Emmanuel Lévy
Les conditions de l'entraide entre pays de la zone euro ont été définie ce week-end. Les solutions prônées par Angela Merkel se sont imposées. Mais la France tente de faire vivre l'illusion d'une Europe à nouveau gouvernée par le couple franco-allemand. Sous une nouvelle appellation: le G2.
Il faut les entendre depuis hier les responsables français répéter, réciter inlassablement leur wording. Primo, l’Irlande est enfin sauvée avec un prêt de 85 milliards d’euros, et la France n’est pas menacée par la contagion. C'est au terme d’un incroyable week-end bruxellois que le sort de l’ex-tigre celtique a été scellé. Au prix d’un coût important pour la population, et d’un plan dont personne jusqu’au plus expert des experts n’en aura réellement compris les tenants et les aboutissants.
Mais qu’importe après tout. Même pour Christine Lagarde, «l'Europe est difficile à comprendre». Car, secundo, au-delà du message aux marchés, il s’agissait avant tout pour les officiels français de se placer sur un plan d’égalité avec leurs homologues allemands. Bref donner corps au concept d’un G2 franco-allemand pour le leadership européen, duo qui ferait pendant à un supposé G2 formé par la chinamérique au plan mondial.
Cette thématique a largement été reprise par Jean-François Copé, fraîchement nommé ministre de l’UMP, lors de son interview de ce lundi 29 octobre matin, pour la matinale de France Inter. L’enjeu est en effet de taille au moment où la France a pris la présidence du G20 : montrer qu’elle pèse face à l’Allemagne. Un enjeu de taille mais aussi paradoxal : la France s’est officiellement mis dans les pas de son voisin. François Fillon l’a d'ailleurs martelé dans son discours de politique générale : la convergence avec l’Allemagne, du moins dans sa politique fiscale, est le nouveau credo de la politique française.
Mais qu’importe après tout. Même pour Christine Lagarde, «l'Europe est difficile à comprendre». Car, secundo, au-delà du message aux marchés, il s’agissait avant tout pour les officiels français de se placer sur un plan d’égalité avec leurs homologues allemands. Bref donner corps au concept d’un G2 franco-allemand pour le leadership européen, duo qui ferait pendant à un supposé G2 formé par la chinamérique au plan mondial.
Cette thématique a largement été reprise par Jean-François Copé, fraîchement nommé ministre de l’UMP, lors de son interview de ce lundi 29 octobre matin, pour la matinale de France Inter. L’enjeu est en effet de taille au moment où la France a pris la présidence du G20 : montrer qu’elle pèse face à l’Allemagne. Un enjeu de taille mais aussi paradoxal : la France s’est officiellement mis dans les pas de son voisin. François Fillon l’a d'ailleurs martelé dans son discours de politique générale : la convergence avec l’Allemagne, du moins dans sa politique fiscale, est le nouveau credo de la politique française.
Un plan made in Germany
C’est sans doute cette double contrainte qui rend incompréhensibles les explications de Christine Lagarde sur le plan de sauvetage. Car il a fallu marier le feu et l’eau : construire un système pérenne d’entraide entre les pays de la zone Euro, tout en restant dans le cadre de la législation allemande qui en interdit le principe comme l’a récemment rappelé la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, la plus haute juridiction de la République fédérale.
Ainsi, il a été décidé que les sommes prêtées par Fonds européen de stabilité financière (FESF), 85 milliards d’euros sur les 440 milliards de garanties des états européens dont il dispose, devront être entièrement remboursées à la mi-2013. A cette date, l’Irlande devra émettre une montagne de nouvelles dettes pour rembourser. Ce sont ces dettes qui seront soumises aux nouvelles dispositions voulues par l’Allemagne.
« Au terme du dispositif du FESF, on va se retrouver avec une nouvelle catégorie d’obligations d’Etat de la zone euro. On en avait déjà deux, la « bonne dette », celle de l’Allemagne, de l’Autriche, et du Benelux, voir de la France. Et la « moyenne », celle des autres, qui bénéficie comme on a pu le voir de la garantie implicite des autres pays. Il y aura désormais une « troisième dette » : celle émise, après 2013, par des pays qui auront fait appel au FESF. Et sur laquelle, les pays pourront éventuellement faire défaut », précise Evariste Lefeuvre, chef économiste Amérique du Nord à la banque Natexis.
