L’OTAN évolue. D’une alliance face à l’URSS, elle est devenue un élément du bloc occidental, au même titre que l’Union européenne et les États-Unis (bien que ceux-ci en soient eux-mêmes le principal membre). Au-delà de la rhétorique lénifiante, le fait est que ce bloc est constitué par les anciennes puissances coloniales et qu’il déploie aujourd’hui ses troupes dans ses anciennes colonies. Rick Rozoff décrit ici la mise en œuvre progressive de cette domination globale inavouée.
Le sommet de l’OTAN (Srasbourg-Kehl) fut l’occasion d’officialiser le retour de la France au sein du commandement militaire intégré de l’Alliance Atlantique, instance dont elle s’était retirée il y a 43 ans. Il y fut également question de la modernisation du Concept stratégique de 1999 afin de mettre l’accent sur l’intégration militaire OTAN-UE-USA. Enfin, l’Union Européenne a annoncé sa volonté de créer une force opérationnelle de 60 000 hommes constituée notamment de contingents provenant des pays du Nord et capable d’être projetée rapidement à n’importe quel endroit du globe. Intéressons-nous donc aux conséquences qu’auront ces décisions sur les relations entre les principaux centres du pouvoir économique, politique et militaire de l’Occident : l’Union Européenne, l’OTAN et les États-Unis.
Jusqu’à présent, l’opinion prévalant au sein des milieux autorisés repose sur quatre oppositions erronées :
Le développement de capacités de défense toujours plus ambitieuses de la part de l’Union Européenne fait concurrence, voire pose un réel défi, à l’OTAN et à la stratégie d’alliance transatlantique.
L’OTAN constitue un contrepoids multilatéral à l’unilatéralisme américain.
L’Union Européenne est un ardent partisan de solutions diplomatiques et pacifiques quand Washington et l’OTAN se montrent souvent trop prompts à recourir à la force.
L’UE est l’un des concurrents des États-Unis, si ce n’est le principal, en Europe et de plus en plus à travers le monde.
Si chacun est libre de croire à ces idées reçues, celles-ci se voient contredites constamment par les propos et les actes des décideurs et responsables politiques en Europe et au sein de l’OTAN ainsi que par les stratèges de Washington.
Sur les 27 États-membres de l’UE, 21 ont également ratifié le Traité de l’Atlantique Nord. Les 6 autres, à l’exception de Chypre pour le moment, à savoir l’Autriche, la Finlande, l’Irlande, Malte et la Suède, sont membres du Partenariat pour la Paix de l’OTAN. Parmi ceux-ci, seul le minuscule État de Malte ne dispose pas d’un contingent déployé sous l’égide de l’OTAN en Afghanistan, dans les Balkans ou ailleurs dans le monde.
L’Alliance Atlantique est constituée pour une grande majorité d’États membres de l’Union Européenne, à l’exception de la Norvège, de l’Islande, du Canada et des USA, ces deux derniers n’appartenant pas au continent européen.
S’il arrive que ces trois acteurs majeurs se trouvent en désaccord sur des questions secondaires d’ordre tactique, technique ou de calendrier, ils n’en demeurent pas moins unis sur les principaux enjeux stratégiques.
L’UE et l’OTAN sont officiellement partenaires depuis 1992 et la signature de l’accord Berlin Plus sur la mise en commun des moyens de défense et de renseignement.
Les États membres de l’UE qui n’ont pas encore intégré l’OTAN se trouvent eux aussi affectés par la subordination de l’Europe à l’Organisation puisque la Charte Stratégique de l’Alliance, datant de 1999 et toujours en vigueur actuellement, stipule que les arsenaux nucléaires des USA en particulier, mais également du Royaume-Uni et de la France sont « essentiels au maintien de la paix » et constituent « un lien politique et militaire fondamental entre les membres de l’Alliance en Europe et en Amérique du Nord ».
Suite aux années 1989-1991 qui virent la fin de l’ordre instauré après la Seconde Guerre mondiale en Europe et dans le monde, la dissolution du Pacte de Varsovie et du CAEM (le Conseil d’Assistance Économique Mutuelle), l’effondrement de l’Union soviétique et la partition violente de la Yougoslavie, les principales puissances occidentales s’attelèrent à nouveau à leurs projets de domination mondiale interrompus par deux conflits mondiaux. En ayant tiré les enseignements, elles formèrent un condominium en vue de se partager les ressources du globe, non seulement celles des anciennes colonies, des protectorats et autres territoires sous mandat, mais aussi de régions qui leur étaient restées jusqu’alors inaccessibles, comme l’ancienne URSS.
