Une droite plurielle, mais aussi plus dure votera au Parlement aujourd’hui pour reconduire José-Manuel Barroso à la tête de la Commission européenne. Le scrutin vient confirmer le succès de la droite, obtenu lors des dernières élections du Parlement européen, en juin dernier. Président du groupe du Parti populaire européen (PPE) et membre de l’UMP, Joseph Daul faisait d’une victoire aujourd’hui, une victoire du PPE : « Car le PPE avait désigné son candidat avant le scrutin européen. Les Européens ont donc implicitement accepté ce choix », a-t-il le toupet d’affirmer, quand le PPE n’a obtenu que 36 % des sièges. José-Manuel Barroso obtiendra également le soutien de l’Alliance des démocrates et libéraux européens (ADLE, centriste), même si le Modem français votera contre. Les Conservateurs et réformistes (ECR), groupe fondé autour des conservateurs britanniques et plus à droite que le PPE, le soutiennent également.
Abstention ou vote contraire ?
Dans leur majorité, les socialistes ne voteront pas pour José-Manuel Barroso. Ce n’est pas nouveau. C’était déjà le cas en 2004. Preuve qu’un vote contraire ne signifie pas mettre fin au consensus entre droite, libéraux et socialistes à Strasbourg et à Bruxelles. À l’époque, une cinquantaine d’entre eux avaient tout de même voté pour l’ancien premier ministre conservateur portugais. Ce devrait être le cas encore aujourd’hui. Là où ils sont au gouvernement (Espagne, Portugal, Royaume-Uni), les députés socialistes devraient se prononcer pour José-Manuel Barroso. Abstention ou vote contraire ? Le groupe des Socialistes et démocrates (S&D) devait se déterminer hier soir. Mais les Français avaient d’ores et déjà annoncé qu’ils voteraient contre.
Pour le président du groupe socialiste, Martin Schulz, José-Manuel Barroso est le candidat du Conseil européen des chefs de gouvernement, qui, droite et gauche confondues, l’ont désigné. « Si j’avais été chef de gouvernement, je l’aurais moi-même désigné », a-t-il reconnu. Aveu de faiblesse que, lorsque les socialistes conquièrent des positions gouvernementales, ils ne les usent pas pour changer le cours de l’Europe.
Ces dernières semaines, le candidat à la présidence de la Commission n’a eu de cesse de donner des gages aux socialistes sur sa volonté de se défaire des chefs de gouvernement afin de lutter « contre les égoïsmes nationaux ». Rejetant même sur les gouvernements, et non les traités existants, la faute de l’absence d’Europe sociale, il propose au Parlement un « partenariat » entre Commission et Parlement, pour relancer l’Europe en ce moment de crise, sur la base du traité de Lisbonne. « C’est José-Manuel Obama, ironise dans l’hémicycle le chef de file des Verts, Daniel Cohn-Bendit. Yes, he can. Tout ce qu’il n’a pas fait pendant cinq ans, il va le faire à partir de demain. » Son groupe votera contre, doutant, comme la Gauche unie européenne et les socialistes, de la volonté de prendre en compte la question environnementale.
la continuité d’une politique qui a échoué
C’est surtout sur l’Europe sociale que le bât blesse. La position de la Gauche unie européenne (GUE) était connue. Le président du groupe l’Allemand, Lothar Bisky (à l’instar de son camarade espagnol Willy Meyer, lire ci-contre), a dénoncé Barroso comme le candidat de « la continuité d’une politique qui a échoué ». Et de préciser : « La crise ne vient pas seulement des États-Unis ou des banques comme vous l’avez dit. La Commission européenne a toute sa responsabilité, par la dérégulation qu’elle a prônée, dans l’instauration de cette économie de casino. » Élu du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon a, lui, averti contre la reconduction du modèle « qui a transformé le rêve d’une Europe protectrice en une machine à détruire les droits sociaux, les industries nationales et qui dresse les peuples les uns contre les autres pour gagner leur pain ».
Tout comme la Gauche unie européenne ou la Confédération européenne des syndicats, les socialistes ont fait de la réécriture de la directive « détachement des travailleurs », qui permet à des travailleurs lettons de travailler à rémunération lettone en Suède, leur cheval de bataille. « Je veux vous entendre dire qu’en un même lieu, à travail égal salaire égal », réclame Martin Schulz. Il ne l’entendra pas. José Manuel Barroso, qui a mis l’accent sur la « dimension sociale des décisions européennes à tous niveaux » pour conquérir les suffrages socialistes, dira vaguement vouloir « lutter contre le dumping social ». Il appelle à la rédaction d’un règlement et non d’une refonte de la directive. C’est moins contraignant juridiquement, et cela effraie moins sa majorité. De droite.
L'Humanité - 16.09.09
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