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28/02/2010

L'Europe en mauvaise posture

Guillaume Duval

Alors que tout le monde guette les premiers signes d'une éventuelle reprise économique, le dernier trimestre 2009 a été marqué en Europe par un retour à la stagnation. Sans compter les effets de la crise grecque…

Vendredi dernier, Eurostat, l'Insee européen, a rendu publics les chiffres de la croissance économique au 4e trimestre 2009. Et ils sont mauvais. Alors que la croissance avait été de 0,4 % dans la zone euro au 3e trimestre, elle n'était plus que de 0,1 % au 4e, une quasi-stagnation. Tandis qu'aux Etats-Unis, la croissance est vivement repartie, plus 1,4 % au dernier trimestre, ramenant du coup l'activité au niveau de fin 2008. Le Royaume-Uni est certes sorti, tout juste, de la récession, mais l'Italie y est au contraire retournée et l'Espagne y est restée, tandis que l'activité a complètement stagné en Allemagne. Quant à l'Europe de l'Est, son économie ne se redresse pas, contrairement à ce qui était espéré. Et sans surprise, le chômage a continué à augmenter : il atteint désormais le seuil symbolique des 10 % dans la zone euro, un niveau qui n'avait plus été atteint depuis 1997.

Mais l'économie française s'en est mieux tirée…

L'économie française a de son côté tiré son épingle du jeu et permis à la zone euro d'éviter la récession. Avec une croissance de 0,6 % − 2,4 % en rythme annuel −, elle fait même mieux qu'attendu. Mais l'examen des éléments qui expliquent cette performance incite à la plus grande prudence pour la suite. Tout d'abord, c'est un puissant mouvement de restockage qui cause ce rebond : depuis fin 2008, les entreprises avaient serré la vis côté production et puisé dans leurs stocks pour vendre. Ce mouvement ne pouvait pas se poursuivre indéfiniment et la courbe s'est inversée à la fin de l'année, entraînant un plus de production équivalant à 0,9 point de produit intérieur brut (PIB). Un mouvement qui n'a toutefois aucune raison de se poursuivre à ce rythme. L'autre élément qui a tiré l'économie française, c'est la prime à la casse : les ventes d'automobiles ont bondi de 8 % par rapport au trimestre précédent en prévision de l'arrêt progressif de cette prime début 2010. Et de ce fait, les perspectives de l'automobile pour ce début d'année sont très sombres. Parallèlement, le commerce extérieur de la France se dégrade de nouveau et l'investissement continue de reculer fortement, notamment du côté des ménages. A noter également que, malgré les cocoricos du gouvernement sur son plan de relance, l'investissement public continue lui aussi de baisser alors que le pays était censé se couvrir de chantiers d'infrastructures.

L'impact de la crise grecque

Ces mauvais chiffres, même s'ils sont connus maintenant, ne tiennent pas encore compte des effets de la crise grecque, qui n'a véritablement démarré que fin décembre. Or cette crise, en inquiétant tous les Européens, risque de freiner encore davantage leur consommation tout en entraînant une hausse des taux d'intérêt à long terme défavorable à l'investissement. Même si la baisse du taux de change de l'euro face au dollar peut avoir quelques effets positifs sur les exportations, le bilan global a toutes les chances d'être nettement négatif. On assiste visiblement à un remake des suites de la crise de 2000-2001 : une crise déclenchée par les dérèglements de la finance surtout américaine, à l'époque autour de la high-tech, cette fois dans l'immobilier, qui se traduit au final par une crise économique plus profonde et plus durable en Europe qu'aux Etats-Unis.

Les Européens toujours dans l'incapacité de se coordonner

La faiblesse de la réaction des Européens et leur incapacité à se coordonner expliquent pour beaucoup ce remake. Et ce n'est visiblement pas en train de s'arranger, si on en juge par le loupé de jeudi dernier sur la dette grecque : l'Europe a été une fois de plus incapable d'afficher une position commune crédible. La stratégie économique que prône la Commission européenne, et qui a été entérinée par le gouvernement français avec le programme de stabilité transmis à Bruxelles au début du mois, ne peut de toute façon qu'aggraver les choses : qu'on demande à la Grèce, à l'Espagne, à l'Irlande et au Portugal de se serrer fortement la ceinture, c'est normal compte tenu de leurs excès antérieurs, mais si dans le même temps on exige de la France et de l'Allemagne qu'elles pratiquent elles aussi une austérité de fer pour diminuer leurs déficits publics en un temps record, on mène tout droit la zone euro à la récession. Et on donne raison aux spéculateurs qui parient sur son effondrement et son éclatement prochains…

http://www.alternatives-economiques.fr/l-europe-en-mauvaise-posture_fr_art_633_48114.html

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