Pour preuve de cette affirmation, une déclaration du Secrétaire général de l’OTAN Jaap de Hoop Scheffer, il a quatre ans : « L’OTAN et l’UE effectuent de constants progrès dans la coordination du développement de capacités militaires modernes. Je suis convaincu que nous pouvons étendre cette coopération à de nouvelles zones représentant un intérêt pour notre sécurité commune où nous pouvons mettre en valeur notre complémentarité et unir nos efforts. Je veux ici parler de zones clés … telles que le Caucase et l’Asie Centrale. » [1]
Deux mois plus tard, Nicholas Burns, le sous-secrétaire d’État US d’alors, nommé à ce poste après avoir servi comme ambassadeur de Washington auprès de l’OTAN, abonda dans ce sens en se félicitant « de l’appel lancé par le Secrétaire général de l’OTAN Jaap de Hoop Scheffer, à intensifier la coopération entre l’Alliance atlantique et l’UE en vue de garantir la sécurité au-delà des frontières de l’OTAN en Europe, en Afrique et en Asie Centrale. » [2]
Burns a ensuite expliqué la répartition des tâches, telle que conçue à Washington du moins : « Soyons clairs. L’OTAN assure le gros des opérations militaires mais l’Union Européenne se charge du maintien de la paix … » [3]
Au cours d’une conférence sur la sécurité européenne qui se tenait le mois suivant à Berlin, le ministre de la Défense allemand de l’époque Peter Struck enfonça le clou, déclarant qu’il serait « illusoire de concevoir le développement des capacités de défense européennes indépendamment du cadre de l’OTAN » et ajoutant : « l’OTAN et l’UE travaillent actuellement dans le but d’être mieux à même de mener des missions hors de leurs frontières pour s’adapter à des enjeux de sécurité en constante mutation. » [4]
En d’autres termes, l’Union Européenne et l’OTAN considèrent le reste du monde, à l’exception du continent américain traditionnellement vu comme la chasse gardée des USA (encore que certains membres de l’OTAN y interviennent individuellement ou conjointement) comme un théâtre d’opérations légitime.
Cette nouvelle évolution significative par rapport à la situation d’avant 1991 constitue une forme de régression, une résurgence des ambitions coloniales des puissances européennes, le retour de la diplomatie du canon et des baïonnettes destinées à civiliser les « sauvages ».
Le tournant de l’après-Guerre froide a ainsi transformé l’Europe en substance, la ramenant, ainsi que l’Occident en général et toute la sphère d’influence de l’OTAN, à la situation d’avant 1939 voire au XIXe siècle qui connut l’apogée des empires coloniaux européens.
Officieusement, les grandes puissances occidentales ont en effet créé un ordre comparable à celui instauré par les congrès de Vienne en 1815 et de Berlin en 1878.
Le premier eut lieu à la fin des guerres napoléoniennes, peu avant la défaite de Waterloo, et ouvrit la voie à la création de la Sainte Alliance qui devait garantir que jamais plus les idéaux républicains ne feraient vaciller les trônes d’Europe.
Le tournant de 1991 a relancé la lutte contre l’idéologie républicaine, visant cette fois le communisme, les différentes variantes du socialisme ainsi que tout mouvement ou parti politique revendiquant la défense des intérêts des populations, à l’intérieur comme en dehors des frontières de l’Europe, contre les élites internationales dites « euro-atlantistes ».
Le second modèle, celui défini par la Congrès de Berlin, initia le processus de redécoupage des États de la péninsule balkanique et de partition de l’Afrique qui devaient débuter véritablement six ans plus tard à la Conférence de Berlin.
Il est inutile de s’attarder sur les similitudes entre cette époque et les événements récents tant celles-ci semblent évidentes.
La Conférence de Berlin, qui réunit des représentants d’Autriche-Hongrie, de Belgique, de Grande-Bretagne, du Danemark, de France, d’Italie, des Pays-Bas, du Portugal, de Prusse, d’Espagne et de Suède-Norvège, organisa avec le plus absolu cynisme le pillage et le sac du continent africain, notamment le bassin du Congo et la région des Grands Lacs.
Elle dessina également les modèles d’offensives militaires et économiques menées conjointement par les puissances occidentales contre des populations quasiment sans défense, schéma qui devait se répéter en Asie en 1900, lorsque des troupes austro-hongroises, belges, françaises, allemandes, italiennes, japonaises, russes et états-uniennes envahirent la Chine pour mettre un terme à la révolte des Boxers et protéger les intérêts économiques occidentaux.
