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18/06/2009

Frappée par la crise, la ville de Flint décide de raser des quartiers entiers

Flint, le berceau de la General Motors, a déjà perdu la moitié de ses habitants. La ville a décidé de reconcentrer sa population et de raser des quartiers entiers qui seront rendus à la nature. L’administration Obama a approché les promoteurs de cette opération, qui sont désormais chargés d’appliquer leurs méthodes de « réduction urbaine » à une cinquantaine de cités touchées par la crise, au nombre desquelles Detroit, Philadelphie, Pittsburgh, Baltimore et Memphis. Sinistrée par le déclin de l’industrie, Flint veut désormais promouvoir une politique d’auto défense : elle va ancrer son développement dans des activités de service non délocalisables.

Le gouvernement cherche à développer un système expérimenté par la ville de Flint, l’une des plus pauvres aux USA, qui prévoit la destruction de quartiers entiers, dont le terrain sera rendu à la nature.

Les responsables politiques locaux estiment que la ville devrait réduire sa taille de plus de 40%, et concentrer sa population déclinante et ses services publics dans une zone plus viable.

Cette expérience radicale a été conçue par Dan Kildee, le trésorier du Genesee County, auquel appartient Flint.

Après avoir exposé sa stratégie à Barack Obama pendant la campagne électorale, M. Kildee a été approché par le gouvernement et par un groupe d’organismes de bienfaisance qui veulent le voir appliquer dans le reste du pays le savoir-faire acquis à Flint.

M. Kildee indique qu’il travaillera sur 50 villes qui doivent diminuer sensiblement de taille en raison de leurs revers de fortune et ont été recensées par une étude récente de la Brookings Institution, un groupe d’étude influent à Washington.

La plupart sont d’anciennes villes industrielles, situées dans la « ceinture de rouille » du Mid-Ouest et du Nord-Est. Il s’agit notamment de Detroit, Philadelphie, Pittsburgh, Baltimore et Memphis.

À Detroit, ébranlée par les difficultés de l’industrie automobile américaine, il existe déjà des plans pour scinder la ville en une série de petits centres urbains séparés les uns des autres par des zones vertes.

« La vraie question n’est pas de savoir si ces villes diminueront de taille - nous sommes tous en train de diminuer - mais si nous laissons cela se produire de façon destructrice ou de manière soutenable », déclare M. Kildee. « Le déclin est une réalité de la vie à Flint. Résister, c’est comme vouloir résister à la force de gravité. »

Karina Pallagst, directrice du programme « Shrinking Cities » à l’Université de Berkeley en Californie, estime qu’il existe un « tabou à la fois culturel et politique » pour admettre la réalité du déclin en Amérique.

« Des endroits comme Flint ont touché le fond. Ils en sont au point où il vaut mieux commencer à détruire un grand nombre de bâtiments, » juge-t-elle.

Flint, située à une centaine de kilomètres au nord de Detroit, a été à l’origine de la General Motors. Le géant de l’automobile y a employé jusqu’à 79.000 habitants, mais ce chiffre a diminué à environ 8000.

Le taux de chômage est maintenant de près de 20% et la population totale qui a baissé de près de moitié, n’est plus que de 110 000 habitants.

L’exode - surtout des jeunes - couplé à l’effondrement des prix de l’immobilier, a vidé les rues l’une après l’autre, dans des quartiers de la ville qui sont aujourd’hui presque entièrement abandonnés.

Dans le centre-ville, le Durant Hôtel, autrefois réputé, qui tient son nom de William Durant, le fondateur de GM, est un symbole du déclin de la ville, déclare M. Kildee. Le grand bâtiment est vide depuis 1973, début de la période où Flint a amorcé sa chute.

Considérée comme une ville modèle lors de l’essor de l’industrie automobile, Flint pourrait être à nouveau imitée, mais cette fois pour des raisons fort différentes.

M. Kildee, qui a passé ici presque toute sa vie, pense qu’il faudra d’abord surmonter l’idée profondément enracinée en Amérique, selon laquelle « big is good » et les villes doivent grandir.

« L’obsession de la croissance est malheureusement quelque chose de très américain. Partout aux États-Unis, existe l’idée selon laquelle tout développement est bon, que si les villes grandissent c’est qu’elles connaissent le succès, mais que si elles diminuent, elles sont en train d’échouer. »

A Flint certaines bennes à ordure ne recueillent qu’un sac poubelle par semaine, la voirie se dégrade, les fonctionnaires de police sont en nombre très insuffisants, et il y a tout simplement trop peu d’habitants pour financer les services publics, précise-t-il.

Si la ville ne réduit pas sa taille, elle finira par faire faillite, ajoute-t-il.

Les efforts de redressement entrepris à Flint ont été aidés par une nouvelle loi votée il y a quelques années, qui permet aux autorités locales d’acheter les immeubles vides à un coût très faible.

Ils peuvent ensuite les démolir ou les vendre à de nouveaux propriétaires qui les occuperont. La ville souhaite se spécialiser dans les service de santé et d’éducation, deux domaines d’activité qui ne peuvent pas aisément être transférés à l’étranger.

Les autorités locales ont rétabli l’attractivité du centre ville autrefois déserté, et ont démoli 1 100 maisons abandonnées, situées dans les quartiers périphériques.

M. Kildee estime que 3000 autres habitations doivent être abattues, mais que des limites de la ville resteront les mêmes.

Quelques rues sont déjà bordées de bois ou de prés, sans plus aucune trace des maisons qui se trouvaient là.

Le choix des zones à raser sera délicat, mais pour beaucoup d’entre elles il est déjà évident, constate-t-il.

La ville vient d’acheter des maisons situées dans les zones plus favorisées pour les offrir à la population des quartiers qu’elle veut démolir. Personne ne sera contraint de se déplacer, indique M. Kildee.

« Une grande partie de la terre sera rendue à la nature. Les gens vont profiter de vivre à proximité d’une forêt ou d’une prairie », dit-il.

M. Kildee reconnait que certains de ses collègues en Amérique considèrent que sa solution est « défaitiste », mais il insiste sur le fait qu’elle n’est « pas plus défaitiste que la taille effectuée sur un arbre trop développé, afin de lui permettre de porter à nouveau des fruits ».

ContreInfo - 16.06.09

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