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07/01/2011

Les privatisations contre l’intérêt général

Des intellectuels du plus grand renom ont tiré la sonnette d’alarme : le pilotage par les entreprises conduit à négliger la recherche fondamentale, dont les bénéfices sont rarement immédiats mais qui ouvre ensuite des horizons immenses. La soumission de l’université au bon vouloir des actionnaires menace du même enfermement la formation des cadres du pays dans la logique du profit à courte vue. C’est la dynamique même d’une civilisation, sa capacité à relever les défis auxquels elle est confrontée qui s’en trouvent altérées.
L’imposition des politiques de privatisation dans les domaines essentiels de la vie humaine suscite de plus en plus de couacs. La SNCF fait rouler ses TGV à 320 km/h mais il faut vingt-six heures à un train pour relier Strasbourg à Nice et Port-Bou. La logique du « business » s’est traduite par 25 000 suppressions d’emplois en neuf ans et les « réserves en personnel de bord » ne sont plus pourvues alors qu’elles auraient dû permettre de pallier la défaillance de conducteur. Au nom de la « concurrence libre et non faussée », les « aiguilleurs n’ont plus de contact avec les autres services », déplore la CGT cheminots. Et voilà qu’un train à grande vitesse se retrouve à Nantes plutôt qu’à Rennes. À quoi sera réduit, demain, le service postal français, si les règles de la concurrence et de la rentabilité en guident le fonctionnement ? Les banlieues et les zones rurales seront délaissées car trop coûteuses à desservir et la situation qui voit des régions entières ne plus bénéficier de l’acheminement de leur journal quotidien le samedi se généralisera. Cette orientation constituera à la fois un gâchis monstrueux pour toute la société et un fromage coulant en dividendes pour les entreprises qui lorgnent le marché. C’est leurs voix qu’entendent, hélas, la Commission européenne, le FMI et la Banque mondiale, qui l’exigent des peuples du monde.
Cette confusion entre l’intérêt général, le service public et les appétits des multinationales fait mauvais ménage avec la sécurité. Le scandale du Mediator l’atteste après la gabegie du vaccin contre la grippe porcine. Qu’en sera-t-il des hôpitaux si leur gestion est livrée aux grandes sociétés du secteur ? Lorsqu’une base aérienne à Creil voit son organisation confiée à un géant du CAC 40, chacun mesure la pente dangereuse qui menace la défense nationale. Lorsque les États-Unis et ses affidés ont confié des missions en Irak et en Afghanistan aux mercenaires des multinationales de la sécurité, on a vu ce qu’il en a coûté aux populations civiles, réduites à des variables d’ajustement.
Parler des bonnes manières faites par Manuel Valls à Nicolas Sarkozy, sur les 35 heures après l’avoir accompagné sur la sécurité, n’est pas s’éloigner du sujet. Parie-t-il sur un succès du président sortant en 2012 qui lui laisserait l’espoir de se construire, durant ces cinq années, un profil à la Tony Blair ? En tout cas, le député maire d’Évry, qui fait passer en comparaison Dominique Strauss-Kahn pour un parangon de la gauche, vient de confesser sur Canal Plus qu’il n’avait jamais lu l’Humanité et lui préférait le Figaro. Tout s’explique ! Comme il doit écouter plus souvent Michel Sardou que Jean Ferrat, dédions-lui des extraits d’une chanson qu’on croirait faite pour lui : « La porte du bonheur est une porte étroite / On m’affirme aujourd’hui que c’est la porte à droite (…) On m’a dit tu comprends, tes idées archaïques / Ne feront qu’aggraver la crise économique »…
Patrick Apel-Muller

http://www.humanite.fr/05_01_2011-les-privatisations-contre-l%E2%80%99int%C3%A9r%C3%AAt-g%C3%A9n%C3%A9ral-461428

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