Sun Zhuangzhi
« La Chine ne peut pas rester insensible à la question afghane. Le chaos provoqué par la guerre en Afghanistan menace la sécurité dans la région nord-ouest de la Chine, » constate Sun Zhuangzhi, spécialiste des questions géopolitiques à l’Académie Chinoise des Sciences. Mais les intérêts chinois ne sont pas les mêmes que ceux de la coalition menée par Washington car « l’Afghanistan est utilisé comme un pion » par les USA afin de « maintenir leur domination mondiale et contenir leurs concurrents. » Après avoir énuméré les autres différences d’approche, concernant par exemple le modèle de gouvernance, et exprimé les inquiétudes de la Chine vis-à-vis de la présence américaine à ses portes, il suggère que Pékin aborde avant tout le problème Afghan comme une question de sécurité régionale, en s’appuyant sur l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS), qui rassemble cinq des six pays voisins de l’Afghanistan. --- Les suggestions de Sun Zhuangzhi reflètent - et il ne s’en cache pas - les préoccupations géostratégiques d’une grande puissance en devenir qui se sait promise à un rôle de premier plan sur la scène internationale et commence à réclamer sa part. Mais la position qu’il défend est parfaitement légitime et non moins raisonnable que celle de l’Occident qui prétend décider du sort de peuples et de nations à l’autre bout du monde, selon ses seuls critères et intérêts, bien souvent au mépris des réalités régionales, toujours plus complexes que la version en noir et blanc que l’on nous propose habituellement. Comme il y insiste, la Chine, elle aussi confrontée au séparatisme Ouigour, soucieuse de la sécurité de ses frontières et exposée au trafic de drogue, est tout aussi intéressée que Washington à un Afghanistan pacifié et stable. Serions-nous prêts à retenir la suggestion de Sun Zhuangzhi d’une recherche de solution « Asiatique » au problème afghan, si elle apparaissait comme plus prometteuse que l’intervention occidentale ? La question n’est pas (encore ?) ouvertement formulée en ces termes. Mais elle recèle un crible redoutable pour toutes les justifications aujourd’hui communément admises pour l’intervention et les objectifs de l’OTAN. Contre Info.
Les forces dirigées par les États-Unis n’ont pas été en mesure de rétablir la paix en Afghanistan, ni d’aider à la reconstruction du pays, malgré près de 10 ans d’engagement militaire contre les talibans. Au contraire, la sécurité en Afghanistan s’est détériorée, et la résurgence des talibans a créé une situation plus complexe pour les États-Unis et leurs alliés.
Les États-Unis ont dû repenser leur stratégie en Afghanistan.
Obama a déclaré que la question afghane est « bien plus que seulement un problème pour les États-Unis, mais pose à un niveau supérieur un défi pour la sécurité internationale », et que Washington chercherait à établir un « nouveau mécanisme diplomatique », tel qu’un Forum régional pour les questions de sécurité et d’économie avec les puissances concernées (Russie, Iran, Inde et Chine) qui sont inquiètes de la situation en Afghanistan. Cela signifie que le Président Obama - par rapport à son prédécesseur George W. Bush - met davantage l’accent sur la coopération avec d’autres pays et organisations internationales pour lutter contre le terrorisme. C’est une autre évolution dans la stratégie des États-Unis.
Mais la nouvelle stratégie américaine donne un rôle « moins important » à la Chine. Car le rôle que la Chine peut jouer en Afghanistan et la mesure dans laquelle Washington et Pékin peuvent travailler de concert sont déterminés par leurs intérêts stratégiques et objectifs géopolitiques.
Il est clair que les États-Unis souhaitent maintenir leur influence sur l’Afghanistan, même après le retrait de leurs troupes, quelque soit le moment où cela se produira. Ce qui signifie qu’ils ne permettront pas à des puissances régionales, comme la Chine, de jouer un rôle plus important dans les affaires afghanes. Mais par contre, ce que les États-Unis sont disposés à partager avec des pays comme la Chine, c’est le fardeau de la reconstruction économique.
La nouvelle politique d’Obama inclut certains principes qui sont en accord avec la Chine. Par exemple, la Chine a déclaré que la communauté internationale doit s’unir pour lutter contre le terrorisme et promouvoir la réconciliation nationale, contribuer à mettre en place un gouvernement de coalition représentatif et accélérer les efforts de reconstruction en Afghanistan. Les différences existant entre les positions fondamentales des États-Unis et de la Chine, rendent cependant difficile une coopération approfondie sur la question afghane.
