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24/10/2009

Extrême droite : "La Grande-Bretagne est au même stade que la France il y a 25 ans"

Adam Sage, correspondant du Times à Paris, compare l'attitude des médias français et britanniques vis-à-vis de l'extrême droite, au lendemain de la première participation du président du British National Party (BNP), Nick Griffin, à "Question Time", émission politique phare de la BBC.

Comment se fait-il qu'en Grande-Bretagne, inviter le leader de l'extrême-droite à la télévision soit contesté, alors qu'en France, c'est fréquent ?

Jusqu'ici, l'extrême droite était marginale chez nous, avec moins de 1 % des voix aux élections nationales, donc la question de l'inviter dans les médias ne s'était pas véritablement posée. Ce n'est que ces cinq dernières années que le BNP a commencé à émerger, d'abord aux élections locales. Et aux élections européennes de juin, il a remporté 6,2 % des voix.

Nous en sommes donc au même stade que la France il y a 25 ans, quand le Front national perçait et que la question de la place à accorder à Jean-Marie Le Pen dans les médias faisait débat. Je crois qu'il a été pour la première fois invité à "L'Heure de vérité" en 1984.

Comment se fait-il que l'extrême droite soit restée si basse ces dernières années, alors qu'on se souvient par exemple du mouvement skinhead ?

La société britannique était plus raciste dans les années 1970, mais il y a eu beaucoup d'efforts depuis, notamment dans les écoles. Les relations intercommunautaires sont aussi plus faciles qu'en France, même si elles ne sont pas faciles. Enfin, et c'est la principale raison, notre système parlementaire marginalise naturellement les petits partis. Comme il n'y a qu'un seul tour, cela encourage le vote utile, et rend difficile l'émergence de petits partis. Est-ce que le BNP a ouvert une brèche ? C'est possible avec la crise économique. A ceci près que je ne suis pas sûr qu'il y aura quelqu'un comme François Mitterrand pour jouer de la chose et mettre en place un système d'élections proportionnelles favorisant le Front national.

Pensez-vous qu'il vaut mieux inviter Nick Griffin que de l'ignorer ?

Il n'y a pas de bonne solution avec un tel parti. Mais je pense que lui interdire les médias est contre-productif. L'expérience française montre qu'en gros, si on n'invite pas l'extrême droite, elle en fait un argument électoral, en se disant victime de l'establishment.

Propos recueillis par Claire Ané

Le Monde - 24.10.09

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