Pour démontrer la pertinence de ce parallèle, voici ce qu’écrivirent George Robertson et Paddy Ashdown dans les colonnes du Times de Londres en juin dernier « la collaboration multilatérale au niveau européen doit … mettre davantage l’accent sur les questions de défense si elle veut être réellement crédible. Il faut accélérer la constitution d’unités de combat au sein de l’UE, compatibles avec les forces de l’OTAN, et formant la base d’une force anti-insurrectionnelle européenne capable d’intervenir dans des États en proie à la guerre civile ou dans un contexte post-conflictuel. » [5]
Point culminant de cette plaidoirie, cette analyse aussi abrupte qu’édifiante : « Pour la première fois depuis plus de 200 ans, le monde qui se dessine n’est plus intégralement dominé par l’Occident. Si nous voulons influer sur cet environnement plutôt que nous retrouver à sa merci, si nous voulons nous attaquer à certaines menaces liées à la mondialisation, alors un multilatéralisme concret s’impose … »
Que l’on considère ou non comme une nécessité cette volonté des principales puissances occidentales et de leur classe dominante de conserver, reconquérir ou étendre la domination mondiale, leur plan n’en constitue pas moins une véritable stratégie.
Contrairement aux élucubrations d’obscurs universitaires s’évertuant à redessiner le monde depuis le silence feutré de leur bibliothèque, ces déclarations ont eu les honneurs du Times car leurs auteurs ne sont en aucun cas des théoriciens, historiens ou penseurs politiques de second ordre.
Ils sont au contraire les principaux architectes et les exécutants sans pitié de l’ordre qu’ils défendent. Ils ont fait leurs preuves dans l’après-Guerre froide, ou, selon ce qui pourrait être leurs propres termes, dans ce laboratoire postmoderne que furent les Balkans aux cours des années 1990.
Lord George Robertson, ancien ministre britannique de la Défense, membre à vie de la Chambre des Lords et Baron de Port Ellen, fut Secrétaire général de l’OTAN de 1999 à 2004, succédant à Javier Solana, lequel fut par la suite nommé Haut Représentant pour la Politique Étrangère de Sécurité Commune et Secrétaire général du Conseil de l’Union Européenne et de l’Union de l’Europe Occidentale, ce qui équivaut au poste de ministre des Affaires étrangères de l’UE.
Paddy Ashdown fut Haut Représentant international pour la Bosnie-Herzégovine de septembre 2002 à mai 2006 où il se distingua par des méthodes arbitraires, despotiques et impitoyables qui lui valurent le surnom de « vice-roi », justifié en partie parce qu’il était le fils d’un ancien officier de l’Armée des Indes et parce que lui-même incarnait par son style le colonialisme passé et sa résurgence moderne.
Il y a près de quatre ans, la Commission internationale pour les Balkans, créée à l’initiative notamment du German Marshall Fund émit une critique virulente de la politique de l’Union Européenne et des Nations Unies dans les Balkans.
« La commission estime que la démocratie a été bafouée en Bosnie « par l’autorité coercitive » de Paddy Ashdown, le Haut Représentant de l’UE ».
Selon la commission, « les représentants internationaux se mêlent d’ingénierie sociale mais ne rendent aucun compte en cas d’échec de leur politique. Si les usages néocoloniaux des Européens se poursuivent, cela engendrera un mécontentement économique … » [6]
L’an dernier, comme pour le récompenser des faits évoqués, Ashdown se vit confier la succession des anciens maîtres de son père sur le sous-continent indien, un rôle que la presse qualifia à l’époque de « super-émissaire » en Afghanistan et qu’un quotidien britannique décrivit avec une certaine admiration : « Lord Ashdown serait chargé d’unifier les efforts de l’OTAN et des Nations Unis en Afghanistan. Pour cette mission de la plus haute importance, sa candidature devrait recevoir l’appui des responsables de l’OTAN. » [7]
Le gouvernement afghan témoigna moins d’enthousiasme que les partisans d’Ashdown et celui-ci vit finalement sa candidature rejetée, une preuve de l’esprit très « prémoderne » du peuple afghan (pour une définition du terme, voir plus bas).
Car, que le gouvernement de Kaboul ait été ou non informé des antécédents d’Ashdown, aux yeux des Afghans, celui-ci incarnait une version « postmoderne » de l’ancien diplomate britannique et éminence grise de Tony Blair en matière de politique étrangère Robert Cooper.
L’éminence grise en question est l’auteur de deux ouvrages, The Post-Modern State and the World Order (2000) et The Breaking of Nations : Order and Chaos in the Twenty-First Century (2003) et a contribué au premier ouvrage de la collection « Re-Ordering the World » The Long-Term Implications of September 11 (2002).
Cooper est considéré comme le père du « nouvel impérialisme libéral » et fut brièvement le représentant spécial de Tony Blair en Afghanistan suite à l’invasion de 2001.
Tout comme Robertson et Ashdown, il a joué un rôle dans l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies et de politiques impérialistes.
Dans son premier livre, The Post-Modern State and the World Order, il classait les pays du monde en trois catégories : les prémodernes, les modernes et les postmodernes, une distinction qui, malgré une formulation légèrement différente, renvoie à la tendance des ses prédécesseurs à diviser le monde entre populations civilisées et sauvages.
