Olivier Vilain
Contrairement à ce que prétend le gouvernement, les patients sont encore les grands perdants du Projet de loi des finances de la Sécurité sociale. Coincés entre une nouvelle baisse de remboursement de médicaments et une hausse des tarifs des complémentaires santé, ils risquent de faire l’impasse sur certains soins. Pendant ce temps, la rente des assurances et des mutuelles augmente.
La rigueur va encore s’accentuer. Le gouvernement a présenté fin septembre son projet de loi de finance pour la Sécurité sociale de 2011. Objectif : économiser 2,5 milliards d’euros. Première mesure : une taxe sur le chiffre d’affaires des complémentaires santé, sans distinction entre celles qui sont à but lucratif, les assurances, et celles qui ne le sont pas, les mutuelles. La taxe devrait rapporter un milliard d’euros. Autre économie : la baisse du taux de remboursement de certains médicaments (vignette bleue) de 35% à 30%. Cette baisse sera mécaniquement compensée par une hausse de la prise en charge par ces mêmes complémentaires santé. Et cela fait dire au gouvernement que ce ne sont pas les ménages qui paieront cet énième rabotage de la Sécurité sociale, mais les complémentaires santé.
Ces mesures avaient été annoncées deux ans plus tôt, fin juillet 2008. « Le patient ne doit être en aucun cas perdant : aucune de nos mesures ne porte sur les assurés », promettait à l’époque Éric Woerth, alors ministre du Budget. « C’est bien sûr un mensonge, les mutuelles ont déjà prévenu qu’elles augmenteraient leurs primes », relève aujourd’hui Patrick Dubreil, président du Syndicat de la médecine générale (SMG). Dans une étude publiée le 28 septembre, l’UFC-Que Choisir confirme que les assurances complémentaires pourraient augmenter leurs primes de 48 euros par personne. « Soit une augmentation moyenne de 8% par rapport à l’année 2010 », souligne Grégory Carret, qui a dirigé l’étude.
Ouvriers et chômeurs, premiers touchés
Les mesures d’économies prévues par le gouvernement reprennent les recettes déjà employées ces dernières années : le remboursement de médicaments à vignette bleue – comme l’antispasmodique Spasfon ou le pansement gastrique Smecta – va baisser, alors que le ticket modérateur va augmenter pour certaines hospitalisations. « Depuis plus de 20 ans, ce sont les mêmes méthodes qui sont utilisées, mais cela ne marche pas, analyse Patrick Dubreil. Cette fois-ci, le gouvernement s’attaque même aux affections de longue durée. » Les personnes souffrant « d’hypertension artérielle isolée » seront exclues du dispositif de remboursement à 100%.
Une fois de plus, l’égalité de tous dans l’accès aux soins est battue en brèche. Entre 2002 et 2008, les dépenses qui ne sont plus remboursées par l’Assurance maladie ont bondi de 6% à 49%, selon l’étude de l’UFC-Que Choisir. Résultat, en 2008, chaque Français consacrait, en moyenne, 618 euros pour sa santé, contre 407 euros au début des années 2000.
Parmi les 10% des Français de plus de 18 ans déclarant avoir renoncé à des soins, un sur trois est dépourvu de couverture complémentaire, selon l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) [1]. Soit au moins un demi million de personnes. Avec l’augmentation des tarifs des assurances et mutuelles, ils seront de plus en plus nombreux à se retrouver dans cette situation. En première ligne : les bas revenus et les chômeurs, mais aussi les ouvriers et les employés. « Le fait d’appartenir à un ménage où le chef de ménage exerce une profession d’employé ou d’ouvrier augmente la probabilité de renoncer à des actes dentaires ou à l’achat d’optique », illustre l’Irdes [2] .
Marché opaque
Celles et ceux qui disposent d’une mutuelle ou d’une assurance santé ne sont pas pour autant à l’abri. Le projet de loi sur les finances de la Sécurité sociale fait des assurances complémentaires un « passage obligé pour l’accès aux soins ». « Pas de complémentaire, pas de soins ! », s’alarme Alain Bazot, président de l’UFC Que choisir.
L’association constate que les Français se sont rués ces dernières années sur les complémentaires. Mais, que ce marché est totalement « grippé », notamment en raison d’une « opacité dans les offres », selon Alain Bazot. L’association propose donc la mise en place d’un indice indépendant traduisant le taux de remboursement de chaque complémentaire par rapport aux dépenses engagées par leurs clients. Cet indice doit faciliter la comparaison entre les différentes offres et permettre au consommateur de jouer son rôle de « régulateur ». « Comme il est possible de connaître la consommation de carburant d’un véhicule ou celle en énergie des produits d’électroménager, il doit être possible de connaître la performance d’un contrat d’assurance au regard des sommes redistribuées aux assurés en fonction des sommes prélevées », explique l’association.
Depuis leur arrivée dans la santé, au début des années 2000, les assureurs taillent des croupières aux mutuelles. Leur part de marché s’est envolée de 31%. « Pourtant, ce sont les acteurs qui remboursent le moins bien », s’étonne Daniel Bideau, responsable des questions de santé chez l’UFC-Que Choisir. Dans un marché opaque, les clients se laissent embrouiller par les publicités, dont le budget a bondi de 250% en cinq ans !
