Berlin prépare un plan d'austérité de 10 milliards d'euros par an. Hausses d'impôts et coupes des dépenses sociales sont au menu de cette rigueur que certains jugent excessive, car elle menace la fragile reprise outre-Rhin.
Le gouvernement allemand se réunit dimanche 6 et lundi 7 juin pour préparer le budget fédéral 2011. Les ministres conservateurs et les libéraux d'Angela Merkel doivent décider des mesures à prendre pour réduire le déficit du pays à quasiment néant en cinq ans. Apôtre de l'orthodoxie budgétaire en Europe, l'Allemagne veut montrer l'exemple. Surtout, elle n'a pas le choix : une clause introduite l'an dernier dans sa Constitution l'oblige à limiter son déficit à 0,35% du PIB (environ 10 milliards d'euros) à partir de 2016. Un effort bien plus important que ne l'exige le Pacte de stabilité européen (3%).
L'ampleur des économies à réaliser d'ici là est estimée à environ 10 milliards d'euros par an. L'équivalent de 0,4% du PIB annuel allemand, selon le Financial Times Deutschland. En comparaison, les mesures d'austérité mises en place par le gouvernement grec cette année représentent 9% du PIB du pays. Mais contrairement à la Grèce, on ne peut pas parler pour l'Allemagne de dérive des finances publiques. Son déficit s'est certes creusé avec la crise, mais il reste limité par rapport à celui de ses voisins européens : il s'est élevé à 3,3% du PIB en 2009, contre 8% en France. Cette année, il devrait atteindre 6%, voire un peu moins...
Créations de nouvelles taxes
La bonne nouvelle pour Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des Finances, est que l'ampleur du déficit fédéral devrait être revue à la baisse cette année, de 10 à 15 milliards d'euros. Le recul du chômage, le redémarrage de l'économie, la vente aux enchères de licences de téléphonie mobile et le faible niveau des taux d'intérêt de la dette devraient limiter le déficit à 65 ou 70 milliards d'euros. En comparaison, le déficit prévisionnel de l'Etat français pour 2010 est de 152 milliards.
Pour parvenir à réduire son déficit, l'Allemagne devrait jouer à la fois sur le côté dépenses et sur le côté recettes. Wolfgang Schäuble aurait proposé notamment d'augmenter de près de 3 points (de 5,5% à 8%) l'impôt de solidarité (le Soli", instauré en 1991 après la réunification pour financer l'aide aux Länder de l'ex-RDA). "Nein", aurait répondu Angela Merkel, en raison de l'opposition de la CSU bavaroise et du parti libéral. Le FDP a en effet fait sa campagne électorale en 2009 sur les baisses d'impôts. Cette promesse a été renvoyée aux calendes grecques.
Car ce sont bien des hausses d'impôts qui se profilent à l'horizon des Allemands. Plusieurs mesures de taxations sont en effet étudiées par le gouvernement Merkel. Parmi elles, la suppression de la TVA réduite sur certains secteurs ou produits (nuits d'hôtel, taxis, nourriture pour chiens), une nouvelle taxe sur les billets d'avion ou l'électricité d'origine nucléaire, ou encore la hausse des taxes sur le tabac et les poids lourds.
Réduire les dépenses sociales de 40 milliards
Côtés dépenses, Angela Merkel a d'ores et déjà exclu de baisser toucher aux budgets de l'Education nationale, de la Recherche et de l'Environnement. Pas question non plus de baisser le niveau des pensions de retraites. Pour le reste, rien n'est tabou. Par exemple, la reconstruction du château de Bellevue à Berlin, qui devait coûter 550 millions d'euros, devrait être abandonnée. Le ministère de la Défense sera particulièrement visé : les effectifs de la Bundeswehr seraient significativement réduits (d'environ 150.000 à 250.000 soldats) et le service militaire obligatoire pourrait être supprimé. Cela permettrait d'économiser 400 millions d'euros pas an.
Les dépenses sociales ne seront pas épargnées par ces coupes. L'objectif serait de les réduire de 40 milliards dans les prochaines années. Selon la presse allemande, Berlin envisage de supprimer des allocations parentales, de revoir à la baisse les prestations pour les chômeurs de longue durée et le budget de formation des chômeurs. L'Etat pourrait également revoir à la baisse sa contribution à l'assurance chômage, afin d'économiser 6 milliards d'euros par an.
Plusieurs voix s'élèvent déjà en Allemagne pour une modération de la rigueur qui pourrait tuer dans l'oeuf la reprise naissante. Essentiellement tirée par les exportations, la reprise de l'économie allemande est fragile car la demande de ses principaux partenaires européens risque de s'affaiblir. Et la consommation outre-Rhin reste toujours aussi atone. Les hausses de taxes et baisses des prestations sociales envisagées par le gouvernement ne sont pas de nature à la stimuler.
http://www.lexpansion.com/economie/actualite-economique/la-rigueur-version-allemande-ca-donne-quoi_233578.html
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