Des variantes de cette conception du monde sont réapparues en Occident après la fin la Guerre froide et le nouvel ordre international qui s’est imposé par la suite a permis aux grandes puissances occidentales de se contenter de vagues engagements quant au respect de la majorité nouvellement émancipée de la population mondiale et de ses cultures, souvent plus anciennes et précieuses que celles des anciens colonisateurs et de leurs alliés nord-américains.
Après s’être vu refuser la possibilité de perpétrer la tradition familiale en Afghanistan, Ashdown devint le bras droit de Javier Solana en acceptant la charge de directeur général des affaires politiques et militaires auprès du Secrétariat général du Conseil de l’Union Européenne, position qu’il occupe encore à ce jour.
Cooper est également connu pour son rôle essentiel dans la création de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense (PESD), présentée initialement comme Identité Européenne de Sécurité et de Défense lors du sommet des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN à Berlin, en 1996, où il fut convenu que l’Union de l’Europe Occidentale (UEO) superviserait sa création au sein des structures de l’OTAN.
La PESD est aujourd’hui dirigée par le Haut Représentant de l’Union Européenne pour la Politique Étrangère et de Sécurité Commune, Javier Solana, dont le principal collaborateur n’est autre que Robert Cooper. La PESD fut mise à l’épreuve pour la première fois en Macédoine en 2003 quand elle prit la succession de l’OTAN et demeure le principal outil de défense de l’UE.
Seconde victime de la campagne de Yougoslavie de l’OTAN en 1999, la Macédoine fut une première en matière de prise de relai par l’UE des missions d’occupation et de répression de l’OTAN, la force EUFOR Concordia succédant à l’Opération Allied Harmony.
En 2004, l’OTAN céda un nouveau protectorat à l’UE : la Bosnie, où la force de stabilisation SFOR fut remplacée par l’opération EUFOR Althea.
En 2008, l’Alliance Atlantique débuta le transfert du commandement de la KFOR (Kosovo Force), conformément à la résolution 1244 de l’ONU, à la mission EULEX de l’UE, entraînant une vive condamnation de la part de la Serbie et de la Russie.
En novembre de la même année, l’OTAN transmit les rênes de l’opération navale de grande ampleur EUNAVFOR Atalanta dans le Golfe d’Aden et au large de la corne de l’Afrique à l’Union Européenne, ce qui fut décrit comme « une grande première pour l’UE car elle se déroule loin du continent européen … L’opération Atalanta est un projet ambitieux. La zone maritime à contrôler est énorme… » [8]
Ces « missions de civilisation » menées conjointement par l’UE et l’OTAN dans des « zones de non droit » sont en constante expansion dans le monde prémoderne et moderne.
En février de cette année, le président du Comité militaire de l’OTAN Giampaolo Di Paola développa l’idée d’une mission trilatérale UE-OTAN-USA en arguant de « la nécessité d’une nouvelle forme de gouvernance au sein de laquelle l’OTAN, l’UE et d’autres grandes organisations internationales auront un rôle à jouer ». [9]
Quel type de gouvernance mondiale ? Qui sont censés en être les gardiens autoproclamés ? Voilà qui justifie une étude approfondie. Les dirigeants de Bruxelles et de Washington évoquent fréquemment une « communauté internationale » quand l’expression cadre avec leurs discours, et ignorent aussi régulièrement les demandes de la véritable communauté des nations dans le cas contraire.
La population totale des 27 États membres de l’Union Européenne n’excède pas 500 millions d’habitants, soit moins du douzième de la population mondiale.
Si l’on y ajoute la population des États membres de l’OTAN hors UE, les USA, dont les 300 millions d’habitants représentent l’équivalent de 40 % de la population intra-communautaire, le Canada, la Norvège et l’Islande, le total dépasse à peine 800 millions d’âmes, soit moins du septième de la population mondiale.
Les principaux membres de l’UE et de l’OTAN sont les anciennes puissances coloniales : la Grande-Bretagne, la France, l’Espagne, le Portugal, les Pays-Bas et le Danemark ; au nombre des nations s’étant également taillé une « place au soleil » figurent la Belgique, l’Italie et l’Allemagne.
À partir de missions commerciales qui consistèrent rapidement en l’instauration de monopoles avant d’impliquer une occupation militaire pour aboutir à une complète domination économique, politique et militaire, les grandes puissances occidentales s’attribuèrent d’immenses territoires en Asie, en Afrique, en Amérique et en Océanie dont elles firent leurs prés carrés et leurs zones d’influence respectives.
Vestiges de cette époque, de nombreux États membres de l’OTAN et de l’UE conservent des possessions territoriales, principalement des îles et des terres volées aux indigènes.
Parmi ceux-ci, citons la Grande-Bretagne, la France, les Pays-Bas, l’Espagne, le Portugal, le Danemark et les USA.
Ce sont justement ces États qui dénient à tout autre, y compris en Europe, le droit d’exercer une influence sur des régions n’ayant pas fait partie intégrante de leur territoire depuis plusieurs siècles, c’est par exemple le cas de la Serbie avec le Kosovo ou de la Russie avec l’Ukraine.
