Marc Laimé
Le quotidien berlinois Tageszeitung (TAZ) a publié dans son édition du samedi 30 octobre 2010 un contrat secret signé entre les autorités du Land et la transnationale française Veolia. Il assure à cette dernière depuis 1999 des bénéfices colossaux garantis par des clauses confidentielles, toujours en vigueur, alors même que leur illégalité avait été dénoncée dès 1999 par la Cour constitutionnelle. L’affaire fait grand bruit à Berlin, où 265 000 citoyens viennent de signer une pétition demandant l’annulation de ces contrats secrets, désormais rendus publics.
Il y a douze ans, le Land de Berlin a privatisé ses entreprises de gestion de l’eau au profit de Veolia et du conglomérat allemand RWE. Depuis, les tarifs de l’eau ont explosé ; mais jusque là, le Land, comme Veolia et RWE, avaient réussi à garder secrète la base contractuelle de ces augmentations de prix. Organisé à l’initiative de la Grüne Liga de Berlin, un referendum d’initiative populaire, le « Berliner Wassertisch », réclamait la publication puis l’annulation du contrat secret. A l’issue de la seconde étape du referendum, 265 400 signatures avaient été recueillies à la date du 27 octobre à 13 heures. Soit davantage que les 172 000 signatures requises pour obtenir la tenue d’un vote officiel sur la publication du contrat.
Le contrat et ses clauses confidentielles ont ainsi été publiés le samedi 30 octobre par la TAZ.
Une première pour le quotidien historique de l’extrême-gauche et de la scène alternative berlinoise, qui a créé depuis le début du mois de septembre dernier un dispositif qui rappelle celui de WikiLeaks. La rédaction a désigné un interlocuteur central pour les informateurs qui veulent lui transmettre des documents explosifs sur la vie interne des institutions ou des entreprises [1].
« Parce que de telles personnes courent des risques considérables si leur nom est divulgué, nous assurons un plein anonymat. Cette confidentialité était primordiale pour la personne qui nous a transmis les contrats secrets de la privatisation de l’eau », précise la TAZ.
L’enquête de la TAZ révèle comment le gouvernement du Land a accordé aux entreprises privées une garantie de profit que même la Cour constitutionnelle du Land ne pouvait pas remettre en cause. Sur cette base, Veolia et RWE engrangent depuis lors chaque année des centaines de millions d’euros.
En 1999, le Land de Berlin avait vendu 49,9 % du capital de son entreprise publique d’eau à Veolia et RWE pour un montant de 3,3 milliards de marks, donnant naissance à Berlinwasser holding AG.
L’ancienne « entreprise locale gérée bureaucratiquement » étant dès lors vouée à devenir une « utilities », qui opère dans d’innombrables champs d’activité, et sert surtout de « faux nez » allemand à Veolia dans le reste du monde…
Le sénateur démocrate-chrétien Elmar Pieroth déclarait devant la Chambre des députés à propos des entreprises d’eau : « Faisons-les travailler encore plus professionnellement, et ainsi les travailleurs de ces entreprises profiteront de postes de travail encore plus sûrs, rénovés et mieux payés, mais nous donnerons aussi une chance à d’autres qui cherchent un travail à Berlin. »
Le leader du parti social démocrate (SPD), M. Klaus Böger, avait rétorqué qu’il est « déloyal » de la part de l’opposition de constamment jouer « avec les craintes, les préoccupations et les besoins pressants des gens à propos des postes de travail ».
Les inquiétudes des opposants à la privatisation étaient plus que légitimes. Après la vente, les entreprises se sont radicalement débarrassées de leurs activités soumises à la concurrence, comme les télécommunications (Berlikomm) ou la valorisation des déchets (Schwarze Pumpe). Et se sont alors concentrées sur leur monopole : l’eau de Berlin. Au lieu des nouveaux postes de travail promis, le nombre d’emplois s’est réduit. On ne compte plus aujourd’hui que 5283 employés dans les services d’eau, y compris leurs filiales encore actives. En 1999, ils étaient encore 6265 personnes.
Les bénéfices ont par contre explosé dans le même temps, grâce à la « garantie de profit » que le Land a concédé à Veolia et RWE dans le contrat secret.
Les coûts de cette « garantie de profit » ont été inclus dans les tarifs de l’eau, et sont depuis lors supportés par les Berlinois.
Pourtant, dès 1999, la Cour constitutionnelle avait déclaré cette garantie de profit illégale. Car les contrats secrets stipulent que le Land de Berlin doit indemniser les actionnaires privés si cette « garantie de profit » n’est pas assurée par les bénéfices retirés de l’exploitation normale du service.
Pour y parvenir on a donc ponctionné les bénéfices du service d’eau, au détriment des finances du Land, qui en bénéficiait pleinement auparavant.
En 2004, le contrat initial a été modifié et ces clauses confidentielles, jusqu’alors accessibles, en ont été supprimées, mais reprises dans un protocole secret annexe.
Depuis lors, ce sont près de 40 % des services d’eau potable qui ont été, à l’identique, confiés au secteur privé en Allemagne, comme à Brême, Essen, Höxter, Gelsenkirchen, Dresde, Schwerin, Goslar, Cottbus ou Rostock. Autant de « privatisations de fait » dont les contrats n’ont encore été publiés nulle part.
