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01/02/2011

Egypte. Hussein Abdel Razek « On assiste à l’explosion d’une demande sociale étouffée depuis des années »

Hussein Abdel Razek, membre du bureau politique du parti Tagammu (marxiste), analyse les raisons de la force du mouvement de contestation et esquisse quelques perspectives d’issue politique. Envoyé spécial.
Quelles sont les raisons 
de la colère ?
 Hussein Abdel Razek. Les manifestants veulent un nouveau régime. Ils refusent la structure qui est en place depuis 1981. D’ailleurs, les slogans que l’on entend le plus sont : « Moubarak doit partir », « Le régime doit abdiquer. » Ils réclament aussi des élections libres pour pouvoir exprimer démocratiquement leur rejet du parti en place. Et ils se battent pour l’égalité parce que, même s’ils ne sont pas issus des classes les plus pauvres, ils sentent bien que ce manque de justice sociale n’est plus acceptable. Tous ceux qui manifestent protestent également contre la hausse des prix, notamment sur les produits de première nécessité comme le pain, et exigent des augmentations de salaire. Aucune organisation, aucun parti ne peut dire qu’il avait prévu ce qui vient de se passer. Cette explosion a vraiment été une surprise. Personne n’a vraiment joué un rôle dans cette révolte de la jeunesse en Égypte. Mais dans le même temps, toutes ces demandes étaient présentes dans les journaux d’opposition ou dans les revendications de ces cinq dernières années. On ne peut donc pas dire que ce mouvement est apparu soudainement, ne s’appuyant sur rien. Il existait une demande sociale sensible, à droite comme à gauche.
Justement, que font les partis d’opposition, le vôtre, Tagammu, ou encore celui des Frères musulmans ?
 Hussein Abdel Razek. Nous demandons au président Hosni Moubarak d’annoncer qu’il ne sera pas candidat à la prochaine élection présidentielle qui doit se tenir au mois de septembre. Ni lui ni son fils. Il faut une nouvelle Constitution et des élections libres pour un nouveau parlement. Ce volet politique doit être accompagné d’un volet social fort, comme des augmentations de salaire, une nouvelle politique pour le développement du pays, le contrôle des prix.
Que proposez-vous ?
Hussein Abdel Razek. Vendredi, nous avons, en tant que Tagammu, invité l’ensemble des partis politiques et les organisations de jeunes à discuter pour voir comment former un front, un comité des partis et des organisations de jeunes, élaborer un programme. 
On a surtout vu la classe moyenne égyptienne manifester. Qu’en est-il des ouvriers et des paysans ?
 Hussein Abdel Razek. C’est vrai. 
Pour l’instant, les ouvriers 
et les paysans ne participent pas aux manifestations. La plupart des jeunes sont issus de la classe moyenne. C’est très étonnant, mais il faut regarder la réalité économique de l’Égypte. Des 
pans entiers de l’industrie nationale ont été privatisés 
et les salariés dans ces entreprises sont plus vulnérables. 
Le mouvement syndical a été très affaibli ces dernières années.
Quelle a été l’attitude des syndicats, ces derniers jours ?
 Hussein Abdel Razek. Le problème 
est que les directions nationales des syndicats sont contrôlées par le gouvernement. Bien sûr, au niveau local, c’est différent. Mais depuis des années, la gauche égyptienne a été affaiblie. Elle 
ne représente pas un poids suffisant dans la contestation.
Qu’attendez-vous du gouvernement égyptien ?
Hussein Abdel Razek. Je crois que Hosni Moubarak et les gens qui l’entourent n’écoutent pas ce que les gens disent et donc ne comprennent pas le sens des manifestations. Ils ne veulent pas bouger. C’est pourquoi les manifestations vont se poursuivre. L’armée va jouer un grand rôle dans les prochains jours. Elle peut même demander à Moubarak 
de partir.
Entretien réalisé 
par P. B.

http://www.humanite.fr/30_01_2011-egypte-hussein-abdel-razek-%C2%AB%C2%A0-assiste-%C3%A0-l%E2%80%99explosion-d%E2%80%99une-demande-sociale-%C3%A9touff%C3%A9e-depuis

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