La récente tentative de la compagnie pharmaceutique internationale Bayer de faire adopter de nouvelles mesures visant à empêcher la concurrence des médicaments génériques en Inde a échoué.
La Haute Cour de Delhi a refusé de supprimer dans la loi indienne les mesures qui existent sur les brevets et qui assurent l'accès aux médicaments essentiels à des prix plus abordables pour les patients dans le besoin. Bayer a l'intention de faire appel de cette décision devant la Cour Suprême.
« Nous nous réjouissons du rejet de l'action en justice déposée par Bayer - nous voyons en Inde plusieurs compagnies pharmaceutiques multinationales tenter, par des procédures juridiques, d'étouffer la concurrence des génériques », explique le Dr Tido von Schoen-Angerer, responsable de la Campagne de MSF pour l'accès aux médicaments essentiels.
« En rejetant l'appel de Bayer, les tribunaux indiens ont assuré que les "garde-fous" de protection de la santé publique peuvent être utilisés pour élargir la production générique des médicaments vitaux, y compris les antirétroviraux, et en faire profiter des millions de malades en Inde et ailleurs. »
Bayer cherchait à étouffer la concurrence générique en retardant la validation de commercialisation des médicaments génériques en Inde.
Il s'agissait plus précisément pour Bayer d'empêcher l'autorité indienne de règlementation des médicaments d'enregistrer les versions génériques des médicaments sous brevet avant le délai d'expiration de ces brevets.
En effet, l'enregistrement d'un générique après expiration du brevet aurait pour conséquence d'empêcher l'entrée rapide de nouveaux concurrents sur le marché et donc de prolonger le monopole du fabricant, seul détenteur du brevet. Pareille mesure entraverait l'accès aux médicaments essentiels car la concurrence des génériques est le seul moyen de réduire de manière durable le coût des médicaments.
Cette décision est la dernière en date d'une série de tentatives des compagnies pharmaceutiques et des gouvernements occidentaux visant à démanteler les dispositions "pro-santé" existant dans la loi sur les brevets en Inde.
L'Inde, qui compte parmi les plus grands producteurs de médicaments génériques, est aussi le principal fournisseur des pays en développement, et de l'organisation Médecins Sans Frontières (MSF), à laquelle elle fournit plus de 80 % des médicaments contre le sida.
Lorsqu'elle a rejoint les rangs de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1995, l'Inde a accepté de durcir sa règlementation sur les brevets pour les médicaments mis sur le marché après 2006, tout en protégeant, par des mesures légales, l'accès aux médicaments. Ce sont précisément ces mesures que les compagnies pharmaceutiques contestent aujourd'hui.
L'absence de concurrence générique permet aux compagnies pharmaceutiques de pratiquer des prix très élevés. De ce fait, un durcissement de la législation sur les brevets mettrait en péril l'accès à la plupart des nouveaux médicaments pour des millions de patients.
Afin d'éviter des conséquences aussi désastreuses, les gouvernements ont la possibilité d'adopter des mesures légales connues sous le nom d'accord " ADPIC" (Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce).
Dans l'éventualité où Bayer ait gagné son procès, l'utilisation de ces mesures, notamment celle des licences obligatoires et de la fameuse "disposition Bolar " aurait perdu toute portée.
Cette affaire constitue l'une des deux affaires les plus marquantes actuellement déposées devant des tribunaux par des compagnies pharmaceutiques contre les autorités indiennes. Dans une affaire très semblable, la compagnie pharmaceutique suisse Novartis a contesté une autre des mesures vitales de protection de la santé publique en Inde.
Mais après l'échec de son premier procès en 2007, Novartis a fait appel auprès de la Cour suprême. MSF continuera de suivre de près l'évolution de ces deux affaires.
http://www.msf.fr/2010/03/11/1674/victoire-de-linde-contre-bayer-pour-lacces-aux-medicaments/
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