Artémis
Au delà de cette sensation diffuse qui submerge bon nombre de nos concitoyens force est de constater que chaque jour des milliers de personnes en situation de fragilité sociale ( handicapés, personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté, personnes percevant les minima sociaux, chômeurs etc...) se heurtent à une administration ou des structures publiques ou privées qui sont de plus en plus distantes, impersonnelles et irresponsables . ( CAF, Pôle emploi, offices HLM,CPAM, conseils généraux sans compter les établissements bancaires ou de crédit EDF etc...)
Ce mur d'indifférence augmente le stress et parfois le désarroi de ceux qui attendent que leur dossier dont dépend leur maigre revenu soit traité rapidement avec courtoisie et humanité.
Je vais vous raconter une petite histoire dont je viens d'être témoin qui va vous faire toucher du doigt les difficultés d'un citoyen ordinaire dans une société si ordinaire d'indifférence.
Marie est une artiste au talent de sculpteur reconnu.
Il y a quelques années encore elle vendait ses oeuvres et pouvait en vivre correctement.
Mais la crise est passée par là et ses oeuvres se sont de moins en moins vendues.
Un jour il n'y eu plus de commande et ce, malgré les expositions, malgré les manifestations culturelles, malgré les multiples contacts pris par Marie .
Marie fut dans l'obligation de demander assistance : c'est ainsi qu'elle fut admise il y a 3 ans de cela à percevoir le RMI..
Percevoir moins de 450 euros par mois ce n'est pas facile mais elle s'est accrochée animée par une force créatrice redoublée .
Marie a de la chance car sa famille lui verse des aides afin qu'elle puisse continuer à acheter les matériaux nécessaires à la production de ses statues et organiser ou participer à des expositions car pour vendre il faut rester présent, se montrer , louer des emplacements ou des salles d'exposition , se déplacer et tout cela coûte cher .
Si Marie ne percevait pas ces petits revenus complémentaires versés par sa famille elle ne pourrait plus produire exposer et même se nourrir se loger !
Marie n'est pas un cas isolé des milliers d'artistes sont dans cette situation .
Et puis la grande vague du "travailler plus pour gagner plus" est arrivée avec sa cohorte de suspiçion concernant les chômeurs, les malades, les allocataires des minima sociaux :
- s'ils sont chômeurs c'est qu'ils ne veulent pas travailler car en France il y a des emplois !
- s'ils sont en arrêt maladie c'est qu'ils sont fainéants car en France on se porte bien !
- s'ils perçoivent les minima sociaux se sont des profiteurs car en France l'ascenseur social n'est pas en panne !
C'est ainsi que depuis plusieurs mois lois et décrets renforçant les contrôles fleurissent comme muguet au mois de mai sans compter les notes internes aux organismes chargés du calcul et versement des prestations qui organisent une véritable chasse aux "fraudeurs".
Quelques cas médiatisés le tour est joué : comme l'air de la calomnie bien connu par les mélomanes l'opinion publique s'insurge s'indigne et fait des amalgames et surtout généralise....
Les récentes déclarations sur le Figaro du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé Xavier Bertrand sont trés significatives.
En effet notre ministre qui lance un grand plan contre la fraude sociale n'hésite pas à déclarer " Des millions de nos concitoyens payent chaque jour des cotisations, font des efforts, rencontrent des difficultés. Dans le même temps, d'autres ne payent pas ce qu'ils devraient payer ou touchent des prestations auxquelles ils n'ont aucun droit. Ils volent la protection sociale, ils volent les Français.
En ces temps où l'on demande des efforts aux Français, notamment pour réduire les déficits, chaque euro injecté dans le système de protection sociale doit aller à ceux qui en ont besoin. Certains cherchent à faire une différence entre les abus et les fraudes. Pour moi, c'est exactement la même chose: il n'y a pas de petite fraude, pas de système D. Ce sujet me tient à cœur depuis des années. La fraude est l'ennemie de la valeur travail.
Alors les directives pleuvent et ruissellent jusqu'au dernier échelon de la hiérarchie des CAF des CPAM de pôle emploi des conseils généraux bref c'est la grande lessive.
Marie vient d'être prise dans ce tourbillon au relan de dénonciation et de lacheté .
Marie touche le RSA qui a remplace en 2009 le RMI. ( photographie salauds de pauvres - la traversée de Paris )
Ayant au cours des derniers mois vendu une sculpture elle en fait la déclaration comme il se doit.
15 jours plus tard elle reçoit son RSA entièrement amputée du montant de la vente / Marie ne perçoit que 100 euros au lieu des 400 prévus.
Erreur manifeste de la CAF pense Marie qui téléphone sans trop s'inquiêter à la CAF dont elle dépend pour faire rectifier la situation .
