Jamais l’extrême droite n’a remis
en cause l’exploitation capitaliste.
Alain Duhamel est le nouveau Marx. Dans sa chronique hebdomadaire de Libération,
il a découvert « la nouvelle lutte
des classes ». Le Front national, écrit-il, est devenu le parti de la classe ouvrière et donc « la lutte des classes a changé de visage », entendons qu’elle a pris celui de Marine Le Pen... Allons, c’est un peu court. Parce que cette dernière colle habilement à certaines problématiques sociales et que sa démagogie n’est pas sans effets, elle serait devenue révolutionnaire ? La lutte des classes, Alain Duhamel l’ignore-t-il, c’est le rapport d’exploitation capitaliste. Ce rapport qui fait que
le propriétaire des capitaux et des moyens de production va tout faire pour tirer le plus possible du travail salarié. Augmenter les cadences, allonger les horaires, remettre en cause le repos hebdomadaire ou les congés payés, repousser l’âge du départ en retraite, peser sur les salaires ou, tiens, charger les immigrés de tous les maux pour mieux diviser la classe ouvrière, attiser les rancœurs
et les frustrations pour les transformer en racisme
et en xénophobie. Ce camp est celui de Marine Le Pen,
du Front national et de toutes les extrêmes droites. Jamais aucune d’elles n’a remis en cause l’exploitation capitaliste et toutes l’ont servie en détournant les révoltes, les colères et la contestation sociale.
Mais il arrive parfois qu’Alain Duhamel dise
des choses justes. Ainsi : « Dans les milieux populaires, la part de l’indignation, du ressentiment, de la protestation
ne reculera que si la situation économique et sociale s’améliore de façon significative et durable. » Mais comment ? Eh bien, semble lui répondre
la une du même journal,
en mettant la gauche
« au boulot. » Et le nouveau directeur
de sa rédaction, Nicolas Demorand, s’en explique dans son éditorial :
« À quatorze mois de la présidentielle, les socialistes
n’ont rien ou pas grand-chose à dire au peuple.
Pas d’alternative crédible ou tout simplement audible
sur le chômage et l’emploi, l’industrie, la mondialisation. (…) Peut-être que tout cela existe dans les placards
de la Rue de Solferino : si c’est le cas, il devient urgent
de le faire savoir. » Soit, la gauche, pour Nicolas Demorand, c’est le PS. Mais pourquoi ne visite-t-il pas les placards du Front de gauche, du Parti communiste ou du Parti de gauche, ou mieux, pourquoi ne pas rendre compte d’une manière ouverte de ce qui se dit dans
les débats qu’ils organisent un peu partout dans le pays, avec précisément l’ambition de construire réellement
une et des alternatives, non seulement à Nicolas Sarkozy,
mais à la politique du capital qu’il sert ? Pourquoi encore, et ce n’est qu’un exemple, les projets de régression sociale de la Commission de Bruxelles, que nous évoquions mercredi, sont-ils restés dans les placards à Libération
et n’ont trouvé aucune place dans ses colonnes ? Pourquoi, ces jours-ci, les débats des élections cantonales, qui touchent aussi à la démocratie locale et aux finances publiques, y sont-ils ignorés ? Ça aussi, c’est la gauche
au boulot.
La gauche au boulot ? Mais toutes celles
et ceux qui rejettent la politique de Nicolas Sarkozy et de la droite, un débat public polarisé sur les thèmes du Front national, mais qui veulent parler emploi, salaires, services publics, acquis sociaux, parler d’une tout autre utilisation de l’argent, des profits, du crédit, ne demandent que ça, une gauche au boulot. Nombre d’entre eux s’y sont mis. Mais il est de bon ton
de les ignorer.
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