Beaucoup ont été surpris par les violences [dites] urbaines des semaines dernières. Ayant publié en 2003 un livre intitulé Violences urbaines, violence sociale (Fayard, 2003) dont le point de départ était une « émeute urbaine » dans la ZUP de Montbéliard, ces événements ne pouvaient pas constituer pour nous une surprise. Les dernières phrases de notre livre évoquaient l’ampleur des discriminations subies par les jeunes Français issus de l’immigration et s’interrogeaient sur les conséquences sociales de l’impossible accès à l’emploi stable pour la majorité d’entre eux. Et le livre s’achevait par ces mots : « autant de bombes à retardement !... ». Il n’était pas besoin d’être devin pour anticiper l’avenir tant la récurrence des émeutes urbaines depuis quinze ans en France s’inscrit dans un « ordre des choses » qui renvoie à des phénomènes structurels tels que : chômage des jeunes non ou peu diplômés, précarisation sans issue, aggravation de la ségrégation urbaine, échec scolaire, paupérisation et déstructuration des familles populaires habitant en HLM, discriminations à l’embauche et racisme ordinaire, etc. Autant de phénomènes qui produisent, à la longue une violence sociale multiforme qui ne se donne pas toujours à voir mais qui, condensée et coagulée, peut éclater soudainement. Il suffit d’un détonateur. Donner un sens à une émeute urbaine, qui produit toujours un effet de surprise, voire de stupéfaction, c’est avant tout mettre au jour cette violence invisible, peu spectaculaire - si bien qu’on n’en parle peu dans les médias - qui, seule, peut expliquer l’espèce de rage autodestructrice qui la caractérise.
A l’opposé de cette perspective sociologique qui passe nécessairement par un détour par l’histoire et la compréhension de la genèse des dispositions, le discours sur les violences urbaines, qu’il soit tenu par les représentants des institutions (police, justice, école) ou par les hommes politiques, s’attache presque toujours à la recherche et à la désignation des « coupables » - ceux qui ont participé directement aux événements (les « casseurs » ou les « voyous » comme le dit aujourd’hui N. Sarkozy) - qu’il conviendrait de neutraliser au plus vite. A entendre les innombrables commentaires qui sont faits autour de ce type d’événements, on a l’impression que, pour rétablir le calme et pacifier le quartier, il suffirait de cibler des « micro-groupes » qui se constituent autour des meneurs (des « caïds ») et de les isoler durablement. Ce discours sécuritaire a pour particularité d’occulter la genèse des attitudes et des groupes étiquetés comme déviants. Il se nourrit d’une étiologie sommaire du phénomène de violence qui repose, au fond, sur une dichotomie rassurante : il y aurait, d’un côté, un noyau de « violents », d’« irréductibles », de « sauvages », dont on n’ose pas dire qu’ils sont irrécupérables et non rééducables (ce que pensent pourtant nombre de responsables...), et de l’autre, les jeunes « non violents », qui se laisseraient entraîner et qu’il conviendrait donc de protéger contre la contamination des premiers.
On reconnaît là les grandes lignes du discours du Ministre de l’Intérieur qui, en durcissant son langage, semble vouloir renouer avec le vocabulaire des classes dominantes du XIXe siècle confrontées à des émeutes populaires. Ainsi, les émeutiers ont, dès les premiers jours, été rebaptisés du nom de « racaille » par Sarkozy. Ces paroles, qui s’inscrivent dans une logique de provocation calculée, ont joué un rôle majeur dans la contagion des « émeutes » de Clichy-sous-Bois à la région parisienne et à la France entière. Cette « sémantique guerrière », pour reprendre les mots de l’autre Ministre (Azouz Begag), voudrait faire croire que, dans les cités il y a, d’un côté, les « délinquants », les « voyous » et, de l’autre, des « bons » jeunes (des « vrais jeunes » comme l’a dit une fois le Ministre à la télévision). Comme s’il suffisait de séparer ainsi le bon grain de l’ivraie.
