Submergées par les demandes et confrontées à une baisse des ressources, les organisations d’aide aux plus démunis ne parviennent plus à remplir leur mission. Elles lancent un cri d’alarme à l’intention des pouvoirs publics.
Les associations sont à bout de souffle. Malgré leur engagement, les bénévoles n’arrivent plus à faire face. La semaine dernière, le Secours populaire d’Angers (Maine-et-Loire) prenait la décision de fermer temporairement ses portes (lire l’Humanité du 2 juin). « Un exemple très émouvant de ce qui pourrait se produire sur tout le territoire », assure le président du SPF, Julien Lauprêtre. En 2009, 2 millions de personnes avaient fait appel à l’association. Un chiffre atteint en un seul semestre en 2010.
Le SPF n’est pas seul à souffrir, toutes les organisations sont submergées. À l’occasion de leur dernière campagne hivernale, les Restos du coeur ont accueilli quotidiennement 40 000 personnes de plus que l’année passée. La Croix-Rouge constate également une hausse de la demande d’assistance. « Sur la première moitié de 2010, on voit une progression de 15 à 20 % de la fréquentation de nos structures d’accueil », relève Jean- François Riffaud, son porte-parole. Une situation d’autant plus inquiétante que « la rentrée scolaire, en septembre, est toujours l’occasion d’une recrudescence des demandes », précise Marc Castille, responsable du service solidarité du Secours populaire.
À la veille du lancement de sa campagne nationale de collecte, le président de la Croix-Rouge Française Jean-François Mattei, interpelle les pouvoirs publics et demande au « gouvernement de considérer les dépenses sociales comme prioritaires ». « Il doit prendre ses responsabilités. Ce ne sont pas les associations qui sont en crise, mais bien la société française, renchérit Jean-François Riffaud. Les besoins augmentent et les ressources baissent. Dans de très nombreuses régions, les collectivités locales rognent sur les aides qui nous sont attribuées. » Des propos qui rejoignent les déclarations de François Soulage, président du Secours catholique : « Les associations, aujourd’hui un peu dépassées, ne peuvent pas remplacer l’État. »
« NOUS AVONS BESOIN DE PLUS DE MOYENS »
Tous constatent également une diminution des dons. En 2009, les Français ont donné 397 millions d’euros. Selon le baromètre image notoriété réalisé par l’IFOP, les sommes collectées pourraient baisser en 2010. « Nos donateurs ont parfois eux-mêmes du mal à boucler leurs fins de mois », explique Marc Castille, du SPF. La Croix-Rouge tente également de faire face à un manque criant de moyens. « Pour maintenir un niveau de ressource constant, nous sommes obligés de beaucoup plus solliciter les Français, explique Jean-François Riffaud. Cette année notre quête nationale durera cinq jours, contre deux les années précédentes. Nous avons besoins de plus de moyens. La Croix-Rouge française ne peut donner que ce qu’on lui donne. »
Dans beaucoup de structures, les frigos sont vides. Les dotations européennes attribuées à la France, d’un montant global de 78,1 millions d’euros, sont réparties entre le SPF, la Croix-Rouge, les Restos du coeur et la Banque alimentaire. Elles représentent une part importante de leurs ressources (50 % pour le SPF, 60 % pour la Croix-Rouge et la Banque alimentaire, 20 % pour les Restaurants du coeur). Or ces dotations commencent seulement à arriver. Et sont, de surcroît, de plus en plus menacées. Entre l’automne, où les aides de l’Union européenne sont attribuées, et le printemps, où les achats sont réellement effectués, il s’écoule plusieurs mois pendant lesquels les cours des aliments peuvent monter, entraînant une diminution conséquente des rations attribuées au final. La réforme de la politique agricole commune, qui vise à réduire les surplus agricoles, pourrait également remettre en cause le programme européen d’aide alimentaire. Une incertitude qui inquiète fortement les associations. « La fin de ces aides mettrait en péril notre existence », souligne Marc Castille.
MATHIEU MOLARD
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