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05/05/2009

L'autre plan social de Continental

Gérald Andrieu

Premier volet de notre série sur «les plans sociaux silencieux». En plus des 1 120 salariés du fabricant de pneumatiques mis au chômage, près de 4 500 employés risquent de boire le bouillon, 10 000 personnes avec leurs familles…

Mille cent vingt, c’est le nombre de salariés qui risquent de se retrouver sur le carreau si le site de Continental Clairoix ne trouvait pas repreneur. C’est en tout cas, le chiffre avancé dans tous les médias. Mais par ricochet, les salariés mis au chômage risquent d’être plus nombreux. Peut-être même quatre fois plus nombreux à en croire Bruno Henin, secrétaire départemental de la CGT – Oise : « Lors des réunions avec les services de l’Etat, on parle de 400 emplois directs supprimés et entre 2 000 et 3 000 emplois induits dans la Somme et dans l’Aisne. » Laurent Portebois, le maire de la petite commune de Clairoix fait la même estimation. Il en veut pour preuve les statistiques dont il dispose pour sa commune : en 2008, sur les 2 200 habitants, il y avait 24 salariés de l’usine et… 88 employés par des sous-traitants. Mais l’élu ne s’arrête pas là et livre une projection encore plus impressionnante : « Sur l’ensemble du bassin compiégnois, avec les familles, ce sont peut-être 10 000 personnes qui vont être touchées. »


Car si les projecteurs se braquent « facilement » sur les ouvriers de l'usine Continental, les dizaines d’entreprises sous-traitantes qui vont être (ou ont déjà été) victimes d’un terrible effet domino, sont largement oubliées. Il y a, bien entendu, toute la cohorte de sous-traitants industriels qui oeuvrait dans l’ombre du géant du pneumatique. De très grandes sociétés et de très petites comme la chaudronnerie Patrat basée à Clairoix même : « On a pris un bon coup sur le carafon comme beaucoup de sous-traitants, explique une employée, Aujourd’hui, on a trouvé quelques clients, on essaie de tourner la page et d’oublier Continental, même si on reste solidaires des ouvriers… » Mais le mal est fait : sur les sept employés, un d’entre eux a été licencié : « C’était un tourneur fraiseur. On n’avait plus de boulot pour lui… »


Les oubliés du dossier Continental

Mais au-delà des sous-traitants, il y a aussi tous les employés des prestataires de services. Ceux qui veillaient par exemple à l’entretien des espaces verts du site ou même à l’affûtage des outils. Ceux-là sont les vrais oubliés du dossier Continental. Ceux là n’ont ni droit à l’oreille des représentants de l’Etat ni même à celle des journalistes. Et ceux-là, quand la taille de leur entreprise ne l’exige pas, n’ont parfois même pas droit à un plan de sauvegarde de l’emploi (l'expression officielle — et quelque peu orwélienne — pour désigner les plan sociaux). Un dispositif qui, en période de crise, est peut-être ce qui peut arriver de « moins pire » à ceux qui perdent leur emploi...

Parmi les très nombreux prestataires de service qui travaillaient sur le site de Continental, il y avait l’entreprise SMILE SI - Nord et ses 90 employés. Ils assuraient pour le fabricant de pneumatiques, sur le site même de l’usine, une multitude de tâches : maintenance, contrôle et logistique. Aujourd’hui, il ne sont déjà plus qu’une trentaine : « A court terme, si on conserve cinq à six postes, ça sera beau, confie Thierry Seznec, directeur général de SMILE SI, Le secteur est très sinistré. Le peu d’entreprises qui restent sont en phase de réinternalisation. Il n’y a plus d’externalisation. »


La situation de SMILE SI est assez emblématique : la société avait été créée il y a trois ans et avait Continental pour seul client. « C’est vrai, c’était une position dangereuse, concède Thierry Seznec, mais on espérait pouvoir la consolider. » L’annonce de la fermeture du site est arrivée avant que cela soit possible. Aujourd’hui, le DG de la société le regrette. Plus encore pour les salariés : « Pour eux, c’est difficile à vivre. Les conditions qu’ils connaissent sont moins favorables que celles des employés de Continental. C’est une entreprise qui a connu une belle époque : leurs salariés travaillaient dans de bonnes conditions, ils avaient obtenu des acquis sociaux. Les salaires des employés de SMILE étaient moins élevés : ils avaient moins d’ancienneté que la plupart des employés de Continental. Et le dispositif de prise en charge n’est pas le même. » Pas le même, aussi et surtout, car comme le regrette Thierry Seznec, « médiatiquement, on ne pèse pas… »

Marianne2 - 05.05.09

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