Pour apporter la preuve de son interprétation des émeutes - des bandes de « voyous » qui sèment le désordre dans les quartiers - le Ministre de l’Intérieur a sorti de son chapeau des données statistiques qui établiraient que 80% des jeunes déférés au parquet seraient « bien connus des services de police ». Or, cette statistique brandie comme un trophée, et reprise sans recul par les médias audiovisuels, est plus que contestable. Les premières comparutions immédiates des « émeutiers » au tribunal de Bobigny ont fait apparaître que la majorité d’entre eux n’ont pas d’antécédents judiciaires et ne peuvent donc être étiquetés comme « délinquants ». La plus lourde peine jusqu’alors prononcée (quatre ans de prison pour un incendiaire d’un grand magasin de tapis) concerne un jeune de vingt ans, intérimaire, titulaire d’un bac pro de peinture, fils d’ouvrier français habitant la banlieue d’Arras. La sociologie des jeunes déférés au Parquet (près de 3000) reste à établir, mais les données tirées des audiences montrent, à l’opposé des déclarations du Ministre de l’Intérieur, qu’il s’agit de jeunes « ordinaires », appartenant aux milieux populaires : certains sont scolarisés, d’autres ont des petits boulots (intérimaires, vendeurs, commis de cuisine) ou peuvent encore être scolarisés. Sans casier judiciaire, ils se sont précipités dans le mouvement, attirés par l’effervescence du moment, portés par le même sentiment de révolte, sur fond de partage des mêmes conditions sociales d’existence et de conscience d’appartenance à une même génération sacrifiée. En ce qui concerne les mineurs, le juge Jean-Pierre Rosenczveig constate qu’au tribunal pour enfants de Bobigny, sur 95 mineurs déférés devant la justice, seuls 17 d’entre eux étaient connus de la justice : « et encore, quelques-uns étaient connus non pas pour des faits de délinquance, mais parce qu’ils faisaient l’objet d’une mesure d’assistance éducative pour enfance en danger » (Le Figaro du 19/11/05).
Pour comprendre ces premières données statistiques, qui contredisent la thèse commode qui impute les émeutes urbaines à la seule action malfaisante de la « racaille », rappelons d’abord que la jeunesse des cités constitue un univers social différencié, puis nous analyserons les raisons qui peuvent conduire des jeunes « ordinaires » à rejoindre le mouvement lancé par la fraction la plus potentiellement violente des jeunes de cité. Contrairement à la représentation qui en est souvent donnée, le groupe social que constitue la jeunesse des cités ne se réduit pas sa fraction la plus visible dans l’espace public, celle du noyau dur des jeunes chômeurs (certaines ZUS comptent 40% de chômeurs parmi les 15-25 ans). Il comprend aussi, d’une part, des jeunes actifs, principalement ouvriers ou employés, le plus souvent employés comme intérimaires ou en CDD, et d’autre part le groupe formé par des jeunes encore scolarisés, où l’on trouve aussi bien des élèves orientés dans des filières qu’ils perçoivent comme de relégation scolaire (BEP, voire bac pro, classes de STT) que des lycéens d’enseignement général et des étudiant(e)s - inscrits à la fac mais aussi en IUT ou en BTS (très rarement dans des classes préparatoires aux grandes écoles). Ajoutons qu’il existe aussi une minorité de jeunes appartenant aux professions intermédiaires (enseignants, éducateurs, animateurs, etc.) qui continuent d’habiter chez leurs parents ou qui ont choisi de prendre un appartement dans leur cité pour continuer à y vivre.
