Sur le site Global Post , Fulvio Paolocci est revenu sur la situation des travailleurs marocains qui vivent, en Italie, dans un centre de regroupement en Italie près de San Nicola Varco, à 100 km au sud de Naples. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM), organisme intergouvernemental dont le siège est à Genève, avait en juillet dernier avait dans un rapport décrit leurs conditions de travail comme “proches de l’esclavage”.
Dans ce camp, quelque 1200 personnes squattent dans des immeubles abandonnés, sans eau courante ni électricité (photo de Fulvio Paolocci, ci-contre), au milieu des immondices. Ces immigrés, pour la plupart de jeunes Marocains, sont payés entre 15 et 25 euros pour travailler douze heures par jour dans les serres et les exploitations agricoles de la région, sans contrat de travail. Leurs employeurs leur confient les travaux les plus pénibles. “Nous sommes face à une urgence humanitaire car ces gens vivent dans des conditions insupportables. Leurs salaires sont bien inférieurs au minimum légal, c’est une forme d’esclavage”, a déclaré Flavio Di Giacomo, porte-parole de l’OIM en Italie. Le camp de San Nicola Varco, a-t-il précisé, n’est pas le seul de ce type dans le Mezzogiorno et même le nord de la péninsule, plus prospère, en compte plusieurs. “Cette situation concerne des milliers et des milliers d’immigrés”.
Le travail au noir, notamment dans le secteur agricole, est extrêmement répandu en Italie où il représente entre 15,9 % et 17,6 % du PIB du pays, selon des statistiques officielles citées par l’OIM.
Sabine Cessou, dans “Libération”, en mai dernier, avait décrit une situation similaire dans le village de Someren, aux Pays-Bas, dans la province du Brabant. Cinquante ouvriers agricoles étrangers, parmi lesquelles 38 Roumains et 12 Polonais et Portugais (photo ci-contre) , ont été «libérées» dans une ferme par les services sociaux du joug de leur patronne, le 17 mai, au cours d’un contrôle anti-incendie. La fermière, une femme de 46 ans, avait confisqué leurs passeports à ses employés et leur avait interdit de sortir de son exploitation. Au lieu des 13 euros de l’heure promis pour la cueillette d’asperges, elle ne leur versait que 4 euros de l’heure, avec 50 euros d’avance par semaine. Une paie engloutie par la boutique de la ferme, qui leur vendait les produits de première nécessité au prix fort.
Les récalcitrants étaient frappés et les autres menacés de violences. Les cueilleurs d’asperges devaient dormir à même le sol, dans des bâtiments sales, sans fenêtres et sans issues de secours en cas d’incendie. C’est pour ce motif que les services sociaux sont intervenus, tenant un moyen légal de forcer leur passage sur la propriété. Ils ont trouvé les ouvriers agricoles enfermés dans leur dortoir, tandis que la fermière protestait de son bon droit. Le sort réservé aux travailleurs de cette ferme était connu dans tout le village, et le maire de Someren a joué un rôle actif dans la descente des services sociaux, après avoir lancé plusieurs avertissements, en vain, à la fermière.
Ce n’était pas un cas isolé en Europe. Vous n’avez que peu ou pas du tout entendu parler de cette affaire qui s’est passée en Alsace. Une enquête a été ouverte concernant les conditions dans lesquelles étaient employées des travailleuses originaires d’Europe de l’Est pour la récolte des fraises et des asperges à Brumath (Bas-Rhin), à une quinzaine de kilomètres au nord de Strasbourg. Michel Arnould, du quotidien L’Alsace , s’était rendu sur place : “Un entrepreneur allemand exploite de longue date 10 hectares dédiés aux asperges, aux fraises et aux framboises. Pour loger une soixantaine de saisonniers, il a bâti une dizaine de préfabriqués proposant des chambres pour deux personnes ainsi qu’une cuisine collective, un réfectoire, des douches avec eau chaude et des sanitaires. Le tout est certes très simple, mais visiblement propre, en bon état et entretenu.”
Le problème, ce n’est pas le logement mais la rémunération. Nicula, une Roumaine qui parle un bon espagnol après plusieurs années passées en Andalousie, explique à l’AFP : “Le problème ici, ce n’est pas vraiment le logement, c’est l’argent. On ne sait pas quand on sera payé, on sait juste qu’on touche 50 centimes (d’euros) par kilo ramassé”. Selon elle, la journée de travail au champ, situé à “environ deux kilomètres” du campement et où il faut se rendre à pieds, commence vers 8h30, avec une pause à la mi-journée, puis reprend à 15h30 jusqu’à 19h00.
“Le salaire, explique Michel Arnould, est au rendement et abouti à un salaire horaire d’environ 4 à 5 €, alors que le Smic horaire agricole est de 8,71 € pointe, avec pertinence, la CGT. Une situation sur laquelle l’inspection du travail, qui a visité les lieux, se penche.” Dans un communiqué de presse titré « A l’heure de l’Europe de l’esclavagisme », la CGT « dénonce et condamne les conditions de vie, de logement scandaleuses imposées à des travailleuses ».
Voir sur France 24 , le reportage dans les Bouches-du-Rhône d’Elisabeth Scherrer et de Thomas Dzudzinski, “Les saisonniers agricoles, esclaves des temps modernes”.
Le Monde - 26.10.09
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