Bernard Maris
Vous avez vu que l’Allemagne vient d’annoncer un plan d’économies de 80 milliards d’euros. Et comme dit ce stratège de Natixis : « La France est en train de décrocher : sa prime de risque a quasiment doublé vis-à-vis de l’Allemagne. » Les marchés mettent la pression. Natixis, vous savez, la banque d’affaires des banques populaires, des gens qui avaient perdu 2 milliards 622 millions d’euros en 2008, des fins connaisseurs des marchés, on peut leur faire confiance. C’est quoi les marchés d’ailleurs ? Les épargnants, les rentiers, les capitalistes, les créanciers, les prêteurs, tous ces gens qui ont de l’argent et qui veulent en faire un peu plus et pour qui travaillent les banques et les financiers. Donc les marchés c’est les détenteurs de capitaux, les capitalistes. Ils exigent une prime de risque plus forte pour la dette estampillée France que celle estampillée Allemagne.
Donc ça coûte plus cher d’emprunter en France qu’en Allemagne. Mais rassurez-vous, (ou plutôt inquiétez vous) ça coûte beaucoup plus cher d’emprunter en Grèce : alors qu’on empruntait en France à 3-4% ces malheureux grecs empruntaient jusqu’à 12% et plus. Mais le plus beau de l’histoire, le voilà : les banques qui achètent les dettes publiques, le font avec du bel et bon argent que leur a donné la Banque centrale européenne contre des créances pourries, autrement dit cadeau, ou plutôt prêt à 1%. Et avec cet argent prêté à 1% les banques achètent du papier qui rapporte 3, 4, 10 ou 12%.
Formidable non ? Elles pourraient prêter à la petite PME du coin, mais elles préfèrent acheter de la dette grecque, franchement, c’est beaucoup plus rentable.
Formidable non ? Elles pourraient prêter à la petite PME du coin, mais elles préfèrent acheter de la dette grecque, franchement, c’est beaucoup plus rentable.
Monsieur Trichet pourrait prêter directement aux états, mais il n'a pas le droit. Il faut qu’il passe par les banques, lesquelles, c’est humain, prennent leur petite ou grosse commission au passage. Pendant ce temps là, les grosses entreprises, en France et en Europe, prévoient des distributions record de dividendes. De sorte que les détenteurs d’action du CAC 40 – je n'ai pas dit les capitalistes parce que j’ai de bonnes manières – devraient percevoir 35.5 milliards d’euros cette année. Les analystes anticipent une hausse de 10% pour 2011 et 2012, de sorte que, nous sommes rassurés, le record de dividendes de 2007 devrait être retrouvé en 2012. Les entreprises auraient pu augmenter leurs salaires, voire investir, mais elles préfèrent geler de l’argent en le donnant à leurs actionnaires.
Et où va cet argent ? Il repart dans la dette grecque évidemment, qui rapporte beaucoup. Il va aussi dans l’or, dont le cours frise les 1300 dollars en ce moment. Là, c’est ce qu'on appelle de l’argent dans la lessiveuse : complètement gelé, il ne sert à rien. Sinon attendre que ça passe. Attendre que les entreprises créent de la richesse, par des brevets, des produits et du travail. Or voilà que les entreprises, pour répondre à la crise et au chômage, après leurs plans d’économie d’énergie, réduisent leurs plans de formation ! Très mauvaise nouvelle. Encore quelques années, et les possesseurs d’or, pour survivre, auront le loisir de le consommer à la vinaigrette.
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