Dans la soirée du 29 juin, plus de cent policiers investissent le foyer de travailleurs migrants de la rue Chevaleret à Paris pour interpeller un groupe de vendeurs à la sauvette. Bilan, une dizaine de trafiquants arrêtés, des travailleurs malmenés par la police et l’insécurité des foyers mise sur le devant de la scène. Quelques jours après la descente de police, les résidents témoignent.
Durant les 6 heures d’intrusion policière dans le foyer, les CRS en poste bloquent la rue du Chevaleret et empêchent l'accès du foyer aux résidents sans donner d’explications. Les policiers contrôlent l’identité de tous les occupants sans arrêter les sans-papiers présents dans les locaux. "Les policiers sont venus avec des photos. Ils ont visé les trafiquants et n’ont pas attaqué les sans-papiers", précise un habitant présent sur les lieux. "Surtout que les trafiquants, pour la plupart, n’étaient pas des résidents du foyer".
Un climat de méfiance
Cette opération amplifie pourtant un climat de méfiance et de provocations sécuritaires de la part de la police. Jusqu’à minuit, des résidents malades et des travailleurs qui commencent le travail à 5h du matin doivent attendre sur les marches en face du foyer alors que les habitants de l’immeuble mitoyen sont invités à rentrer chez eux.
Cette intervention soulève de nombreuses questions à la réunion unitaire des foyers et soutiens du 13e arrondissement. "Pourquoi les policiers sont-ils venus interpeller ces revendeurs dans un foyer de travailleurs plutôt que sur leurs lieux de vente ? Pourquoi a-t-on fait attendre 200 personnes dans la rue pour l’arrestation d’une dizaine de trafiquants ?", demande un résident du foyer. Un autre renchérit : "Ce n’est pas normal de payer 250 euros par personne pour habiter une chambre de 11m2 à trois et de ne pas disposer de vie privée pendant un contrôle de police ! ".
Les travailleurs migrants revendiquent un droit à la sécurité
Cette intrusion policière dans le foyer est d’autant moins compréhensible par les résidents qu’ils ne cessent de tirer la sonnette d’alarme auprès de la Mairie de Paris et de la société gestionnaire (Adoma). Samba Samassa, délégué du foyer Bellièvre explique que "cela fait 5 ans que nous essayons d’arrêter les voyous qui nous mènent la vie dure. Beaucoup sont contents qu’ils se soient fait arrêter. Nous ne pouvons pas les défendre".
Pris entre le feu des violences policières et le feu des violences internes au foyer, les travailleurs migrants revendiquent leur droit à la sécurité et l’embauche d’un vigile par le gestionnaire pour les protéger des trafiquants. Un travailleur explique son désarroi : "Dans certains foyers, les résidents ont dû organiser des patrouilles pour faire respecter les règles de vie en commun. Mais ce n’est pas à nous de faire la loi ! Ce n’est pas à nous de payer un vigile en plus de notre loyer, mais au gestionnaire de prendre ses responsabilités".
Des axes de revendications difficiles à tenir
Un axe de revendication difficile à tenir pour certains militants associatifs : "On reconnait que la sécurité est un droit pour tous. Mais il ne faut pas oublier que, sans défendre le trafic, les vendeurs arrêtés vont être jugés parce qu’ils sont sans-papiers. La police a décidé d’intervenir dans un foyer pour attaquer l’image des travailleurs immigrés".
Des axes de revendication difficiles à tenir, entre la volonté de se soustraire à la violence des interventions policières et le désir de faire respecter le droit à la sécurité dans les foyers. Résultat de ce manque de clarté, les foyers et les associations engagent une lutte politique a minima avec une mobilisation prévue dans le cortège de la manifestation pour la Françafrique du 13 juillet.
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