Marie va apprendre que pauvreté signifie indifférence et parfois humiliation .
Tout d'abord Joindre le bon interlocuteur n'est pas chose aisée les agents de la CAF dont elle dépend ne reçoivent que sur rendez vous et le délai est long. Le contact téléphonique semble le moyen le plus facile pour régler le problème.
La CAF a mis en place à l'instar de tous les services publics et grandes entreprises un répondeur automatique qui vous propose de multiples choix avant de tomber dans le bon service . Marie qui n'a pas l'habitude se trompe en tapant sur les touches de son téléphone elle met plus de 10 minutes avant d'entendre une voix humaine enfin celle d'un agent qui ne peut pas traiter de suite le dossier et lui indique avant de raccrocher prestement sans formule de politesse " on vous rappellera"
Marie attend un jour deux jours trois ... on ne la rappelle pas , alors elle recommence ses coups de fil ..pour avoir la personne en charge de son dossier.
A nouveau la boite vocale qui lui demande de taper sur les touches de son téléphone , pour finalement tomber sur un agent qui indique que l'agent en charge de son dossier est absent et qu'il la rappellera à son retour !
Marie commence à s'inquiéter car elle n'a que 100 euros pour vivre et la régularisation de son dossier devient une urgence .
Elle s'impatiente et téléphone le lendemain pour avoir une personne qui traite son dossier.
Après trois appels elle a un agent qui regarde semble t- il son dossier et lui déclare sans sourciller " de quoi avez vous à vous plaindre vous touchez 100 euros certains n'ont rien !" et ajoute"faite une réclamation par écrit on vous répondra car pour moi il n'y a pas d'erreur dans le calcul de votre allocation."
Marie commence à culpabiliser c'est vrai il y a plus pauvre .. l'urgence de son dossier lui semble dérisoire au regard d'autres situations.
Marie ne percevra donc pas le complément de son allocation elle n'a que 100 euros pour vivre elle doit faire un recours pour faire rectifier la situation
Son dossier ne sera traité dans le meilleur des cas sous délai minimal de deux mois .
Marie devra donc attendre trois longs mois avec seulement 300 euros pour vivre... .. comment va t-elle payer son loyer son téléphone son chauffage sa nourriture comment comment..? Marie panique Marie qui avait jusqu'à présent maintenu la tête hors de l'eau commence à suffoquer ..
Puis vient le coup de grâce : un petit courrier de la CAF pour l'étude de son dossier d'allocation logement avec cette phrase " nous vous demandons les justificatifs suivants... et de nous expliquer vos moyens d'existence ...
Comment expliquer ses moyens d'existence si ce n'est par les documents demandés : déclaration d'impôt ..
Marie reprend son téléphone elle ne sait pas comment justifier ses moyens d'existence hormis les papiers qu'elle a déjà fournis sa déclaraion d'impôt .
Marie ne peut pas joindre au téléphone le signataire du courrier alors elle insiste et dans la même journée elle téléphone trois fois.
La troisième fois son interlocutrice très énervée lui indique qu'il faut qu'elle arrête de harceler les agents de la CAF qui n'ont pas que cela à faire et que le signataire du dossier prendra contact avec elle sous quinzaine !
Marie va voir en urgence une assistante sociale et elle apprend qu'elle a oublié de déclarer l'aide familiale de 200 euros par mois qui lui permet de " survivre " ... et les textes du RSA sont clairs les aides récurrentes doivent être déclarées elles rentrent dans le calcul du RSA.
Marie l'ignorait ..... et devient AINSI pour la CAF une fraudeuse .. elle va alimenter les statistiques ministérielles des "vilains fraudeurs" qui volent les Français. Elle va justifier ainsi le grand plan "blanchissement des pauvres "mis en place par le gouvernement dont Xavier Bertrand n'est que le pâle exécutant....
Marie qui percoit de la CAF 400 euros par mois qui arrivait avec l'aide de sa famille à maintenir sa situation en vivant avec 600 euros par mois risque d'être comdamnée à rembourser plus de 3000 euros à la CAF : une somme considérable qu'elle ne pourra pas payer ni sa tante sa seule famille qui prélevait les 200 euros sur sa petite retraite car sa tante vient de décéder.
Marie qui approche les soixante ans risque fort de dormir dans la rue d'ici quelques mois.
100 000 sans abris il y en aura 101 000 avec Marie...
Pour aller plus loin lire les dangers du RSA DANS LA RUBRIQUE RSA RMI
ET ICI (Revenus pris en compte pour le RSA)
http://emotions.20minutes-blogs.fr/archive/2011/03/20/chronique-d-une-mort-sociale-annoncee.html
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