Pour financer leurs campagnes publicitaires, les complémentaires peuvent puiser dans un trésor de guerre qui ne cesse de grossir : la part des primes non redistribuées aux clients sous forme de remboursement – la différence entre ce que l’assuré paie et ce que son assurance lui rembourse – est passée, en moyenne, de 37 à 107 euros, entre 2001 et 2008. Une belle rente ! « Le patient ne doit être en aucun cas perdant », qu’il disait...
Ces mesures avaient été annoncées deux ans plus tôt, fin juillet 2008. « Le patient ne doit être en aucun cas perdant : aucune de nos mesures ne porte sur les assurés », promettait à l’époque Éric Woerth, alors ministre du Budget. « C’est bien sûr un mensonge, les mutuelles ont déjà prévenu qu’elles augmenteraient leurs primes », relève aujourd’hui Patrick Dubreil, président du Syndicat de la médecine générale (SMG). Dans une étude publiée le 28 septembre, l’UFC-Que Choisir confirme que les assurances complémentaires pourraient augmenter leurs primes de 48 euros par personne. « Soit une augmentation moyenne de 8% par rapport à l’année 2010 », souligne Grégory Carret, qui a dirigé l’étude.
Ouvriers et chômeurs, premiers touchés
Les mesures d’économies prévues par le gouvernement reprennent les recettes déjà employées ces dernières années : le remboursement de médicaments à vignette bleue – comme l’antispasmodique Spasfon ou le pansement gastrique Smecta – va baisser, alors que le ticket modérateur va augmenter pour certaines hospitalisations. « Depuis plus de 20 ans, ce sont les mêmes méthodes qui sont utilisées, mais cela ne marche pas, analyse Patrick Dubreil. Cette fois-ci, le gouvernement s’attaque même aux affections de longue durée. » Les personnes souffrant « d’hypertension artérielle isolée » seront exclues du dispositif de remboursement à 100%.
Une fois de plus, l’égalité de tous dans l’accès aux soins est battue en brèche. Entre 2002 et 2008, les dépenses qui ne sont plus remboursées par l’Assurance maladie ont bondi de 6% à 49%, selon l’étude de l’UFC-Que Choisir. Résultat, en 2008, chaque Français consacrait, en moyenne, 618 euros pour sa santé, contre 407 euros au début des années 2000.
Parmi les 10% des Français de plus de 18 ans déclarant avoir renoncé à des soins, un sur trois est dépourvu de couverture complémentaire, selon l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) [1]. Soit au moins un demi million de personnes. Avec l’augmentation des tarifs des assurances et mutuelles, ils seront de plus en plus nombreux à se retrouver dans cette situation. En première ligne : les bas revenus et les chômeurs, mais aussi les ouvriers et les employés. « Le fait d’appartenir à un ménage où le chef de ménage exerce une profession d’employé ou d’ouvrier augmente la probabilité de renoncer à des actes dentaires ou à l’achat d’optique », illustre l’Irdes [2] .
Marché opaque
Celles et ceux qui disposent d’une mutuelle ou d’une assurance santé ne sont pas pour autant à l’abri. Le projet de loi sur les finances de la Sécurité sociale fait des assurances complémentaires un « passage obligé pour l’accès aux soins ». « Pas de complémentaire, pas de soins ! », s’alarme Alain Bazot, président de l’UFC Que choisir.
L’association constate que les Français se sont rués ces dernières années sur les complémentaires. Mais, que ce marché est totalement « grippé », notamment en raison d’une « opacité dans les offres », selon Alain Bazot. L’association propose donc la mise en place d’un indice indépendant traduisant le taux de remboursement de chaque complémentaire par rapport aux dépenses engagées par leurs clients. Cet indice doit faciliter la comparaison entre les différentes offres et permettre au consommateur de jouer son rôle de « régulateur ». « Comme il est possible de connaître la consommation de carburant d’un véhicule ou celle en énergie des produits d’électroménager, il doit être possible de connaître la performance d’un contrat d’assurance au regard des sommes redistribuées aux assurés en fonction des sommes prélevées », explique l’association.
Depuis leur arrivée dans la santé, au début des années 2000, les assureurs taillent des croupières aux mutuelles. Leur part de marché s’est envolée de 31%. « Pourtant, ce sont les acteurs qui remboursent le moins bien », s’étonne Daniel Bideau, responsable des questions de santé chez l’UFC-Que Choisir. Dans un marché opaque, les clients se laissent embrouiller par les publicités, dont le budget a bondi de 250% en cinq ans !
Pour financer leurs campagnes publicitaires, les complémentaires peuvent puiser dans un trésor de guerre qui ne cesse de grossir : la part des primes non redistribuées aux clients sous forme de remboursement – la différence entre ce que l’assuré paie et ce que son assurance lui rembourse – est passée, en moyenne, de 37 à 107 euros, entre 2001 et 2008. Une belle rente ! « Le patient ne doit être en aucun cas perdant », qu’il disait...
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