Les grandes puissances occidentales sont également coupables d’avoir organisé la traite négrière, le plus vaste déplacement forcé de population de toute l’histoire avec entre 10 et 30 millions d’individus déportés de l’autre côté de l’Atlantique entre le XVIe et le XIXe siècle.
Parmi les pays coupables de ce commerce triangulaire figurent la Grande-Bretagne, la France, l’Espagne, le Portugal, les Pays-Bas, le Danemark et, plus tard, les États-Unis.
C’est l’un des fondements obscurs de la communauté transatlantique.
Si des termes et concepts obsolètes et discrédités tels que le « Fardeau de l’homme blanc, » la « Destinée manifeste », une « place au soleil », l’« espace vital » ou un « empire sur lequel le soleil ne se couche jamais » ne sont plus d’usage aujourd’hui, la conception du monde et les objectifs géopolitique qui les sous-tendaient ont bel et bien survécu, ils ont simplement été dépoussiérés et rebaptisés.
Les forces militaires occidentales sont à nouveau présentes sur les territoires qu’elles occupaient jadis et où on ne pensait plus jamais les revoir : les Britanniques présents en Afghanistan, en Irak et en Sierra Leone, les Français intervenant en Haïti, alors que le pays fêtait le bicentenaire de son indépendance, et en Côte d’Ivoire et les États-uniens aux Philippines.
Mais il ne s’agit pas d’une série d’actions isolées menées par les puissances occidentales alliées, ce qui apparaît c’est un réseau international et systématique de déploiements militaires planifiés et coordonnés au service d’objectifs géostratégiques aussi vastes que précis.
Malgré la désapprobation très largement médiatisée que suscita la seconde guerre du Golfe en 2003, les 26 États membres de l’Alliance atlantique ont tous dépêché des personnels en Irak et au Koweït voisin dans le cadre d’une mission d’entraînement de l’OTAN (NTM-I).
Moins de deux ans après le début de l’invasion, l’Alliance annonçait que « le but de l’OTAN est de former cette année un millier d’officiers et d’officiers supérieurs » et que « l’Union Européenne a consenti à former 700 juges, procureurs et gardiens de prison irakiens ». [10]
Plus tard en 2005, Victoria Nuland, l’ambassadrice des Éta ts-Unis auprès de l’OTAN d’alors, ancienne conseillère de Dick Cheney pour les questions de sécurité, déclara : « Nous devons mettre un terme définitif aux rivalités, certaines réelles, d’autres imaginaires, pouvant exister entre l’UE et l’OTAN ».
Selon un site militaire, elle aurait insisté sur la nécessité que « l’OTAN et l’Union Européenne établissent une collaboration plus étroite que par le passé pour faire face à l’ensemble des défis militaires, politiques, d’équipement et de financement auxquels est confronté la communauté de défense transatlantique… » [11]
Le premier ambassadeur US nommé en Afghanistan suite à l’invasion de 2001, James Dobbins, qui dirigeait jusqu’alors l’International Security and Defense Policy Center (ISDP) à la Rand Corporation (un think tank US), exprima une opinion similaire en indiquant : « Il est donc grand temps de cesser de se demander ce que l’OTAN peut faire pour l’UE et de commencer à s’interroger sur ce que l’UE peut apporter à l’OTAN. Et l’Afghanistan est l’endroit tout désigné pour commencer. Les meilleurs résultats ne pourront être obtenus que dans une discussion tripartite impliquant l’OTAN, l’UE et les États-Unis. » [12]
Preuve supplémentaire du fait que l’influence du triumvirat UE-OTAN-USA s’étend bien au-delà des frontières de l’Europe, un mois après les déclarations de Dobbins, Julianne Smith, directrice adjointe des programmes de sécurité internationale au sein du think tank Center for Strategic and International Studies, exprima les regrets suivants lors d’une conférence organisée par le CSIS : « Oui, ils traitent de la situation dans les Balkans mais ça n’est pas encore assez. L’OTAN et l’UE devraient travailler sur la non-prolifération, sur le Caucase, l’Ukraine, la Moldavie – sur le problème dans son ensemble. » [13]
Au cours de la même conférence, Klaus Naumann, ancien directeur du Comité militaire de l’OTAN, en dit peut-être plus qu’il ne l’aurait souhaité en déplorant que « l’Europe soit à nouveau en proie à ses vieilles tentations souverainistes », signifiant ainsi que l’attachement à son pays et à son peuple constitue un obstacle à la consolidation de la domination de l’OTAN et de l’UE en Europe et au-delà. [14]
Le mois suivant, l’ancien Secrétaire général de l’OTAN Javier Solana déclara que la construction d’une défense européenne capable de se déployer à tout point du globe n’avait pas vocation « à remplacer l’OTAN » mais plutôt « à devenir un acteur international plus puissant et mieux à même de constituer un réel partenaire pour les USA », citant les Balkans comme la véritable épreuve de vérité pour le triumvirat « grâce à nos efforts conjoints, avec l’OTAN et les États-Unis… » [15]
Le mois suivant, Klaus Naumann signa un éditorial dans lequel il exigeait que « L’UE prenne les mesures nécessaires pour améliorer ses capacités de conduite des opérations. Les nouvelles unités de l’UE doivent être renforcées par des entraînements réguliers, en adoptant les standards de l’OTAN de préférence… » [16]
Dans le même article, il insistait sur le fait que « les deux organismes élargissent leur coopération stratégique au-delà de la péninsule des Balkans et de l’Afghanistan » et reprenait à son compte les recommandations de Julianne Smith selon lesquelles l’UE et l’OTAN doivent étendre leur champ d’action à d’autres « régions, telles que l’Ukraine ou la Moldavie ». [17]
L’intégration des activités de l’UE et de l’OTAN dans les domaines militaire et de politique étrangère a continué à se développer à un rythme soutenu pendant des années jusqu’à atteindre son paroxysme au sommet de l’OTAN de Bucarest, en avril 2008.
