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07/02/2009

900 personnes tuées aux Philippines... par de « mystérieux escadrons de la mort »

Aux Philippines, des leaders du mouvement paysan, des défenseurs de l’environnement et des militants étudiants sont assassinés par de mystérieux escadrons de la mort qui semblent avoir des liens étroits avec l’armée.

Par Thomas BELL

Des militants affirment que, depuis l’accès au pouvoir en 2001 de la Présidente Gloria Arroyo, plus de 900 personnes ont été exécutées de façon extra-judiciaire et 200 autres ont « disparu ». Un rapport des Nations Unies en 2007 rendait l’armée responsable de la majorité des meurtres mais aucune mesure n’a été prise et les assassinats inexpliqués continuent.

Une des zones les plus dangereuses est la vallée de Compostela, au sud, sur l’île de Mindanao. C’est un lieu d’une grande beauté ainsi que d’une grande pauvreté rurale. C’est aussi où se trouvent de nombreuses mines d’or qui appartiennent à des étrangers et où il existe, depuis longtemps, un mouvement d’insurrection communiste. Dans les dernières semaines de 2008, cinq hommes apparemment paisibles et respectueux des lois ont été abattus mystérieusement dans la région.

"Tout ce qu’ils ont voulu faire, c’était servir les pauvres et défendre les droits humains"

La première victime était Danilo Qualbar, un activiste de 48 ans du parti de gauche Le Peuple d’abord (Bayan Muna/People First), qui a été tué le 6 novembre. Les observateurs des droits de l’homme ont déclaré qu’aucune autopsie ni enquête n’a été réalisée : la police n’a même pas interrogé la famille de la victime.
Selon la veuve de M. Qualbar, un groupe de soldats a crié « celui-là » quand son mari passait un poste de contrôle militaire, une semaine avant son assassinat.

La victime suivante a été tuée 4 jours plus tard. Rolando Antolihao, âgé de 39 ans, travailleur dans une plantation de bananes et membre du parti Le Peuple d’abord, a été abattu devant sa femme et sa fille âgée de 2 ans. Un petit poste militaire se trouvait à une cinquantaine de mètres mais, selon les rapports, les soldats en service ont répondu aux coups de feu.

Les semaines suivantes, deux autres militants sont tombés sous les balles.
Enfin, deux jours avant Noël, Fernando Sarmiento, un écologiste de 39 ans qui soutenait que la mine d’or locale portait atteinte aux intérêts de la population locale, fut tué par des assassins correspondant à la même description.
Des amis de M. Sarmiento ont déclaré qu’il avait été arrêté par l’armée en juillet et accusé d’être un guérillero communiste.
Des témoins ont remarqué que les tueurs dans la Vallée de Compostela arrivaient généralement sur une moto Honda de couleur rouge et utilisaient un pistolet automatique 45. Les premiers suspects sont les soldats des camps militaires locaux, mais aucune enquête officielle n’a été faite sur les assassinats ni même pour savoir si les décès étaient liés entre eux d’une façon ou d’une autre.

Des militants des droits de l’homme affirment que les meurtres font partie d’une offensive lancée par la Présidente Arroyo en vue d’éliminer, d’ici 2010, les guérilleros maoïstes appelés la Nouvelle Armée du Peuple (NPA, New People’s Army).
Bien qu’ils démentent les assassinats, les cadres supérieurs de l’armée affirment que les partis légaux comme Le Peuple d’abord et d’autres groupes activistes dont la plupart des victimes sont issues, sont des façades pour les communistes.

Pour l’armée, ces morts seraient le résultat des querelles et des purges pratiquées au sein du parti communiste..
Selon le lieutenant-colonel Ernesto Torres, un porte-parole de l’armée, les « forces de sécurité sont des boucs émissaires commodes » pour désigner les coupables des meurtres et il déclare que les allégations contre l’armée sont faites par des « groupes qui veulent renverser le gouvernement et le remplacer par leur propre gouvernement ».
Cependant, d’après Alan Davies, directeur du Projet Droits Humains aux Philippines, « aucun organisme, qu’il soit international ou local, n’essaie d’enquêter convenablement et d’analyser ces meurtres pour voir de quelle façon ils sont liés ».

Une femme qui connait la douleur causée par ce silence officielle est Erlinda Cadapan. Sa fille Sherlyn était une étudiante de 29 ans militant pour les droits des paysans quand, en 2006, elle fut enlevée avec une amie par un groupe de personnes suspectées d’être des soldats.
Un témoin, qui affirme avoir rencontré les deux femmes lors de leur détention par l’armée, a attesté qu’elles avaient été violées et torturées par des soldats et que ceux-ci lui avaient dit qu’elles avaient ensuite été tuées.
Mme Cadapan a écrit à la Présidente Arroyo mais n’a reçu aucune réponse.
En septembre, un tribunal a statué que, si elles étaient toujours en vie, les femmes devraient être libérées.

« Ca me rend vraiment furieuse car, malgré la décision de la cour, personne au gouvernement n’a la volonté de m’aider. Ils essayent de protéger les forces armées, » a déclaré Mme Cadapan.
« Des rumeurs circulent comme quoi ma fille est toujours en vie alors nous espérons et nous prions pour que cela soit vrai », a-t-elle expliqué. « Mais ils continuent de tout nier ».

La Présidente Arroyo est restée silencieuse sur la plupart de ces 900 meurtres et 200 « disparitions » qui se sont produits pendant son mandat ; l’armée dément toute implication et personne n’a jamais été poursuivi.

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