À procura de textos e pretextos, e dos seus contextos.

27/01/2009

A quoi joue la diplomatie française?

e crois avoir atteint aujourd’hui le summum de l’indignation ...

Alors que je m’étais porté volontaire pour partir de manière "urgente" en mission humanitaire à Gaza avec d'autres collègues médecins et infirmières, j'ai cru comprendre suite à un coup de fil téléphone ce soir donc le vendredi 23 janvier, juste 48h après la demande de notre CHU de "constituer des équipes chirurgicales pour assurer la relève d'une équipe sur place à partir du 27 janvier 2009", que la situation s'étant nettement améliorée à Gaza, la France a décidé d"alléger le dispositif sanitaire sur place

A ce stade j'aurais pu être indigné voire scandalisé par ce discours, mais non devant tant de cynisme on ne peut être que révulsé !

Il était clair que cet établissement dépendant du ministère de la Santé avec lequel j'étais en contact depuis quelques jours, attendait le feu vert du Quai d'Orsay pour nous envoyer, mais j'étais à milles lieux de soupçonner ou même d'imaginer une réponse pareille.

J'avais réussi en peu de temps à me libérer et à motiver, en plus d'une IBODE et du médecin anesthésiste qui m'accompagnaient pas mal d'autres médecins ou infirmières qui ont immédiatement accepté de partir sans condition pour les prochaines missions.

Les derniers préparatifs administratifs étant satisfaits, j'attendais juste un coup de fil pour partir.

Quand le téléphone a sonné je pensais sincèrement que le coordinateur qui m'avait pourtant demandé le matin même de lui faxer des papiers administratifs du conseil de l'ordre, allait me signaler un départ précipité avant la date prévue.

Mais non vu, que "la situation s'étant nettement améliorée à Gaza, la France a décidé d"alléger le dispositif sanitaire sur place", nous restons sur place ...

Quand j'ai entendu cette phrase les bras m'en sont tombés ...

Je n'ai pu m'empêcher de signaler à mon interlocuteur, (visiblement très gêné), que j'ai eu au téléphone une responsable au siège de MSF qui m'a affirmé que la situation était encore plus dramatique que ce qu'ils pensaient et qu'ils avaient encore besoin de médecins.

Les équipes sont en plus très embêtées avec des lésions de brûlures très particulières occasionnés par ce qui semble être du phosphore blanc (car il continue de se consumer même après l'arrêt de l'exposition) et demandent à Israël et en particulier à l'armée israélienne de leur fournir la composition exacte des produits utilisés pour mieux soigner les blessés.

Le contact que j'ai eu n'a pas souhaité commenter cette décision d'ajourner la mission, mais un chirurgien infantile du CHU qui attendait lui aussi de partir depuis quelques jours m'a clairement évoqué les tergiversations du Quai d'Orsay et l'ambiguïté de Bernard Kouchner dans ce dossier. D'autant qu'il voulait absolument partir plus tôt à Gaza avant une autre mission ailleurs, car l"urgence infantile y était la bas, "prioritaire".

Le lecteur se fera sa propre opinion en lisant l'excellent article sur "parole de démocrate" et surtout en visionnant la vidéo dans laquelle Leila Shahid, la déléguée générale de la Palestine auprès de l’Union européenne, qui est pourtant convaincue que l’Union européenne est l’avenir du Proche Orient et des Palestiniens, fait face non pas à un adversaire en la personne du représentant de l'état d'Israël, (ce qui est somme toute normal), mais à 2 adversaires puisque Bernard Kouchner quitte allègrement et publiquement le rôle d'arbitre pour endosser celui de l'acteur engagé. Engagé non pas pour la paix ou pour le droit humanitaire, ou que sais-je, mais pour la "sécurité d'Israël" qui est une notion certes à défendre par tout démocrate qui se respecte, mais pas au prix du mépris (de la population de Gaza !) ...

Je met volontairement et ironiquement (la population de Gaza) entre parenthèses pour bien signaler que Bernard Kouchner, l'a aussi, volontairement et ironiquement mise entre parenthèses. Le représentant d'Israël souvent très prolixe n'aura même pas besoin de parler pour défendre la position de son pays qui devra un jour répondre de ses crimes.

Mais bon, quand on apprend, que la France a d'autres priorités ... Nicolas Sarkozy n'a pas tardé à demander à Bernard Kouchner, dès le retrait de l'armée Israélienne "d'engager des actions immédiates contre la contrebande des armes", plutôt que de consolider le dispositif humanitaire.

L'urgence précise le communiqué de l'Elysée "est de consolider l'actuel cessez-le-feu, ce qui passe par l'action humanitaire, l'arrêt total du trafic d'armes vers Gaza, la réouverture durable des points de passage, la reconstruction et la réconciliation inter-palestinienne". Sur l"ensemble des points cités et qui me semblent tous très importants aussi bien les uns que les autres, je note que l'argument sécuritaire Israélien prend le dessus.

Vous lisez bien, le fondateur de Médecins sans Frontières puis de Médecins du Monde va se charger non pas d'engager enfin une aide humanitaire digne de ce nom ou de s'assurer que les denrées alimentaires peuvent enfin être acheminée sans problèmes, mais juste "d'engager des actions immédiates contre la contrebande des armes" .... alors que la situation sanitaire sur place de plus en plus dégradée est des plus alarmantes.

Avec la tragédie de gaza, la diplomatie Française ne trouve rien de mieux que de se fourvoyer publiquement et sans honte. Elle a atteint des niveaux d'incurie qu'elle n'aurait sans doute jamais atteint s'il y avait à la place de Bernard Kouchner, un Dominique de Villepin ou mieux un Hubert Védrine ...

Illustration : Au lieu de me lancer dans le terrorisme le plus noir, j'ai préféré, du moins pour le moment, me contenter de me défouler artistiquement. "Carré noir sur fond noir entouré de noir" est une œuvre originale exécutée pour la circonstance. (c) FT le 23/01/09

Mise à Jour du 26/01/09 : le présent billet a légèrement été remanié aujourd'hui dans la forme (mais pas dans le fond) en raison de quelques imperfections qui m'ont été signalées ce jour par téléphone et comme je maitrise mal le langage diplomatique je dirais suite à des "pressions amicales". Je m'empresse donc de corriger mais je maintiens dans l'ensemble mon analyse de la situation et la thèse générale de cet article à la lumière d"éléments objectifs du domaine public ne remettant nullement mon devoir de réserve dans le cadre de cette mission et d"éléments recueillis dans la presse comme les communiqués officiels de l"Elysée. Je mesure aussi qu'il me sera difficile de m'associer à l'avenir à toute mission d'un organisme (que je ne nommerais pas) contrôlé par une administration tierce dont les motivations ne sont pas seulement "sanitaires ou médicales" mais avec lequel je souhaitais partir car il m'aurais été possible de soigner des blessés aussi bien à Gaza côté palestinien ou en Israël si l'urgence sanitaire le nécessitait sans me poser de questions. Mais comme j'ai horreur qu'on me dicte ce que je dois dire ou pas, je prend la décision aujourd'hui de partir plutôt avec Médecins Sans Frontières. Et m'excuse par avance auprès de la cellule du ministère de la santé que je ne met en aucune manière en cause dans les décisions prises mais je m'interroge sur la responsabilité du Quai d'Orsay face à ces crimes contre l"humanité perpétrés à Gaza. Mon prochain billet sera consacré à l'analyse de l'excellent film "Danse avec Bachir" qui évoque les massacres de Sabra et Chatilla. et la "Complicité coupable" sur laquelle je met un énorme bémol.

In
http://www.taha.fr/blog/

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