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09/09/2010

L’héritage cancérigène de l’armée américaine en Irak

Nolwenn Weiler

L’occupation de l’Irak a pris fin le 31 août. Officiellement du moins. Aux côtés des 50.000 « conseillers » militaires états-uniens, il reste les victimes collatérales de cette guerre baptisée « Liberté pour l’Irak » : des centaines, voire des milliers de civils atteints de cancers et autres maladies incurables, probablement dues à l’usage d’armes à l’uranium appauvri, en particulier à Falloujah.

Ce sont des reportages de journalistes qui ont, au départ, révélé le nombre important de cancers et malformations au sein de la population de Falloujah. Située à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de Bagdad, cette ville de 300.000 habitants a été le théâtre, au printemps puis à l’automne 2004, d’offensives de l’armée américaine contre des insurgés irakiens retranchés dans la cité. Celle-ci a été soumise à d’intenses bombardements. Nombre de munitions utilisées sont soupçonnées de contenir de l’uranium appauvri, qui permet d’augmenter la puissance de perforation des obus contre des cibles blindées ou des bâtiments.

Un chercheur britannique, le professeur Chris Busby, du « Department of Molecular Biosciences, University of Ulster », connu pour ses recherches sur les effets des radiations et également pour ses prises de position (il est membre du Green Party, le parti écologiste britannique, et anime un Comité européen sur les risques liés aux radiations), décide de mener une étude sur place. Une équipe de onze chercheurs débarque à Falloujah. Chargée d’interroger les populations sur les cas de mortalité infantiles, leucémies, cancers ou malformations, ils n’ont pas la tâche facile. Ni les autorités américaines ni les autorités irakiennes ne souhaitent que des chercheurs s’intéressent à Falloujah. Un avertissement est même envoyé, par voie de télévision, aux populations locales, prétendant que les enquêteurs sont des terroristes, et que ceux et celles qui osent répondre pourraient se voir arrêter !

Une mortalité infantile record

Cependant, 711 foyers leur ouvrent leurs portes. 4.843 personnes répondent au questionnaire. L’étude, publiée le 6 juillet dernier dans le journal scientifique « International Journal of Environmental Research and Public Health », livre des résultats dramatiques. Les habitants de Falloujah ont 4,22 fois plus de risques de développer un cancer que les Égyptiens ou les Jordaniens. Cette probabilité est 12,6 fois plus grande chez les enfants de moins de 14 ans. Le risque de leucémie chez les personnes de 0 à 34 ans est 38,5 fois plus élevé. La mortalité infantile atteint des taux records : 80/1000, soit 4 fois les taux égyptien et jordanien. À partir de 2009, ce taux passe même à 136/1000 !! Le « sexe ratio » (le taux comparé d’hommes et de femmes au sein d’une population) est totalement anormal dans la tranche des 0-4 ans vivant à Falloujah où l’on enregistre un déficit de naissances de garçons de 18% ! D’une manière générale, le nombre de naissances a chuté, sans que l’on sache encore si cela est dû à une baisse de la fertilité ou à un nombre plus élevé de fausses couches... Ou aux deux.

Espérons que cette première étude alertera l’Onu sur ce « syndrome de Falloujah ». S’il est finalement prouvé – les analyses d’échantillons relevés à Falloujah devraient être bientôt réalisées – que ces populations sont bien victimes de radiations d’uranium, le nombre de personnes atteintes de cancers menace de croître à long terme. Les radiations provoquent en effet des changements au niveau de l’ADN dont les effets se font en général sentir sur les descendants. C’est ainsi que des malformations génétiques sont observées sur les enfants des enfants des survivants d’Hiroshima. À Falloujah, on n’est pas près d’oublier l’Amérique !

http://www.bastamag.net/article1165.html

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