Le secrétaire général de la CGT estime que le gouvernement sera contraint de bouger. Il se montre confiant dans la mobilisation du 7 septembre pour «bousculer» la réforme.
L’examen de la réforme commence à l’Assemblée nationale. La façon dont il s’engage permettra-t-elle un vrai débat ?
Bernard Thibault. La forme retenue est dans la droite ligne de ce qu’on a connu depuis le début du processus de la «réforme» des retraites : une concertation mais pas de négociation, la présentation d’un projet le 20 juin, quelques jours avant les congés d’été, un Conseil des ministres un 13 juillet, en plein congés, et une commission des Affaires sociales à huis clos. C’est le signe d’une difficulté pour le gouvernement à assumer les choix qu’il va défendre en septembre.
Vous n’avez pas l’espoir que la commission présente un projet un peu modifié ?
Bernard Thibault. Ça ne semble pas être l’orientation politique retenue à ce stade. La consigne semble donnée par l’Élysée de ne pas engager les choses sérieuses dès maintenant. Ça ne veut pas dire qu’on ne soit pas à la merci de manœuvres. Mais, d’après moi, le gouvernement, très conscient du climat social qui entourera le débat parlementaire de septembre, attend le dernier moment pour savoir s’il doit bouger et sur quoi.
Mais Éric Woerth et Nicolas Sarkozy répètent qu’il peut y avoir des changements sur la pénibilité, les carrières longues, les polypensionnés. Vous les rencontrez, est-ce que vous percevez des évolutions ?
Bernard Thibault. Non ! Aujourd’hui, il n’y a absolument aucun mouvement particulier sur quelque paragraphe que ce soit du texte, y compris ceux énoncés par le président de la République. Ça relève à mon avis du besoin de communication politique parce que le projet du pouvoir est largement rejeté. En même temps, je l’interprète comme des points marqués sur le caractère injuste de cette réforme et le fait que le gouvernement ne pourra pas présenter son texte en totalité dans sa version actuelle. Je ne sais pas sur quoi il sera contraint de bouger mais la mobilisation l’oblige déjà à communiquer sur des évolutions possibles. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres et on ne va pas laisser de faux espoirs sur la seule base de la communication gouvernementale.
Vous remettez donc en cause l’ensemble de la réforme…
Bernard Thibault. Oui, parce que ce n’est pas une réforme des retraites mais un plan d’économie sur les futures retraites à verser. Et il n’y a pas de débat réel sur les différentes options. Nous sommes par exemple les premiers à considérer qu’il faut améliorer le taux de remplacement et donc débattre de l’évolution des droits actuels. Nous considérons que la précarité génère une baisse des pensions et nous aimerions débattre de cette question. Ce débat nous est refusé. Ce plan d’économie sur le dos des salariés consiste à verser les retraites plus tard, c’est pourquoi on joue sur l’âge légal de départ, et à partir de là tout en découle. C’est cette approche qu’il faut absolument bousculer.
Le débat refusé, ça veut dire que c’est plié ?
Bernard Thibault. Absolument pas ! Ce qui me rend confiant, c’est l’immense succès de la journée de mobilisation du 24juin. Une mobilisation exceptionnelle si on considère le calendrier. Ceux qui étaient mobilisés le 24juin le resteront début septembre. Et ça continue puisque nous en sommes à 580 000 signatures sur la pétition de la CGT. Le rendez-vous du 7 septembre est connu, c’est devenu un sujet de conversation et je pense que le gouvernement sera une nouvelle fois surpris.
Mais le président de la République assure que, quel que soit le nombre de manifestants, ça ne changera rien.
Bernard Thibault. C’est une posture qui n’est pas très originale. J’ai entendu ça à plusieurs reprises sous différents gouvernements. Cela vise à dissuader de manifester mais c’est surtout le signe d’une grande fébrilité.
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