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14/04/2009

Obama et la réforme de la guerre

La « contre-insurrection » à « basse-intensité » et haute mortalité (pour les autres)

Manlio Dinucci - Mondialisation.ca - 13 avril 2009

Robert Gates, le secrétaire à la défense qui est passé de l’administration Bush à celle d’Obama, a annoncé une « profonde réforme » de la dépense militaire étasunienne. Il ne s’agit pas d’épargne : le président a demandé, pour l’année fiscale 2009, 83 milliards de dollars de plus pour les guerres en Irak et Afghanistan et, en 2010, le budget du Pentagone dépassera les 670 milliards. Il s’agit de mieux utiliser ce colossal débours d’argent public qui, avec d’autres postes à caractère militaire, se monte à environ un quart du budget fédéral. La réforme, explique Gates, consiste à redimensionner les programmes des plus grands systèmes d’armement et accroître les fonds pour la guerre de « contre-insurrection ».

Les « leçons apprises en Irak et Afghanistan » ont montré qu’il faut des véhicules militaires plus résistants contre les mines et les engins explosifs improvisés. Des fonds conséquents seront donc destinés à leur réalisation. Mais ceci n’est qu’une partie du programme Future Combat Systems, destiné à augmenter les capacités des brigades de combat : les soldats seront de plus en plus intégrés dans un réseau de haute technologie, avec communications satellitaires et véhicules téléguidés. Seront par contre redimensionnés des programmes comme celui du chasseur F-22 Raptor de la firme Lockheed Martin, conçu pour des scénarios de guerre froide, qui s’arrêtera à 187 exemplaires (de 140 millions de dollars pièce). Lockheed, en compensation, recevra de plus gros fonds pour le chasseur F-35 Lightning II (Joint Strike Fighter), plus adapté à la « contre-insurrection » (il y a même une version à décollage court ou vertical pour les marines). Soupir de soulagement pour les actionnaires des sociétés italiennes (Avio, Piaggio, Galileo avionica, Oto Melara et autres) qui construiront les ailes des chasseurs et les assembleront.

Le Pentagone compte surtout sur les Uav (véhicules aériens sans équipage), télécommandés : en particulier le Predator (« prédateur ») et le Reaper (« broyeur » de vie humaines, évidemment). La raison en est fournie par Gates : ces avions, déjà utilisés en Irak, Afghanistan et Pakistan, ont commencé à remplacer, dans certaines missions, ceux avec équipage à bord. Les avantages sont multiples : plus grand rayon d’action (3.500 miles pour le Reaper contre 500 pour le F-16), coût moins grand, (une unité de 4 avions, 55 millions de dollars) et, surtout, aucun risque pour l’équipage (un pilote et un technicien aux détecteurs). Celui-ci est confortablement assis à une console dans une base aux Etats-Unis, à 12 milles kilomètres de distance. Le Predator a comme fonction première de repérer les objectifs à toucher, qui sont ensuite signalés aux pilotes des chasseurs, mais il est aussi armé de deux missiles Hellfire (« feu de l’enfer »). Le Reaper a une fonction première de hunter/killer (chasseur/tueur) : il transporte une charge guerrière de plus d’une tonne et demie, composée de missiles, et bombes à commandes laser et satellitaire. Souvent, les mêmes opérateurs qui sont à la console « volent » le matin sur l’Irak, puis sur l’Afghanistan ou le Pakistan après le lunch. Et, quand ils ont lancé quelques missiles sur de présumés « terroristes » en faisant éventuellement quelques massacres de civils, ils rentrent à la maison où les attend leur famille.

Tuer en manipulant avec un joystick un avion qui est à 12 milles kilomètres de distance est la dernière limite des technologies guerrières, sur lesquelles est fondée la réforme du Pentagone. De gros investissements permettront de potentialiser non seulement les Uav de l’aéronautique, qui sont actuellement au nombre de 200 environ pour les Predator et 30 pour les Reaper ; mais aussi tout le système des drones militaires, y compris les véhicules terrestres téléguidés, qui sont passés de 170 en 2001 à 5.500. Ils serviront à mener la guerre de « contre-insurrection », que les stratèges définissent « à basse intensité ».

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