Au cours de ce sommet « la représentante permanente de Washington auprès de l’OTAN Victoria Nuland déclara que la condition du renforcement de l’OTAN était la construction d’une Union Européenne plus forte ». [18]
Un quotidien roumain rapporta : « Un haut responsable états-unien a récemment souligné le fait que, loin d’être vue comme une menace pour l’OTAN, la Politique Étrangère et de Sécurité Commune (PESC) consolidée est une nécessité absolue… » [19]
C’était alors la France qui présidait l’Union Européenne et le président Nicolas Sarkozy s’afficha comme le plus ardent défenseur d’un axe UE-OTAN-USA au sommet de Bucarest.
Même s’il n’en fut pas le seul : « Le président George W. Bush a approuvé jeudi l’idée selon laquelle l’Europe devait bâtir sa propre capacité de défense », a déclaré le président français Nicolas Sarkozy, évoquant un « tournant historique ».
« Le soutien de Bush à une Europe de la défense, selon les termes de Sarkozy, a été exprimé lors d’un sommet des responsables de l’OTAN à Bucarest… » [20]
Dans son discours, Bush répétait une nouvelle fois que « l’OTAN n’est plus une alliance statique… C’est aujourd’hui une alliance expéditionnaire qui projette ses forces sur l’ensemble du globe… » [21]
Son allocution comportait également la désormais traditionnelle dénonciation de l’ordre qui régna en Europe après la Seconde Guerre mondiale : « J’ai indiqué que l’Europe devait surmonter l’héritage amer de Yalta et effacer les frontières artificielles qui ont divisé ce continent pendant trop longtemps ». [22]
Au sujet des relations euro-américaines, une source roumaine a rapporté que « la nature des échanges transatlantiques connaît une mutation profonde en vue de s’adapter au nouveau contexte post-Guerre froide et de préparer une nouvelle forme de partenariat mondial ». [23]
La veille, la même source citait les propos de l’ancien ministre des Affaires étrangères roumain Mircea Geoana : « Ce que nous attendons de ce sommet, c’est … l’émergence d’une nouvelle alliance du XXIe siècle ». [24]
À la fin du sommet, dénonçant une usurpation des fonctions de l’ONU par l’OTAN, le ministre des Affaires étrangères russe Sergei Lavrov déclara : « Ils tentent … de constituer une nouvelle union mondiale autour d’un noyau dur occidental qui s’arrogerait quasiment toutes les prérogatives de l’ONU. » [25]
Avec la France dans le rôle du principal intermédiaire, puisqu’elle assumait alors la présidence de l’Union et avait fait connaître son intention de réintégrer le commandement militaire de l’OTAN, l’intégration militaire UE-OTAN-USA connut un développement sans précédent au cours de l’année écoulée.
Dans une dépêche en date du 10 novembre, le ministre de la Défense français Hervé Morin se félicitait du « renforcement des capacités militaires de l’UE, une condition indispensable à la réintégration de la France au sein de l’OTAN ». [26]
Au cours d’un conseil des ministres européens de la Défense (où la plupart des participants arboraient à la fois les couleurs de l’UE et celles de l’OTAN), Morin donna une idée du rythme de développement de ces capacités : « Je peux vous annoncer qu’au 10 novembre … nous avons effectué des progrès considérables, probablement autant que nous en avions accompli en 10 ans ». [27]
Dans le même temps, Jean-François Bureau, secrétaire général adjoint de l’OTAN, chargé des relations publiques, déclarait que « 21 des 27 états membres de l’UE sont aussi membres de l’OTAN et ces deux organisations agissent conjointement sur les théâtres d’opérations ».
