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12/06/2010

Les écoles rurales ont du souci à se faire

Béatrice Millésime 

Officiellement, il ne s’agit que d’un document de travail, mais comme il a malencontreusement fuité dans la presse, il devient un objet d’inquiétudes pour les élus, les enseignants et les parents. Ces inquiétudes prennent une dimension particulière en milieu rural dont les écoles sont directement visées par les services de l’Etat. Ce document pose les jalons d’une augmentation des effectifs dans les classes du premier degré. Il est demandé aux recteurs d’Académie de remplir une fiche sur le « Relèvement des seuils d’ouverture et de fermeture de classe », de faire une projection jusqu’à 2013, et de souligner « les contraintes » et les « éléments facilitateurs » de cette évolution.
Intitulé « Augmentation de la taille des classes dans le 1er degré », ce document explique en premier lieu que la baisse des effectifs dans une classe « n’a pas d’effet avéré sur les résultats des élèves et que les très petites écoles ne s’avèrent plus toujours performantes ». Hormis dans les zones dites prioritaires, « l’augmentation de la taille des classes peut donc être globalement envisagée sans dégradation des résultats des élèves ».
Les écoles rurales semblent plus que les autres dans le collimateur du gouvernement qui en appelle à une « réduction significative du nombre de classes, notamment lorsqu’il concerne des écoles à faibles effectifs ». Et le document de s’interroger sur « la pertinence des opérations qui consistent à implanter systématiquement des postes de soutien ou de coordination dans les regroupements dans la mesure où la nouvelle organisation de la semaine scolaire apporte des solutions nouvelles, en particulier, en matière d’aide personnalisée. »
Les communes qui n’ont pas encore créé de RPI (regroupements pédagogiques intercommunaux) sont grandement invitées à le faire. « Les fusions d’écoles ainsi que la mise en place des RPI sont de nature à permettre une répartition plus homogène et plus cohérente des effectifs tout en réduisant le nombre de classes nécessaires » souligne le texte. Et s’il est précisé que « la fermeture de petites écoles est progressive sur le moyen terme et peut encore progresser, en accord avec les communes concernées », le document indique également que cet accord n’est en rien une obligation. « Le Conseil d’État a en effet considéré qu’un poste peut être retiré, même sans l’accord de la commune, en indiquant qu’“aucune disposition législative ou réglementaire ne subordonne le retrait d’emplois d’instituteur à l’intervention préalable d’une délibération du conseil municipal décidant de la fermeture de la classe". »

René Daubriac : « Les RPI sont les derniers remparts de survie des écoles rurales »

Enseignant à la retraite et vice-président du conseiller général en charge de l’Education, René Daubriac nous a fait part de ses impressions et craintes.

Quelles sont vos premières réactions à la lecture de ce document de travail ?
Je suis un ancien instituteur. Je considère que c’est grâce aux écoles que les communes sont vivantes. On me dira que ce sont des mots mais ils ont un sens.
La carte scolaire est un aménagement gestionnaire qui ne correspond pas à ma philosophie qui veut que les écoles rurales soient protégées. Alors évidemment, garder une école rurale a un coût. Mais les RPI fonctionnent bien, ils permettent une complémentarité entre les différentes sections. L’optique du gouvernement est de reconsidérer les écoles pour faire des économies. Il faut savoir ce que l’on veut. Si l’on veut une qualité de vie et d’enseignement ou pas. La qualité, c’est la défense des écoles rurales. Mais bien sûr, il faut qu’elles aient un périmètre pour vivre, il est évident que si le manque d’effectifs le justifie, il faut savoir également supprimer des classes.

Vous n’êtes donc pas contre l’idée de supprimer certaines classes, voire écoles.
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Croissance de la population du Gers : évolution négative sur la période 1990-1999 et très forte croissance sur la période 1999-2006. Source : Ciadt, mai 2010.
On ne peut pas garder une classe unique avec peu d’enfants, cela paraît évident. Mais le Gers est en train de se repeupler. Et les collectivités font des efforts financiers. Les communes paient les Atsem (Agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, ndlr), le conseil général anime tout ça avec les transports scolaires, on fait des transports spécifiques pour les RPI. Je considère aujourd’hui qu’il y a deux camps : la défense de la qualité de vie, de l’enseignement, de l’aménagement du territoire, d’un côté, et la tendance à vouloir supprimer davantage de classes, de l’autre.

On constate aujourd’hui que des classes ferment dans certains RPI, voire des écoles. Ces regroupements tiennent-ils toujours leur rôle ?
Les RPI avaient pour but de sauver les écoles de campagne. Ils ont permis de les sauver, d’ailleurs. Ils ont permis à des villages de se regrouper, de faire en sorte qu’il y ait suffisamment d’effectifs pour maintenir les classes et éviter qu’elles ferment. Au lieu de tout supprimer, on maintenait les classes en état de marche. L’administration revient aujourd’hui sur le fonctionnement des RPI. Les RPI sont les derniers remparts de survie des écoles rurales. Si on s’attaque à eux, les écoles en subiront les conséquences.
L’exemple a eu lieu dans mon canton (de Samatan, ndlr), dans le RPI de Cazaux, Noilhan, Pompiac et Seysses. La communauté de communes du Savès a fait le choix de fermer l’école de Cazaux. On passe de 4 classes à 3 et dans deux ans, ce sera au tour de Pompiac de fermer puisqu’on perd un poste d’enseignant. La communauté de communes a fait un choix de gestion.

L’Etat n’est pas donc le seul à faire le choix d’une fermeture de classe.
Tout le monde est tenté de faire des économies. Le gouvernement, en supprimant les enseignants, les communes en se disant : pourquoi je dépenserai de l’argent.
La République a donné une école à chaque village, elle a demandé à toutes les communes d’au moins 20 enfants de construire des écoles. Aujourd’hui, on en ferme, alors que le Gers se repeuple. Pourquoi les gens viennent chez nous ? Parce qu’il y a une école, des transports. Le Sud-Est est particulièrement significatif de l’explosion démographique.

Craignez-vous de nombreuses autres fermetures de classes ?
On a supprimé les réservoirs que constituaient les emplois spécifiques comme le Rased. Ces emplois aujourd’hui en moins, il n’y a plus de réserves sur lesquelles puiser pour éviter de supprimer des postes d’enseignant. Or, le gouvernement nous annonce des suppressions de postes dans l’Education. On s’oriente donc logiquement vers une baisse du nombre d’enseignants et une augmentation du nombre d’élèves par classe. L’Inspecteur d’Académie va avoir du mal à gérer l’avenir.

Une dernière question sur les cantines. êtes-vous, comme l’Etat, favorable au développement des cuisines centrales ?
J’ai bien profité des cantines scolaires, à une époque pas si lointaine où l’on faisait de la bonne cuisine traditionnelle. J’ai mal au cœur lorsque je vois que ce que l’on appelle « progrès » consiste à faire venir des barquettes et les passer au micro-onde. On se brûle et on ne sait pas ce qu’on mange. C’est une hérésie de parler, à ce niveau, de qualité. De plus, je ne suis pas certain que l’on fasse des économies. Avant, on faisait travailler le boulanger, le boucher du coin.
Au conseil général, on travaille sur le local et le saisonnier. Le bio en particulier. On fait travailler les gens au plus près de nous. On peut imaginer la même chose pour les cantines des petites écoles, effectivement, on peut faire des cuisines centrales, les partager avec une collectivité, une maison de retraite. Et faire de la cuisine traditionnelle.

http://www.route124.fr/Les-ecoles-rurales-ont-du-souci-a

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