Décryptage : si les dettes d’état d’aujourd’hui sont garanties, celles qui seront émises après 2013 ne le seront plus ou pas en totalité. C’est bien cela que voulaient les Allemands (après tout leurs banques sont gavées de ces papiers irlandais et grecs, quelques 120 milliards d’euros au pays des trèfles). Donc à partir de 2013, en bonne rationalité économique, ainsi que les investisseurs le sont la plupart du temps, l’Irlande devra rembourser en émettant de la dette avec un taux très élevé pour compenser le risque de non remboursement. De sorte que, il leur sera équivalent ou presque de détenir 100 euros de dette à 3 % sans risque, ou bien100 euros de dette à 6 %, avec le risque de ne se voir remboursés que 80 euros.
Ainsi, il a été décidé que les sommes prêtées par Fonds européen de stabilité financière (FESF), 85 milliards d’euros sur les 440 milliards de garanties des états européens dont il dispose, devront être entièrement remboursées à la mi-2013. A cette date, l’Irlande devra émettre une montagne de nouvelles dettes pour rembourser. Ce sont ces dettes qui seront soumises aux nouvelles dispositions voulues par l’Allemagne.
« Au terme du dispositif du FESF, on va se retrouver avec une nouvelle catégorie d’obligations d’Etat de la zone euro. On en avait déjà deux, la « bonne dette », celle de l’Allemagne, de l’Autriche, et du Benelux, voir de la France. Et la « moyenne », celle des autres, qui bénéficie comme on a pu le voir de la garantie implicite des autres pays. Il y aura désormais une « troisième dette » : celle émise, après 2013, par des pays qui auront fait appel au FESF. Et sur laquelle, les pays pourront éventuellement faire défaut », précise Evariste Lefeuvre, chef économiste Amérique du Nord à la banque Natexis.
Décryptage : si les dettes d’état d’aujourd’hui sont garanties, celles qui seront émises après 2013 ne le seront plus ou pas en totalité. C’est bien cela que voulaient les Allemands (après tout leurs banques sont gavées de ces papiers irlandais et grecs, quelques 120 milliards d’euros au pays des trèfles). Donc à partir de 2013, en bonne rationalité économique, ainsi que les investisseurs le sont la plupart du temps, l’Irlande devra rembourser en émettant de la dette avec un taux très élevé pour compenser le risque de non remboursement. De sorte que, il leur sera équivalent ou presque de détenir 100 euros de dette à 3 % sans risque, ou bien100 euros de dette à 6 %, avec le risque de ne se voir remboursés que 80 euros.
Dublin, c'est si loin de Berlin
Autre élément central du plan : les futures crises de la dette dans la zone euro seront traitées au cas par cas, plutôt que selon un mécanisme automatique.
Résultat : « Le message aux marchés est : dans ce qui entrera vigueur en 2013, il n’y a rien là-dedans que les marchés ne connaissent pas encore », selon un officiel allemand cité par le Financial Time, la bible des quotidiens économiques.
« L’Allemagne ne voulait pas entendre parler de solidarité. En partie pour des raisons constitutionnelles, mais aussi pour des raisons politiques et économiques. Elle ne voit pas pourquoi, elle qui a fait des efforts dans la décennie précédente devrait supporter le coût des errements de pays qui n’en ont pas réalisé. Et puis, Dublin, comme Athène, sont loin de Berlin », s’amuse Evariste Lefeuvre.
Résultat : « Le message aux marchés est : dans ce qui entrera vigueur en 2013, il n’y a rien là-dedans que les marchés ne connaissent pas encore », selon un officiel allemand cité par le Financial Time, la bible des quotidiens économiques.
« L’Allemagne ne voulait pas entendre parler de solidarité. En partie pour des raisons constitutionnelles, mais aussi pour des raisons politiques et économiques. Elle ne voit pas pourquoi, elle qui a fait des efforts dans la décennie précédente devrait supporter le coût des errements de pays qui n’en ont pas réalisé. Et puis, Dublin, comme Athène, sont loin de Berlin », s’amuse Evariste Lefeuvre.
Le G2 franco-Allemand? Plutôt un tandem conduit par Angela Merkel
En attendant, pour garder la main sur ce que fera le FESF, on ne sait jamais, Angela Merkel a obtenu que ce véhicule financier de l'Union européenne, immatriculé au Luxembourg, soit sous tutelle de Frankfort. Pas à la Banque centrale euroépenne, mais à la Buba, la banque centrale Fédérale. C’est la signature d'Axel Weber, et non celle de Jean-Claude Trichet, qui devrait être apposée sur la dette de la FESF… Le symbole est évident : l'Europe reste un nain même sur le plan financier, tandis que l'Allemagne devient un géant.
On voit dès lors que dans ces conditions le G2 franco allemand, n’est qu’une construction, que seule Paris tente de faire vivre.