La première différence tient aux objectifs dans le domaine de la sécurité. La préoccupation majeure de Washington est d’empêcher les talibans et Al-Qaida de lancer des attaques sur le sol américain et contre ses installations et ses ressortissants à l’étranger. Mais la Chine, en tant que voisin de l’Afghanistan, doit également faire face à des menaces non conventionnelles sur sa sécurité, telles que le trafic de drogue, la contrebande d’armes et autres crimes transfrontaliers. Par ailleurs, l’insistance des États-Unis et de leurs alliés à poursuivre leurs frappes militaires contre les talibans et la consolidation de leur présence militaire en Asie centrale et méridionale, font peser une pression supplémentaire sur les plans de sécurité et de défense de la Chine.
La deuxième différence concerne les aspects économiques. Les États-Unis ont un grand nombre de soldats en Afghanistan qui assurent la sécurité de leurs projets d’assistance. L’Amérique est considérée comme prioritaire dans la sélection de ces projets, car elle offre une « protection » au gouvernement d’Hamid Karzaï. Et son action au plan économique est destinée à financer ses opérations militaires. En revanche, les entreprises chinoises font face à de grands risques en travaillant à la reconstruction de l’Afghanistan et elles rencontrent une vive concurrence internationale pour décrocher des contrats. Et contrairement aux États-Unis, les investissements chinois sont principalement effectués dans les routes, les hôpitaux et les écoles.
La troisième différence porte sur le choix du gouvernement. Les Etats-Unis insistent sur l’établissement d’un régime « démocratique » de style occidental et ont tenté d’imposer leur modèle politique à un pays arriéré, ce qui a entraîné le chaos lors des élections présidentielles de l’an dernier. D’autre part, la Chine estime que les Afghans (de tous les groupes ethniques et de tous partis politiques) devraient décider quelle est la forme de gouvernement dont ils veulent, en fonction de leur culture, de leur tradition et de leur situation nationales.
Et la quatrième différence concerne les objectifs géopolitiques. Les États-Unis ont une stratégie offensive de lutte contre le terrorisme, dans laquelle l’Afghanistan est utilisé comme un pion pour les aider à maintenir leur domination mondiale et contenir leurs concurrents. La Chine, au contraire, développe une politique de sécurité nationale de type défensif et elle veut entretenir de bonnes relations en tant que voisin de l’Afghanistan.
La Chine ne peut pas rester insensible à la question afghane. Le chaos provoqué par la guerre en Afghanistan menace la sécurité dans la région nord-ouest de la Chine. Un gouvernement faible à Kaboul pourrait signifier une frontière peu gardée, qui à son tour faciliterait le trafic de drogue et la contrebande d’armes et permettrait aux séparatistes du « Turkestan oriental » à chercher refuge en Afghanistan après avoir semé le trouble dans la région autonome Ouigour du Xinjiang.
Dans la mesure où la question de l’Afghanistan a été internationalisée, la Chine devrait amener plus de pays à s’unir pour la résoudre. La Chine devrait prendre certaines mesures nécessaires, conformément aux résolutions des Nations Unies, pour bâtir une région stable et amicale avec l’aide d’autres pays voisins de l’Afghanistan et tenter de résoudre la question afghane par le biais des institutions internationales, telles que l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS), la Banque Asiatique de Développement ou un mécanisme de coopération régionale en Asie Centrale, dans laquelle elle pourrait jouer un rôle important.
L’OCS pourrait jouer un rôle plus actif, car cinq des six pays voisins de l’Afghanistan en sont membres ou observateurs.
Sur le front de la sécurité, les actions conjointes de l’OCS de lutte contre la drogue et le terrorisme peuvent couper les contacts avec le monde extérieur des organisations terroristes et des groupes criminels. Dans le domaine de l’économie, une coopération économique et commerciale régionale au sein de l’OCS pourrait jouer un rôle important dans le redressement économique de l’Afghanistan. Mais étant donné la situation actuelle dans ce pays, un processus de réconciliation et de reconstruction guidé par l’OCS est une proposition irréaliste. De fait, à l’heure actuelle la Chine ne peut fournir de l’aide qu’à travers les canaux multilatéraux.
http://contreinfo.info/article.php3?id_article=3021
À procura de textos e pretextos, e dos seus contextos.
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