « nouvel ordre mondial ». Nicolas Sarkozy s’est déclaré heureux de ce sommet qui a été « au-delà de ce que nous pouvions imaginer » (puisqu’il ne l’a pas quitté) et Angela Merkel a parlé d’un « compromis historique pour une crise exceptionnelle » (sans donner les modalités du deal). José Manuel Barroso, président de la Commission européenne a quant à lui salué le résultat « plus ambitieux qu’attendu » (sans préciser en quoi). Barack Obama parlera plus tard.
Le communiqué final prend cinq engagements, aussi prévisibles dans leur énoncé qu’incertains dans leur réalisation : restaurer la croissance et l’emploi, remettre sur pied les banques et l’activité de prêt, renforcer les institutions financières mondiales pour leur permettre de s’attaquer à la crise et d’empêcher que d’autres ne se produisent, promouvoir le commerce international et se garder du protectionnisme.
Il a été fait feu de tout bois pour parvenir à réunir cette somme, que le FMI et la Banque Mondiale vont gérer (comme de rembourser les emprunts qu’ils vont accorder). En ce qui concerne le FMI, qui va vendre de l’or, les Nouveaux Accords d’Emprunt (NAE) seraient activés. Il s’agit d’un cadre général auquel participent de Etats membres du FMI, en vigueur depuis 1998, qui complémente les Accords généraux d’emprunt (AGE). Les USA levant leur veto, une augmentation massive des allocations de DTS va également intervenir. Enfin, le FMI pourrait émettre des obligations directement sur les marchés. Ce serait également le cas de la Banque Mondiale.
Cet ensemble de décisions financières répond d’abord aux préoccupations des USA, et accessoirement des pays les plus démunis, qui peuvent en espérer des retombées. Mais ce dispositif un peu pompeusement qualifié de « nouvelle architecture de la finance mondiale » appelle plusieurs remarques :
1/ les USA ont obtenu un effort de relance très important, mais les mécanismes mis en place privilégient des organismes au sein desquels ils exercent certes une influence prépondérante, mais où les pays émergents vont monter un peu en puissance, d’ici un an maximum ont-ils obtenus. Le FMI, la Banque Mondiale, et le FSF (qui va, sous le nom de Conseil de Stabilité Financière, devenir le gendarme des marchés et des institutions financières) vont être appelés à jouer des rôles accrus, ce qui minore l’influence directe des USA, qu’elle entend évidemment conserver grâce à sa place financière de New York. L’OMC va poursuivre sa mission de garant de l’ouverture des frontières (pour le commerce international, les migrations n’étant pas de son ressort).
2/ La levée du veto à propos du vieux projet en suspens d’allocations supplémentaires de DTS, ainsi que les montants envisagés, est un pas notable, même s’il est limité, en direction des autorités chinoises, pour qui tout ce qui contribue à minorer le rôle international du dollar est le bienvenu. Il fallait bien aussi boucler le budget.
3/ Les nouvelles sollicitations du marché obligataire, venant s’ajouter à celles des Etats, y compris celles qu’elles vont devoir effectuer pour prêter au FMI, risquent de précipiter la hausse des rendements et d’augmenter pour tous les coûts de ces opérations.
La question de la relance financière était le plat principal, le reste n’étant que des à-côtés moins aboutis. La palinodie des paradis fiscaux se poursuit. En Europe, où les fers ont été croisés sur le pré, des discussions longues et discrètes à propos d’accords fiscaux bilatéraux entre Etats et paradis fiscaux vont permettre de régler la question entre gens du (même) monde. Le reste des paradis fiscaux, ceux de la Chine comme des USA, ainsi que les autres, semblent bénéficier de hautes protections. La suppression en Europe de quelques obstacles à la répression des délits fiscaux sera donc caduque dans les faits, à peine aura-t-elle fait l’objet de discussions préliminaires. Il suffira d’aller ailleurs. L’OCDE, finalement, publiera une liste de la honte, un mauvais moment à passer.
Autre opération de diversion destinée au grand public, des règles internationales de rémunération du monde de la finance ont été adoptées. Des mesures appelées à être très facilement contournées, par exemple via les paradis fiscaux, en application d’un savoir-faire à la base des métiers de la finance.
La crise du système financier international sort quant à elle largement escamotée de cette réunion, au profit de déclarations générales sur de futures mesures de régulation : enregistrement et contrôle à définir des fonds spéculatifs, surveillance des agences de notation. Tout ceci ne préjuge pas de des modalités et de la rigueur des dispositifs qui seront finalement retenus.
« A mes yeux, le sujet le plus important est que nous tombions d’accord, avec les Britanniques et les Américains aussi, sur le principe suivant : aucun produit financier, aucun intervenant sur les marchés et aucune place financière ne peut demeurer sans régulation et sans supervision », avait déclaré ce matin même Peer Steinbrück, ministre allemand des finances, sans en préciser l’étendue dans chaque cas. Il est préférable de le laisser maintenant juge, pour savoir si ces principes sont respectés. A défaut, cela restera un excellent programme de travail pour le prochain G20.
Un dernier mot à propos cette fois du système monétaire international, « Il y a eu des discussions isolées dans un format bilatéral sur ce sujet. Et je pense que c’est un sujet qui fera l’objet d’un futur approfondissement dans les mois prochains », a déclaré à la fin du G20 l’un des conseillers du président Russe Medvedev, ajoutant que celui-ci souhaitait que la question soit abordée dans le cadre du FMI.
Blog de Paul Jorion - 02.04.09
Sem comentários:
Enviar um comentário