D’ailleurs, comment en irait il autrement ? Si les pouvoirs sont « équitablement partagés » dans le modèle du genre le G2 entre la Chine et les Etats Unis, il en va tout autrement au sein du couple franco-allemand. Les Etats-unis portent encore le leadership de la puissance tant politique que militaire, voir technologique. La Chine, assise sur son tas de dollars (des milliers de milliards de dollars) issus de ses substantiels excédents commerciaux, jouit, elle, du levier financier.
Il y a donc une balance entre les deux pays continents. Mais on est loin du condominium exerçant conjointement le pouvoir. Les deux puissances s’affrontent, et d’ailleurs même en France, cette idée du G2 Chinamérique peine à convaincre jusque dans les plus hautes sphères du quai d’Orsay.
Lors de la World Policy Conference à Marrakech, le 31 octobre dernier, Jean Daniel Levitte en parlait ainsi : « Le G2, cela n'existera pas. Un tel duo ne pourra pas régler seul les problèmes globaux, tels le réchauffement climatique, les questions économiques ou de pandémies. C'est juste un fantasme... »
Bien vu. Sauf que c'est exactement la même chose dans le cas de la France et de l’Allemagne : le balancier penche aujourd’hui du coté allemand. Le pouvoir politique comme économique est clairement détenu par notre voisin d’outre-Rhin. Résultat, le guidon du tandem est bien dans les mains de l’Allemagne, laissant à la France le soin de pédaler derrière.
Un schéma parfaitement en ligne avec le fait que le gouvernement Français fait la promotion du modèle allemand de déflation salariale et de hausse des exportations. Mieux, le gouvernement Fillon voit d’un bon œil la proposition allemande visant à soumettre les budgets nationaux à leur approbation préalable par Bruxelles !
Oui mais voilà, Nicolas Sarkozy est déjà en campagne. Et il lui faut absolument apparaître comme un leader d'envergure mondiale. La présidence du G20 lui est acquise. Elle ne lui servira à rien si au sein de l'Union européenne il se révèle à la remorque de l'Allemagne. D'où la fiction d'un G2 franco allemand.... Il ne fera illusion qu'auprès de ceux qui sont davantage sensibles aux gesticulations qu'aux faits économiques.
On voit dès lors que dans ces conditions le G2 franco allemand, n’est qu’une construction, que seule Paris tente de faire vivre.
D’ailleurs, comment en irait il autrement ? Si les pouvoirs sont « équitablement partagés » dans le modèle du genre le G2 entre la Chine et les Etats Unis, il en va tout autrement au sein du couple franco-allemand. Les Etats-unis portent encore le leadership de la puissance tant politique que militaire, voir technologique. La Chine, assise sur son tas de dollars (des milliers de milliards de dollars) issus de ses substantiels excédents commerciaux, jouit, elle, du levier financier.
Il y a donc une balance entre les deux pays continents. Mais on est loin du condominium exerçant conjointement le pouvoir. Les deux puissances s’affrontent, et d’ailleurs même en France, cette idée du G2 Chinamérique peine à convaincre jusque dans les plus hautes sphères du quai d’Orsay.
Lors de la World Policy Conference à Marrakech, le 31 octobre dernier, Jean Daniel Levitte en parlait ainsi : « Le G2, cela n'existera pas. Un tel duo ne pourra pas régler seul les problèmes globaux, tels le réchauffement climatique, les questions économiques ou de pandémies. C'est juste un fantasme... »
Bien vu. Sauf que c'est exactement la même chose dans le cas de la France et de l’Allemagne : le balancier penche aujourd’hui du coté allemand. Le pouvoir politique comme économique est clairement détenu par notre voisin d’outre-Rhin. Résultat, le guidon du tandem est bien dans les mains de l’Allemagne, laissant à la France le soin de pédaler derrière.
Un schéma parfaitement en ligne avec le fait que le gouvernement Français fait la promotion du modèle allemand de déflation salariale et de hausse des exportations. Mieux, le gouvernement Fillon voit d’un bon œil la proposition allemande visant à soumettre les budgets nationaux à leur approbation préalable par Bruxelles !
Oui mais voilà, Nicolas Sarkozy est déjà en campagne. Et il lui faut absolument apparaître comme un leader d'envergure mondiale. La présidence du G20 lui est acquise. Elle ne lui servira à rien si au sein de l'Union européenne il se révèle à la remorque de l'Allemagne. D'où la fiction d'un G2 franco allemand.... Il ne fera illusion qu'auprès de ceux qui sont davantage sensibles aux gesticulations qu'aux faits économiques.
http://www.marianne2.fr/Crise-europeenne-pourquoi-le-G2-franco-allemand-est-une-illusion_a200276.html
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