La crise financière fait partie du passé. Les banques jubilent et leurs tauliers s'auto-congratulent à coups de bonus records. Du côté de l'économie, la planète sort peu à peu du tsunami récessionniste qui a bien failli nous engloutir, la croissance revient... Que du bonheur à l'horizon ! Quoi que...
La crise financière est-elle vraiment terminée ? C'est l'avis de tous. Sauf de quelques uns. Aux Etats-Unis, 124 établissements bancaires ont fait faillite depuis le début de l'année, du jamais vu depuis 1992. La FDIC (Federal Deposit Insurrance Corporation, organisme chargé de garantir les dépôts bancaires) affiche un solde négatif de 8,2 milliards de dollars au troisième trimestre, et le nombre de banques figurant sur sa "liste à problèmes" a augmenté de 33% sur la même période : 552 banques US sont aujourd'hui menacées.
Sauvetages secrets
La Banque d'Angleterre vient en outre de révéler avoir secrètement débloqué près de 70 milliards d'euros à l'automne dernier pour sauver les deux monstres RBS and HBOS, menacés d'effondrement. En toute discrétion, pour éviter de paniquer les marchés, selon le cabinet du premier ministre british, toujours plein de tact. Pas mieux pour l'Irlande, qui injecte en ce moment même 54 milliards d'euros dans une "bad bank" chargée de racheter les actifs toxiques de ses banques et sauver son système financier. Sans compter les petits arrangements avec la réalité... Sur les 107 milliards de capital comptabilisés par Citigroup, 38 sont des crédits d'impôts, selon Business Insider ! Et pour couronner le tout, une étude publiée lundi pointe du doigt le manque de fonds propres des grandes banques mondiales, qui restent fragiles face aux aléas des marchés. Pire même, puisqu'elles replongent dans les travers qui ont amené la crise financière : la part de marché des subprimes est revenue à son pic atteint en 2006, avant la crise. Pourquoi changer une équipe qui gagne ?
Quelques inquiétudes...
Dominique Strauss-Kahn, le boss du FMI, a aussi estimé mardi que "d'importantes pertes" bancaires restaient encore "non dévoilées". "50% sont peut-être encore cachées dans les bilans" a-t-il déclaré, affirmant qu'"on ne verra pas deux fois des centaines de milliards de dollars d'argent public ainsi déversés sur le secteur financier". Jean-Claude Trichet, le président de la BCE, a également donné de la voix, la semaine dernière : "Je ne crois pas que nos démocraties accepteraient une seconde fois de voler au secours de l'économie financière et de l'économie réelle comme elles l'ont fait". Comme si nos dirigeants venaient de s'apercevoir que quelque chose ne tourne pas rond... Est-ce possible ?
Spéculations in vivo
envoyé par Napakatbra
Alors, à quoi ont bien pu servir les floppées de milliards déversées depuis un an dans le circuit financier ? La réponse est simple : à spéculer. Sur les marchés boursiers, sur le marché de l'or, sur les marchés de matières premières et surtout, sur les marchés de changes et de taux. Les banques empruntent des montagnes de dollars à des taux très faibles aux Etats-Unis pour les placer dans des pays où la rémunération de l'argent est plus élevée ("carry trade"). Résultat : le dollar s'effondre et les monnaies et les bourses de la région explosent de façon totalement artificielle. Ce qu'on appelle une bulle. Mais les comptes sont dans le vert, et c'est bien ça l'important. On discutera des détails lors de la prochaine crise, sous couvert de moralisation du capitalisme...
Economies à la dérive
Débordés qu'ils sont à spéculer sur le sens du vent, les établissements bancaires en oublient au final de financer l'économie. Un comble, puisqu'il s'agit de leur fonction première ! Aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne , en France et un peu partout dans le monde, c'est la même histoire : les crédits aux entreprises et aux particuliers sont en chute libre. Du coup, les investissements chutent (-22% en 2009 pour la France) et les entreprises sont acculées à la faillite (-14% d'encours de trésorerie sur un an, +50% d'impayés en 2009 et +22% de faillites sur 12 mois en France, +35% de faillites aux Etats-Unis). D'où une chute libre du marché immobilier commercial, notamment dans les pays anglo-saxons où la bulle des CMBS menace le monde d'un nouveau pschitt retentissant (mais ce sera pour 2012, pas de quoi paniquer...). Plus proche de nous, l'augmentation des impayés des ménages : un quart des familles américaines sont à la limite de la faillite personnelle. Pas étonnant, dans ces conditions, que les retards de paiements se multiplient (10% dans l'immobilier et entre 6 et 8% pour les cartes de crédit).
Deux questions pour un champion
Les salaires baissent et le chômage flambe. Pour autant, la consommation reste stable. Globalement, elle continue même d'augmenter légèrement. C'est bien le plus étonnant, dans cette histoire. Comment se fait-ce ? Il ne faut pas aller bien loin pour trouver la réponse, qui tient en quelques mots : reconstitution des stocks et aides publiques. Après le grand coup de frein de 2008, les entreprises relancent la machine pour reconstituer leurs stocks, tombés au plus bas en ce début d'année. Cette tendance se prolongera-t-elle ? Telle est la première question, qui vaut son pesant d'or. D'autre part, les Etats s'endettent pour soutenir la consommation et la croissance, à bout de bras. Jusqu'à quand ? Telle est la seconde question. Car si la reprise économique tarde à venir, les dettes nationales vont crever les plafonds. A moins qu'on arrête tout dès maintenant, mais dans ce cas, c'est l'économie qui s'effondre... Et ça, ce n'est (malheureusement) pas une question.
Les petites dettes, qui montent, qui montent...
Selon l'OCDE, au rythme actuel, les 30 pays les plus avancés verront leur dette grimper jusqu'à 100% de leur PIB en 2010, soit un quasi-doublement de leur endettement sur les vingt dernières années. Le Japon flirtera avec les 200% de son PIB, l'Italie atteindra les 127% et la Grèce 111%. Une paille. L'OCDE s'inquiète aussi pour l'Europe et la France en particulier. Les agences de notations font actuellement chauffer les calculettes, et les notes risquent d'être fortement dégradées dans le courant de l'année prochaine. Ce qui augmentera d'autant le montant des intérêts : "Il y a un moment où il faudra prendre des mesures un peu brutales", a déclaré "l'entourage" de la ministre de l'Économie Christine Lagarde au Figaro. Mais le flou artistique règne en maître. Un rapport du Sénat publié mercredi affirme que le projet de loi de finances (la France emprunterait 112 milliards d'euros en 2010) "est périmé avant même d'avoir été voté, compte tenu de l'absence d'éléments sur le futur emprunt national". C'est bien là le problème... Personne ne sait réellement vers où nous allons. Mais tout le monde sait que ça ne pourra pas durer éternellement.
Mercredi, l'Emirat de Dubaï s'est déclaré en quasi-faillite, incapable d'honorer ses engagements financiers. Le pays est à l'arrêt. Un paradis princier entame sa descente aux enfers... Etonnant, non ? Le début de l'effondrement économique global... récemment évoqué par la Société générale ?
Les mots ont un sens - 27.11.09
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