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21/02/2010

Bénéfices en hausse, salaires toujours en berne

Alors que le patronat parle de « sortie de récession », son discours sur la crise pour justifier la modération salariale commence à patiner. Les conflits sur les rémunérations se multiplient dans le commerce, les banques ou encore l’industrie.

Rigueur pour les uns, opulence pour les autres. D’un côté, le gel des salaires depuis de nombreuses années, et de l’autre, la folie des rémunérations des dirigeants des grandes entreprises et la volonté d’offrir les richesses produites aux actionnaires. Cela passe mal en période de crise. En une semaine, certaines entreprises du CAC 40, qui présentaient leurs résultats 2009, ont démontré que la rentabilité était de retour.

Total, Sanofi ou encore BNP Parias ont affiché chacun des profits compris entre 5 et 8 milliards d’euros, souvent supérieurs aux attentes des analystes. Principalement parce qu’elles ont pris très vite des mesures d’économie drastiques pour préserver leurs marges  : arrêt des investissements, suppression de postes, pression accrue sur les salaires et augmentation de la productivité du travail. Elles ont aussi été dopées par des aides publiques massives. D’autres ont réalisé des exercices moins spectaculaires. Mais qu’elles soient superbénéficiaires, bénéficiaires ou même déficitaires, elles ont toutes fait le choix de gâter leurs actionnaires. Après « deux années boursières calamiteuses, les entreprises se montrent plutôt généreuses en matière de versements de dividendes, même en cas de baisse des bénéfices », écrit en une la Tribune.

Des données qui relancent le débat

Ainsi, Michelin, qui a accusé une baisse de sa rentabilité de plus de 70 %, n’a pas fait fondre les dividendes de ses actionnaires. De son côté, la BNP Paribas proposera à ses détenteurs de capitaux une rémunération en hausse de 54 % par rapport à l’an dernier. Dans le même temps, les augmentations proposées aux salariés des entreprises du CAC 40 sont le plus souvent comprises entre 0,5 % et 1 %. Des données qui devraient relancer le débat qui a traversé l’année 2009 sur le partage de la valeur ajoutée. Le président de la République avait alors lancé l’idée d’un partage en trois tiers égaux des profits. Il fait mine de vouloir relancer le débat, mais les trois tiers ne semblent plus d’actualité. Or, aujourd’hui, les profits sont répartis de la manière suivante  : 57 % pour l’investissement, 36 % pour les revenus du capital, 7 % pour l’épargne salariale. Entre 1993 et 2007, les seuls dividendes versés aux actionnaires sont passés de 7 à 16 % de l’excédent brut d’exploitation des entreprises. À l’inverse, entre 1996 et 2006, les 10 % des salariés les moins bien rémunérés n’ont été augmentés que de 131 euros, tandis que les 0,1 % les mieux rémunérés ont, eux, touché 5 426 euros de plus, selon l’Insee.

Alors que le patronat tient des commentaires de « sortie de récession », son discours sur la crise pour justifier la modération salariale commence à patiner. Les conflits sur les salaires se multiplient dans le commerce, les banques ou encore l’industrie, dans cette période des négociations annuelles obligatoires. Les salariés exigent leur dû, souvent écœurés d’être si peu récompensés après les efforts réalisés en 2009. Certaines luttes sont dures, face à une direction qui ne lâche rien, comme chez Ikea. D’autres sont victorieuses, comme celle des salariés d’Autoliv, équipementier à Gournay-en-Bray (Seine-Maritime), qui, après quatre heures de grève, ont obtenu environ 3 % d’augmentation générale, après deux ans de diète salariale et deux plans sociaux.

Gels de salaires en prévision

Mais toutes ces luttes sont révélatrices d’un véritable malaise social sur le niveau des salaires en France. D’après une étude de l’Insee, le salaire était déjà, en 2007, « la première source d’insatisfaction des salariés par rapport à leur emploi ». Bien avant les conditions de travail, la stabilité de l’emploi et le temps de travail. L’année 2010 semble partie sur les mêmes bases. Selon une enquête du cabinet Mercer, réalisée auprès de 300 grandes entreprises, les revalorisations salariales ne devraient être que très légèrement supérieures à celles de 2009, et très faibles par rapport aux années « classiques ». Près d’une entreprise sur quatre prévoit des gels de salaire, un taux trois fois plus élevé qu’habituellement. Les conflits salariaux devraient continuer à fortement mobiliser.

Clotilde Mathieu

http://www.humanite.fr/2010-02-19_Politique-_-Social-Economie_Benefices-en-hausse-salaires-toujours-en

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