« Du point de vue de l’OTAN, un besoin de coopération accru [avec l’UE] se fait sentir … sur les questions militaires. » [28]
La même source indiquait que, comme en Irak, des personnels militaires de l’UE s’entraînent aussi en Afghanistan.
En décembre dernier, une déclaration préliminaire du Conseil de l’Europe sur le développement des capacités de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense [PESD] réaffirmait l’objectif principal : « renforcer le partenariat stratégique entre l’UE et l’OTAN … » [29]
Selon une autre source, les dirigeants de l’UE ont signé une déclaration commune dans laquelle ils « conviennent de la nécessité de renforcer et d’optimiser les capacités de défense et souhaitent collaborer plus étroitement avec l’OTAN ». [30]
Un autre article daté du même jour rapporte en substance les propos du président français Nicolas Sarkozy qui aurait déclaré : « les USA ont cessé de considérer la PESD comme une politique agressive à l’encontre de l’OTAN, le président sortant George W. Bush et le président élu Barack Obama approuvent à présent tous deux la politique de l’UE ».
Il aurait également ajouté : « Il ne s’agit pas de choisir entre les USA et la PESD. Les deux vont de paire ». [31]
Le 9 décembre, le ministre des Affaires étrangères David Miliband et son homologue français Bernard Kouchner ont signé une déclaration commune dans laquelle ils confirment le rôle de soutien de l’UE dans le cadre des engagements militaire des USA et de l’OTAN dans le sud du Caucase ainsi que le caractère interchangeable des rôles joués par l’Union et l’Alliance : « L’Union Européenne a mandaté plus de 200 observateurs civils en Géorgie. Ils sont arrivés quelques semaines après le début des hostilités… (…) Il n’y a pas d’armée européenne à proprement parler ; de même qu’il n’y a pas d’armée de l’OTAN (…) Il existe des armées nationales, qui sont employées, selon les besoins, pour des opérations nationales ou multilatérales, dans le cadre d’initiatives européennes ou de l’OTAN. » [32]
À l’aube du sommet anniversaire des 60 ans de l’OTAN des 3 et 4 avril à Strasbourg et Kehl, le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel ont publié une tribune commune dans Le Monde, appelant à une collaboration et à une intégration plus approfondies entre l’UE et l’OTAN.
A la Conférence annuelle pour la Sécurité qui s’est tenue à Munich le 7 février dernier, le ministre des Affaires étrangères britannique David Miliband a lui aussi appelé à une meilleure intégration des politiques et des actions de l’OTAN et de l’UE et a rappelé la clause d’assistance mutuelle de l’OTAN : « L’OTAN apporte sa contribution à la défense collective. L’article 5 et l’intégration des structures militaires garantissent à chaque allié l’inviolabilité de ses frontières. » [33]
Une source allemande a ainsi rapporté le contenu du discours du vice-président états-unien Joe Biden : « Les Américains veilleront scrupuleusement à ce que le bras de fer avec Téhéran ne vire pas à un affrontement entre l’Iran et les seuls États-Unis. » Le message délivré par Biden à Munich est le suivant : « Chaque pays membre de l’OTAN et chaque État membre de l’UE se trouve désormais impliqué. Tel est le prix de l’ouverture et de la nouvelle coopération transatlantique. ». [34]
En d’autres termes, tous les pays membres de l’OTAN sont liés aux USA par les dispositions de l’article 5, article qui fut invoqué et appliqué pour la première fois après le 11 septembre 2001, et l’UE est aujourd’hui si étroitement connectée à l’OTAN qu’elle se trouve liée par chacune de ses décisions, ainsi que par celles des USA.
Depuis le début de l’année, la République Tchèque assure la présidence de l’Union Européenne.
Lors d’une émission intitulée « Vondra appelle à l’unité de l’UE et de l’OTAN sur la question de la Russie, des missiles et du gaz », le vice-Premier ministre Alexandr Vondra emporta l’adhésion de ses compatriotes sur l’implantation d’une base radar du dispositif anti-missile états-unien en déclarant « Les Européens et les Américains doivent bénéficier du même niveau de sécurité … il est donc essentiel de développer ce système de défense anti-missile. ». [35]
Il n’est pas difficile de comprendre les mécanismes en jeu : l’UE a atteint un tel degré d’intégration que ses décisions politiques, militaires et de sécurité se confondent avec celles de l’Alliance et, étant que donné que, plus qu’un simple membre, les USA sont le fondateur de l’OTAN, l’UE est donc inextricablement impliquée et soumise à la politique de Washington.
Mi-février, le speaker de la Chambre des Représentants Nancy Pelosi s’est rendue en Italie où elle a pris à parti les dirigeants européens au sujet de la guerre en Afghanistan en ces termes : « Nous devons définir nos priorités… L’Italie, l’Union Européenne, les États-Unis, l’OTAN, nous devons tous nous demander où se situent nos intérêts en matière de sécurité… » [36]
Deux jours plus tard, l’Italie annonçait l’envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan.