Les coupures peuvent être fortes entre ces divers groupes, notamment entre les fractions opposées que constituent, d’une part, la catégorie des étudiants bien partis dans leur quête de diplômes et, d’autre part, celle des jeunes de la cité qui, étant chômeurs ou scolarisés malgré eux dans des filières de lycée professionnel qu’ils n’ont pas choisies, se perçoivent souvent comme sans avenir. Ces derniers, les plus disponibles temporellement, sont principalement ceux qui se réunissent en bas des tours, à discuter, s’ennuyer (« tenir les murs »), fumer du shit, « délirer », non sans un sens développé de l’autodérision. Ces bandes ne sont pas des mondes fermés et étanches : peuvent s’y adjoindre, par moments et selon les circonstances, d’autres jeunes mieux scolarisés qui peuvent y retrouver le plaisir de l’entre-soi masculin. L’essentiel est de dire que, par-delà les différences statutaires internes, il existe une forme de porosité entre les diverses fractions de la jeunesse des cités. Et c’est cette porosité qui va faire que, par exemple, un « bac+2 », possédant un BTS et qui a connu une forte discrimination dans sa recherche de stage, peut très bien à un moment donné se joindre ponctuellement au combat de ses compagnons d’infortune, qui sont souvent des « bacs-5 ». Parce que, à un certain moment, ce qui les rassemble est plus fort que ce qui les sépare, à savoir cette très forte communauté d’expérience qui soude entre eux les garçons ayant grandi ensemble dans la cité et qui en gardent des liens très puissants (« à la vie, à la mort »). Communauté d’expérience, vécue souvent dans la bande, marquée par le même dénuement matériel, les mêmes humiliations sociales liées à la pauvreté endémique et à la couleur de la peau (contrôles au faciès à répétition, police de plus en plus agressive et brutale pour les Noirs et les Arabes qui constituent, on le sait, la grande majorité des habitants des cités de la région parisienne). On ne peut pas, par exemple, comprendre la récente et vive prise de position de Lilian Thuram, « milliardaire du foot », contre les propos de Sarkozy (« Il faut savoir pourquoi les gens deviennent comme ça ! Il n’y a pas d’agressivité gratuite, je ne crois pas à ça. Il faut chercher derrière ») si l’on ne sait pas que sa conscience politique s’est forgée dans sa jeunesse en cité, au contact des discriminations et du racisme qui étaient le lot quotidien de sa vie d’alors. Ce sont des stigmates qui ne s’effacent pas, quel que soit le niveau de revenu atteint, contrairement à ce que pense le Ministre qui a voulu disqualifier ces propos de l’International de football en ironisant sur son niveau de vie.
La véritable question sociologique que posent ces émeutes est donc la suivante : comment expliquer la participation de ces jeunes de cité « ordinaires » à ces événements ? Tout semble s’être passé comme si les comportements d’autodestruction, jusque là réservés à la fraction la plus humiliée du groupe des jeunes de cité, s’étaient progressivement diffusés vers les autres fractions qui, jusqu’à récemment, avaient espéré « s’en sortir » par l’école ou, sinon, par leur ardeur au travail. C’est peut-être bien cela, la véritable nouveauté de ce mouvement : la désespérance sociale, autrefois réservée aux membres les plus dominés du groupe - et qui s’exprimait notamment par l’addiction aux drogues, l’adoption de conduites à risques (vols, conduite de « fous » au volant, etc.) - semble bien avoir gagné d’autres fractions du groupe des jeunes de cité - les jeunes ouvriers et les « bacheliers » - qui en étaient jusqu’alors un peu mieux protégées. Parmi ces derniers, beaucoup ont perdu patience et espoir à force de se cogner contre le mur de la discrimination et du racisme et ont peu à peu accumulé un énorme ressentiment. En fait, l’avenir objectif de ces jeunes de cité s’est dramatiquement obscurci pour tous lors de ces dernières années. Nul n’ignore que la situation sur le front de l’emploi s’est fortement dégradée depuis 2002. On sait peut-être moins que cette dégradation a touché de plein fouet les jeunes de cité. Pour le groupe des « bacheliers » (nous désignons par là les jeunes titulaires d’un bac ou d’un bac+2 qui peinent à trouver une place sur le marché du travail), la discrimination à l’embauche pèse fortement en exerçant une grande violence sur ceux qui la subissent, et surtout les petites portes de sortie (contrats aidés, emplois-jeunes) qui existaient pour les titulaires du bac se sont peu à peu fermées. S’il faut insister sur la disparition des emplois-jeunes, c’est parce qu’ils avaient permis à nombre de ces bacheliers de cité de rebondir, de reprendre confiance en eux après leur échec dans leurs études supérieures, leur donnant un statut, un revenu, des possibilités de s’installer et de rêver à un avenir meilleur. Pour le groupe des jeunes ouvriers, la précarité s’est fortement accrue pour les emplois non qualifiés (pour arriver à ce petit chef-d’œuvre de dérégulation du marché du travail que constituent les contrats « nouvelles embauches »). En région parisienne où les possibilités sur le marché du travail sont plus grandes (usines, bâtiment, hôtellerie-restauration, tertiaire non qualifié), une partie non négligeable de garçons de cité travaille dans des emplois d’exécution : en usine, à Roissy, dans le tertiaire non qualifié (tris postaux, centres d’appel, etc.). Or depuis le 11 septembre, Roissy qui était un gros employeur de jeunes de cité semble bien avoir fait le ménage, craintes de menace terroriste à l’appui. Citroën Aulnay a récemment « licencié » 600 intérimaires, Poissy annonce 550 « licenciements » d’intérimaires en décembre 2005. Les petites embellies sur le marché du travail n’ont pas duré, la grisaille est revenue. La dégradation a aussi concerné les conditions de travail. Stress, fatigue, « ambiance pourrie », ce sont les mots qui reviennent le plus souvent pour parler des nouveaux services ou des ateliers en flux tendus. Beaucoup des jeunes de cités qui travaillent voient leur situation comme un échec : ils restent dans des petits boulots, en CDD ou en intérim. Même s’ils n’emploient pas ce mot, ils sont « ouvriers » sans qualification et ont de grandes chances de le rester. Ils n’évolueront pas dans la société et reproduiront le modèle paternel qu’ils avaient presque toujours voulu « fuir ». Comme le dit l’un d’entre eux lors du reportage récemment diffusé par Envoyé Spécial « on est des manuels... comme nos pères (sourire triste), avec un tout petit quelque chose en plus, c’est tout ». C’est ce sentiment de surplace social qui est à leurs yeux insupportable. Comme un refus viscéral d’accepter cette condition ouvrière qui, pour eux, est désormais liée à l’iniquité.