Le dossier complet sur la privatisation de l’eau à Berlin et nombre d’autres textes ont été publiés dans le Sonntaz (l’édition dominicale du TAZ) du 30 octobre 2010.
Le contrat et ses clauses confidentielles ont ainsi été publiés le samedi 30 octobre par la TAZ.
Une première pour le quotidien historique de l’extrême-gauche et de la scène alternative berlinoise, qui a créé depuis le début du mois de septembre dernier un dispositif qui rappelle celui de WikiLeaks. La rédaction a désigné un interlocuteur central pour les informateurs qui veulent lui transmettre des documents explosifs sur la vie interne des institutions ou des entreprises [1].
« Parce que de telles personnes courent des risques considérables si leur nom est divulgué, nous assurons un plein anonymat. Cette confidentialité était primordiale pour la personne qui nous a transmis les contrats secrets de la privatisation de l’eau », précise la TAZ.
L’enquête de la TAZ révèle comment le gouvernement du Land a accordé aux entreprises privées une garantie de profit que même la Cour constitutionnelle du Land ne pouvait pas remettre en cause. Sur cette base, Veolia et RWE engrangent depuis lors chaque année des centaines de millions d’euros.
En 1999, le Land de Berlin avait vendu 49,9 % du capital de son entreprise publique d’eau à Veolia et RWE pour un montant de 3,3 milliards de marks, donnant naissance à Berlinwasser holding AG.
L’ancienne « entreprise locale gérée bureaucratiquement » étant dès lors vouée à devenir une « utilities », qui opère dans d’innombrables champs d’activité, et sert surtout de « faux nez » allemand à Veolia dans le reste du monde…
Le sénateur démocrate-chrétien Elmar Pieroth déclarait devant la Chambre des députés à propos des entreprises d’eau : « Faisons-les travailler encore plus professionnellement, et ainsi les travailleurs de ces entreprises profiteront de postes de travail encore plus sûrs, rénovés et mieux payés, mais nous donnerons aussi une chance à d’autres qui cherchent un travail à Berlin. »
Le leader du parti social démocrate (SPD), M. Klaus Böger, avait rétorqué qu’il est « déloyal » de la part de l’opposition de constamment jouer « avec les craintes, les préoccupations et les besoins pressants des gens à propos des postes de travail ».
Les inquiétudes des opposants à la privatisation étaient plus que légitimes. Après la vente, les entreprises se sont radicalement débarrassées de leurs activités soumises à la concurrence, comme les télécommunications (Berlikomm) ou la valorisation des déchets (Schwarze Pumpe). Et se sont alors concentrées sur leur monopole : l’eau de Berlin. Au lieu des nouveaux postes de travail promis, le nombre d’emplois s’est réduit. On ne compte plus aujourd’hui que 5283 employés dans les services d’eau, y compris leurs filiales encore actives. En 1999, ils étaient encore 6265 personnes.
Les bénéfices ont par contre explosé dans le même temps, grâce à la « garantie de profit » que le Land a concédé à Veolia et RWE dans le contrat secret.
Les coûts de cette « garantie de profit » ont été inclus dans les tarifs de l’eau, et sont depuis lors supportés par les Berlinois.
Pourtant, dès 1999, la Cour constitutionnelle avait déclaré cette garantie de profit illégale. Car les contrats secrets stipulent que le Land de Berlin doit indemniser les actionnaires privés si cette « garantie de profit » n’est pas assurée par les bénéfices retirés de l’exploitation normale du service.
Pour y parvenir on a donc ponctionné les bénéfices du service d’eau, au détriment des finances du Land, qui en bénéficiait pleinement auparavant.
En 2004, le contrat initial a été modifié et ces clauses confidentielles, jusqu’alors accessibles, en ont été supprimées, mais reprises dans un protocole secret annexe.
Depuis lors, ce sont près de 40 % des services d’eau potable qui ont été, à l’identique, confiés au secteur privé en Allemagne, comme à Brême, Essen, Höxter, Gelsenkirchen, Dresde, Schwerin, Goslar, Cottbus ou Rostock. Autant de « privatisations de fait » dont les contrats n’ont encore été publiés nulle part.
Le dossier complet sur la privatisation de l’eau à Berlin et nombre d’autres textes ont été publiés dans le Sonntaz (l’édition dominicale du TAZ) du 30 octobre 2010.
Notes
[1] Cet interlocuteur, Sebastian Heiser est accessible par e-mail : open@taz.de ou par voie postale : Die Tageszeitung, Rudi-Dutschke-Strasse 23, 10969 Berlin.Il est possible de contacter la Grüne Liga par e-mail : wasser@grueneliga.de — par voie postale : Bundeskontaktstelle Wasser Haus der Demokratie und Menschenrechte Greifswalder Straße 4, 10405 Berlin — par téléphone : (49-30) 40-39-35-30 ou pas fax : 204-44-68
1 comentário:
Excelente texto, adorei, no meu blog falo sobre casos de privatização de água, alem de um video sobre a historia da agua engarrafada. http://geografoss.blogspot.com/2011/08/privatizacao-da-agua.html
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