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02/11/2009

CIT : gros plan sur la cinquième plus grosse faillite américaine

Laura Raim

Le groupe financier CIT, acteur incontournable du financement des PME américaines, a annoncé dimanche qu'il déposait le bilan. Nouveau Lehman Brothers ou assainissement nécessaire d'un secteur bancaire éclaté? Le décryptage de l'Expansion.com.

Croulant sous 65 milliards de dollars de dettes, le groupe financier CIT a annoncé dimanche qu'il se mettait sous la protection de la loi sur les faillites. Ses actifs étant évalués à 71 milliards de dollars, il s'agit du cinquième plus gros dépôt de bilan de l'histoire des Etats-Unis. L'impact ne devrait pas pour autant provoquer de séisme dans le secteur bancaire américain. Décryptage.

CIT, c'est quoi ?

Fondé en 1908, CIT est un groupe financier américain spécialisé dans le financement et le conseil aux PME, qui revendique plus d'un million de clients dans 50 pays et 71 milliards de dollars d'actifs. Le groupe se présente comme le numéro un de l'affacturage aux Etats-Unis pour les PME : pour récupérer de la trésorerie, les entreprises vendent avec un rabais leurs créances à CIT qui prend ensuite en charge leur recouvrement.

Pourquoi CIT fait-il faillite ?

La faillite de CIT est symptomatique des déficiences structurelles du secteur bancaire américain, qui est à la fois éclaté et concentré. "Il existe environ 8000 banques aux Etats-Unis. Les 10 premières contrôlent 75% des actifs", résume Estelle Honthaas, économiste au Crédit Agricole. "Or les plus grosses banques ont préempté le marché des prêts immobiliers résidentiels, et ont laissé les miettes des prêts immobiliers commerciaux aux plus petites banques, comme CIT. Ces prêts, plus risqués, représentent souvent un tiers des encours des petites banques, qui sont très faiblement diversifiées. Avec la crise, ces banques ont donc été touchées de plein fouet par la baisse de la demande en bureaux et en espaces commerciaux."

Le groupe est ainsi confronté à une baisse des demandes de prêts, mais aussi aux défaillances de ses clients. "Pour les organismes prêteurs, toute récession est synonyme de pertes sévères liées à l'insolvabilité des débiteurs, explique Breaking Views. Dans les banques d'investissement, les traders sont à la fête, mais dans les établissements bancaires traditionnels, qui sont en prise directe avec l'économie réelle, la vie est rude."

Les difficultés du groupe se sont intensifiées en juillet, alors que devait expirer en août une tranche de un milliard de dollars de sa dette obligataire, qu'il n'était pas en mesure de refinancer. Le problème pour CIT, c'est qu'il ne peut pas compter sur un sauvetage de l'Etat, car il ne fait pas partie des 19 banques présentant un risque systémique. CIT s'est donc vu refuser une nouvelle injection de fonds fédéraux.

En octobre, la firme s'est résigneé à offrirc deux possibilités à ses créanciers. Soit ils échangent leurs obligations (environ 30 milliards de dollars) contre l'essentiel du capital de la banque, ce qui permet d'éviter un dépôt de bilan. Soit ils acceptent un plan de redressement ordonné sous protection du chapitre 11 de la loi sur les faillites. Les créanciers ont opté pour la seconde solution.

Et c'est grave ?

Tout dépend pour qui... Si Moneyweek évoque un "nouveau Lehman Brothers", la plupart des analystes sont moins alarmistes.

Pour les créanciers, d'abord, la casse est limitée. CIT affirme en effet qu'il s'agit d'une faillite "ordonnée", puisqu'assortie d'un plan de restructuration déjà approuvé par les créanciers : ceux-ci prendront le contrôle du groupe et seront à la tête d'une nouvelle dette portant sur environ 70% de la valeur faciale de la dette actuelle. Les créanciers perdent donc 30% de la valeur de leurs titres, mais au moins le groupe évite le recours à un repreneur extérieur.

Pour les PME, c'est plus compliqué. CIT est l'un des plus importants émetteurs de prêts à destination de ces entreprises. "C'est une nouvelle source de capitaux pour les petites entreprises qui se tarit", souligne Blake Howells, analyste chez Becker Capital Management à Portland. CIT joue un rôle d'autant plus important que de nombreuses compagnies d'affacturage, frappées par la crise, ont mis la clé sous la porte. Et si CIT disparaît, "les banques ne vont pas prêter aux entreprises à sa place, avertit The Institutional Risk analyst. Cela fait plus de 18 mois que les banques commerciales prennent leurs distances avec les activités d'affacturage, jugées trop risquées".

Toutefois, la plupart des observateurs sont moins pessimistes. La procédure de faillite ne concerne que la maison-mère et non les agences de CIT et ses filiales, ce qui leur permettra de poursuivre leurs activités. Pour Estelle Honthaas, "ce dépôt de bilan ne devrait pas changer la face du secteur bancaire. Aux Etats-Unis, il y a tous les jours des banques qui naissent et qui meurent, même hors contexte de crise, relativise l'économiste du Crédit Agricole. Rien que ce week end, neuf établissements bancaires ont fait faillite. En plus, ces faillites, qui sont très bien gérées par la FDIC, sont aussi une manière d'assainir le secteur".

Les actionnaires, en revanche, sont les gros perdants de l'affaire. L'action CIT, cotée à 0,30 dollar lundi, a perdu 93% de sa valeur depuis le mois de janvier. Parmi ces actionnaires, le Trésor a peu d'espoir de récupérer grand chose de ses 2,3 milliards de dollars d'actions préférentielles acquises en décembre dans le cadre du CPP. CIT est ainsi le premier bénéficiaire du TARP à faillir.

l'Expansion.com - 02.11.09

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