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24/07/2009

La direction voulait les licencier pour une heure de grève

Derichebourg . À Chilly-Mazarin (Essonne), 54 employés de ce sous-traitant de Chronopost ont été menacés de licenciement après un débrayage, le 7 juillet. Sous la pression, la direction a reculé.

La direction a fait machine arrière. Hier, 54 salariés de Derichebourg, employés en sous-traitance dans le centre de tri Chronopost de Chilly-Mazarin (Essonne), ont obtenu, après une nuit d’occupation du siège du groupe dans le 12e arrondissement de Paris, la levée des menaces de licenciement qui pesaient sur eux depuis plus de deux semaines. Épilogue heureux d’une tentative d’intimidation de leur direction, en réponse à la montée des revendications et au déclenchement d’une grève, début juillet.

« les chefs nous harcelaient »

L’affaire remonte à mars, voire janvier, voire octobre 2007. Octobre 2007, c’est la date à laquelle Chronopost, filiale à 100 % de La Poste, ouvre à Chilly-Mazarin une plate-forme ultramoderne destinée à devenir le « nouveau coeur du réseau », où transiteront 60 % des colis. Mais la vraie innovation est sociale, puisque la quasi-totalité du travail du site est sous-traitée à la société Derichebourg, multinationale française spécialisée dans les services. Celle-ci embauche alors 130 salariés pour décharger et charger les colis des camions, assurer la logistique et le tri des colis qui ne passent pas dans les machines automatiques. « La sous-traitance avait pour objectif d’éviter les grèves dans ce centre névralgique », dénonce Richard Giraud, délégué syndical central CGT chez Chronopost. « Le contrat prévoyait qu’en cas de grève chez Chronopost, Derichebourg palliait, et vice versa ». De fait, pendant un an et demi, rien ne bouge. Les salariés, la plupart d’origine africaine, travaillent tête baissée. « On était terrorisés, les chefs nous harcelaient pour travailler plus vite », raconte un salarié. Le centre est surchauffé l’été, sans chauffage l’hiver, le bruit infernal, le travail très rude, avec parfois des camions pleins de pneus à décharger à une personne en 45 minutes, expliquent les salariés, qui subissent aussi des horaires décalés : 16 heures-23 heures ou 23 heures-6 heures du matin, pour respectivement 1 200 et 1 400 euros net.

Mais en janvier dernier, le climat change avec les premières élections professionnelles, où la liste CGT emporte plus de 90 % des voix. « On a commencé à revendiquer nos droits », témoigne un employé. En mars, les délégués CGT communiquent à la direction une liste de revendications, essentiellement salariales : changements de coefficients, majoration à 50 % des heures de nuit (contre 20 %), 13e mois… « Au fil des négociations, la direction a fini par accepter certains points, notamment une prime de 300 euros, raconte Ali Abdoulkarim, délégué CGT. Mais, début juillet, elle nous a présenté un protocole où elle revenait sur certains points. » Le 6 juillet, les délégués appellent donc à un débrayage d’une heure, suivi par 57 personnes. Le lendemain, le directeur régional, Jean-Pierre Medico, notifie aux 57 leur mise à pied conservatoire en vue d’une sanction, pour « absence inopinée ».

« Le directeur s’est senti coincé »

Depuis, il laissait planer la menace de licenciements, envers et contre tout puisque le Code du travail interdit formellement les sanctions pour grève. « L’inspection du travail a rappelé à la direction que l’exercice du droit de grève ne peut en aucun cas justifier la rupture du contrat de travail », explique Jean-Louis Betoux, de l’union départementale CGT, qui avait préparé une saisine des prud’hommes « au cas où ». « Le directeur s’est senti coincé, donc il a essayé de dire qu’il ne s’agissait pas d’une grève mais d’une réunion syndicale spontanée qui posait des problèmes de sécurité. Ça ne tient pas la route. » Hier soir, les discussions entre CGT et direction se poursuivaient, celle-ci tenant à maintenir une sanction, même faible, sur les grévistes. « Chronopost et La Poste ont dû intervenir pour sortir du conflit, par peur d’être éclaboussées, car elles sont complices de ce qui se passe », estime Richard Giraud, de la CGT Chronopost.

L'Humanité - 23.07.09

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