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12/01/2010

Quartiers défavorisés : la situation reste préoccupante

Echec scolaire, chômage important, pauvreté accrue, la situation des ZUS ne s’améliore guère. Une analyse de Laurent Mucchielli, directeur de recherche au CNRS-Cesdip.

La publication officielle du Rapport 2009de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS) est passée relativement inaperçue fin novembre 2009. Il faut dire que les pouvoirs publics communiquent étrangement beaucoup moins sur ces indicateurs que sur les statistiques de police, par exemple… Certes, le ton des discours est assez similaire : on vante « l’action engagée par le Président de la République et le Gouvernement pour réduire les écarts structurels qui demeurent entre les quartiers prioritaires et le reste de notre territoire national », [1] ou bien on insiste sur des « résultats prometteurs », [2]. La réalité est plus préoccupante et invite à davantage de modestie. On rappelle ici trois aspects qui sont liés aux problèmes de délinquance : les parcours scolaires des enfants, le chômage des jeunes et la pauvreté des familles.

L’échec scolaire persiste

En 2007-2008, 9,4 % des collégiens et 8,5 % des lycéens étaient scolarisés en ZUS. Et leur situation est globalement beaucoup plus mauvaise que dans les autres quartiers. Dès la 6ème, on trouve en ZUS deux fois plus d’élèves accusant un retard de deux ans ou plus que dans les autres quartiers. L’origine étrangère et la catégorie sociale défavorisée des parents sont deux déterminants importants de cette différence. L’écart de réussite au brevet entre les collèges des ZUS et les autres a très légèrement diminué ces dernières années mais reste de 12,1 points en 2008. Enfin, au lycée, les élèves de ZUS se dirigent davantage vers les filières technologiques ou professionnelles que vers les filières générales. Certes, parmi les indicateurs disponibles, certains s’améliorent mais dans de faibles proportions. Au total, l’écart entre les ZUS et les autres quartiers perdure à peu près dans les mêmes termes. Le rapport relève en outre que les ZUS sont caractérisées par des fonctionnaires de l’Education nationale plus jeunes et avec moins d’ancienneté dans le même établissement (turn over important), constat qui vaut pareillement pour d’autres catégories de fonctionnaires, la police nationale par exemple.

Le chômage reste très supérieur

Le taux de chômage est traditionnellement beaucoup plus élevé (supérieur d’au moins de 10 points) dans les ZUS que dans le reste des agglomérations où elles sont situées. Mais qu’en est-il en termes d’évolution ? Si ce taux a été globalement stable de 2003 à 2008 (autour de 17 % avec une pointe à 20 % fin 2005 et début 2006), la crise économique a amené un retournement de tendance mi-2008 et une remontée très forte depuis. Dès le 2ème trimestre 2009, on avait retrouvé le niveau de début 2006 (voir les « indicateurs de conjoncture » sur le site de l’INSEE : www.insee.fr). Il est donc probable que ce taux se situe toujours autour de 20 % en ce début d’année 2010. Ce taux global masque toutefois des écarts très importants selon l’âge, le sexe et le niveau de diplôme. Les jeunes hommes (16-25 ans) sont comme toujours les premiers amortisseurs de la crise et les premiers licenciés (ils n’ont pas d’expérience à faire valoir, ils travaillaient plus souvent en CDD, en intérim, en travail saisonnier). Ainsi dès 2008, leur taux de chômage était remonté à près de 42 %. Il approche peut-être les 50 % en ce début 2010. Et si l’on ajoute le critère de la qualification, la situation devient plus grave encore. Le taux de chômage des hommes, jeunes et peu ou pas diplômés se situe ainsi bien au-delà des 50 %, peut-être au-delà même des 60 %. L’ONZUS rappelle ainsi que « au total, 1 jeune sur 4 des quartiers sensibles est au chômage ou en inactivité, contre 1 sur 8 dans les autres quartiers des mêmes agglomérations ». Et il ajoute également : « Si l’évolution du chômage des jeunes semble essentiellement liée à celle du chômage des faiblement diplômés, on peut s’interroger sur la faible probabilité d’accès à l’emploi stable des jeunes habitants des quartiers de la politique de la ville. L’emploi stable est 1,7 fois moins accessible à un jeune habitant en ZUS qu’à un habitant des autres quartiers. La qualification ne suffit pas à rétablir l’égalité avec les autres territoires. A caractéristiques de diplôme, de sexe, d’origine du père et de nationalité identiques, un jeune habitant de ZUS a encore 1,3 fois moins de chances d’obtenir un emploi stable qu’un habitant d’autres quartiers. On pourrait y voir la conséquence de l’enclavement des ZUS, comme celle de l’absence de réseau personnel ou d’autres discriminations ».

Une concentration de pauvreté

Les ZUS concentrent les populations les plus pauvres. Leur revenu fiscal est globalement inférieur de moitié à celui des autres territoires. Plus de la moitié des ménages y sont non imposables. Et ces écarts de revenus n’évoluent pas. En 2007, ce sont un tiers (33 %) des habitants des ZUS qui vivent sous le seuil de pauvreté (c’est-à-dire avec moins de 908 euros par mois pour vivre), soit presque 3 fois plus que sur le reste du territoire national. A nouveau, les jeunes de moins de 25 ans sont les plus en difficulté avec une proportion de 40 à 45 % vivant sous le seuil de pauvreté. Le rapport conclut en rappelant que si « cette proportion [de personnes vivant sous le niveau de pauvreté] est restée stable entre 2006 et 2007 hors ZUS, elle a augmenté de 2,6 points en ZUS ».

[1] discours de Xavier Darcos du 30/11/2009

[2] discours de Fadela Amara du 30/11/2009

http://www.inegalites.fr/spip.php?article1177

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