Réunies sous la bannière de l’OTAN, les puissances occidentales se sont arrogé une légitimité pour s’ingérer dans les affaires régionales et internes de pays situés en tout point du globe et le droit exclusif d’employer la force hors de leurs frontières.
Bien qu’il leur arrive de faire appel aux Nations Unies dans le cas d’une offensive contre un état ciblé ou pour justifier une guerre, en amont ou en aval, les dirigeants occidentaux ne reconnaissent aucun rôle à des organisations comme le Mouvement des Non-Alignés (114 membres), l’Union africaine (53 membres), l’Organisation des États Américains (33 membres), la Ligue Arabe (23 membres), l’Organisation de la Conférence Islamique (57 membres), la Communauté des États Indépendants et l’Organisation du Traité de Sécurité Collective, l’organisation de Coopération de Shangaï ou encore l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est.
Elles ne leur reconnaissent aucune légitimité à traiter les défis planétaires ou même à jouer un rôle local ou régional pour le futur des populations de leurs états membres.
Dès lors, comment s’étonner si certains voient dans l’OTAN l’Ordre Teutonique des Aryens du Nord…
En février, des pressions se firent sentir lors d’une session du Parlement Européen en vue de poursuivre l’intégration au sein de l’OTAN.
Ari Vatanen, un parlementaire représentant la France, fut l’un de ceux désignés pour cette mission. Il déclara que l’UE « ne pourra réellement optimiser son potentiel qu’en développant de forts liens transatlantiques et une relation de complémentarité avec l’OTAN ».
Ce à quoi l’eurodéputé allemand Tobias Pfluger répondit : « Tous les efforts visant à renforcer l’OTAN par une collaboration plus étroite avec l’UE accroissent les risques de conflits internationaux. Ils contribueront également à accélérer la militarisation de la politique étrangère européenne et la tendance à recourir à la force au lieu de « résoudre » les conflits ». [37]
Les positions de Vatanen et de Pfluger ne sont pas simplement opposées, elles s’excluent mutuellement, dans la mesure où aucune ne peut s’accommoder de l’autre et où elles constituent les deux seules alternatives. Il n’y a ni juste milieu ni troisième voie.
L’Europe, comme le monde dans son ensemble, peut décider de laisser croître cette domination en renforçant son alliance militaire internationale, outil de son expansionnisme agressif, le plus important de l’Histoire, ou elle peut choisir de s’organiser en vue de son démantèlement.
[1] NATO International, 31 mars 2005.
[2] Associated Press, 26 mai 2005.
[3] Ibid.
[4] Deutsche Welle, 13 avril 2005.
[5] The Times, 12 juin, 2008.
[6] International Herald Tribune, 29 avril 2005.
[7] The Telegraph, 6 décembre 2007.
[8] Radio Netherlands, 21 novembre 2008.
[9] ADN Kronos International [Italie], 13 février 2009.
[10] San Francisco Chronicle, 21 mars 2005).
[11] Defense News, 23 septembre 2005.
[12] International Herald Tribune, 30 septembre 2005.
[13] Defense News, 14 octobre 2005.
[14] Ibid.
[15] Defense News, 10 novembre 2005.
[16] Daily Times [Pakistan], 1er décembre 2005.
[17] Ibid.
[18] Der Spiegel, 1er avril 2008.
[19] Nine O’Clock News, 31 mars 2008.
[20] Deutsche Presse-Agentur, 3 avril 2008.
[21] USA Today, 1er avril 2008.
[22] Ibid.
[23] Nine O’Clock News, 3 avril 2008.
[24] Nine O’Clock News, 2 avril 2008.
[25] Interfax, 17 avril 2008.
[26] Agence France-Presse, 10 novembre 2008.
[27] Ibid.
[28] United Press International, 12 novembre 2008.
[29] Irish Times, 11 décembre 2008.
Le même communiqué précisait : « Les responsables de l’UE doivent également approuver une déclaration relative au renforcement des capacités de la PESD, qui définira de nouveaux objectifs pour l’EU comme le déploiement de 60 000 hommes dans un délai de 60 jours et de milliers de personnels civils dans le cadre d’une dizaine de missions simultanées ». [[Ibid.
[30] Deutsche Presse-Agentur, 12 décembre 2008.
[31] EUobserver, 12 décembre 2008.
[32] United Kingdom Foreign and Commonwealth Office, 9 décembre 2008.
[33] United Kingdom Foreign & Commonwealth Office, 7 février 2009.
[34] Der Spiegel, 9 février 2009.
[35] Deutsche Presse-Agentur, 7 février 2009.
[36] Agence France-Presse, 16 février 2009.
[37] Parlement Européen, 17 février 2009.
voltairenet.org - 22.04.09
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