La réforme s’inscrit dans un projet européen de régression sociale et de recul de la dépense publique réclamés par les marchés financiers et aussi par la chancelière allemande.
« La plupart des pays européens ont augmenté la durée de la vie active par rapport au temps passé à la retraite », a déclaré Éric Woerth, hier. Justement, cela démontre que l’objectif essentiel de la réforme n’est pas franco-français. Il y a derrière un projet européen coordonné de régression sociale. Il en est pour preuve que le 7 juin, le Conseil européen économie et finances s’est prononcé dans ses conclusions pour le recul de l’âge de la retraite, invitant chaque pays « à utiliser pleinement ses forces de travail, y compris par la prolongation des périodes d’emploi sur la durée de vie ».
Pourquoi une telle régression dans une construction politique - l’Union européenne - qui promettait le bonheur ? Pour répondre aux exigences des marchés financiers, de la Commission de Bruxelles et. d’Angela Merkel. Le président français, Nicolas Sarkozy, a plié devant la chancelière allemande qui, doutant notamment de la capacité de la France à tenir son engagement d’un retour à un déficit public de 3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2013, entend mettre des garde-fous très stricts. Aujourd’hui, lors de la réunion à Bruxelles des chefs d’État et de gouvernement, les deux dirigeants vont soumettre à leurs pairs un sérieux durcissement du pacte de stabilité, comme le réclame la chancelière allemande. Les projets de budgets nationaux, celui de l’État mais aussi les dépenses de protection sociale et des collectivités territoriales, seront désormais présentés à la Commission européenne et aux autres États membres avant d’être soumis aux élus nationaux. Les sanctions contenues dans le pacte seront complétées, plus nombreuses et pourront être mises en ouvre plus rapidement. La surveillance ne portera plus uniquement sur le niveau des déficits publics, mais concernera également le niveau de la dette. Un État avec une dette importante pourra faire l’objet d’une procédure pour déficit excessif.
Par ailleurs, cette baisse des dépenses utiles est réclamée par les banques et les marchés financiers, particulièrement les fonds de pension et d’investissement anglo-saxons. Pour augmenter leurs propres prélèvements, ceux de la finance, ils exigent le recul des prélèvements publics. L’une des dispositions de la réforme que la droite française veut engager va particulièrement dans ce sens. Le recul de l’âge où il sera possible de prendre sa retraite au taux plein va pousser nombre de familles à recourir aux retraites par capitalisation des banques et des compagnies d’assurances. C’est jour de fête pour la finance !
Pierre Ivorra
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