Ajoutons aussi que les expériences de travail qui sont les leurs peuvent être extrêmement difficiles à vivre. La condition des enfants d’immigrés est devenue infiniment plus compliquée avec la montée du terrorisme porté par l’islamisme radical. Dans l’espace public, les contrôles se multiplient, mais dans les ateliers aussi, un « beur » est suspect par essence : soit comme potentiel allié des entreprises terroristes, soit comme « musulman » opposé à la loi sur le voile, etc. Ainsi, Karim, 22 ans, raconte comment dans son travail les ouvriers de son secteur ne l’ont jamais appelé par son prénom mais par son surnom censé faire rire tout le monde : « Al Quaïda ». Un étudiant nantais raconte dans un mémoire qu’un ami, intérimaire comme lui aux Chantiers de Saint-Nazaire, qui se prénomme Farid, s’est fait d’emblée surnommer par son chef d’équipe « petit Popaul » (et c’est comme ça qu’il sera appelé lors de ses six mois d’intérim). On pourrait multiplier le nombre de ces anecdotes qui en disent long sur le coût que ces jeunes de cité doivent payer pour leur intégration professionnelle. Ces expériences de travail, ces anecdotes, ne cessent de circuler dans les cités : non seulement il y a de la discrimination mais, une fois franchie timidement la porte de l’entreprise, il y a aussi cette sourde hostilité, et aussi parfois un racisme ouvert, que doivent affronter au travail les jeunes de cité. Ils n’ont pas l’impression d’être bienvenus dans le monde du travail. C’est peut-être là une grande différence avec leurs aînés ouvriers (appartenant à la génération de la marche des beurs) qui entraient dans un monde ouvrier peut-être aussi méfiant voire hostile vis-à-vis des « jeunes Arabes », mais qui était plus structuré, plus syndiqué. Le monde des ouvriers d’après la « classe ouvrière » est plus anomique, miné par la précarité mais aussi par les jalousies et les luttes de concurrence exacerbées par la nouvelle organisation du travail. Conséquence : se faire sa place au travail pour les jeunes de cité exige toujours plus d’efforts, d’abnégation, de retenue... Or ils appartiennent à une génération sociale, marquée par la vie en cité, qui ne veut pas jouer les « rabaissés », qui ne veut pas reproduire les logiques d’humiliation vécues par leurs parents.
Les expériences sociales vécues par les garçons de cité - au travail, dans l’espace public, dans les rapports avec la police (point essentiel que nous ne développons pas ici) - se diffusent par les conversations, sont transmises dans le groupe des jeunes et aussi dans les familles. Pas étonnant dans ce contexte que les filles de cité, bien qu’elles subissent des formes quotidiennes, parfois violentes, de domination masculine de la part des garçons (l’une d’entre elle déclare non sans humour à un journaliste de Politis : « nous, dans la cité, c’est le couvre-feu permanent »), n’en ont pas moins exprimé leur solidarité muette avec les garçons lors des émeutes : elles aussi vivent la cité au quotidien, voient la dégradation de leurs conditions matérielles d’existence et savent d’expérience que le racisme est sexué ; qu’il touche beaucoup plus les garçons que les filles. Même si elles sont souvent conduites à condamner cette violence gratuite, contre les écoles notamment, elles ne peuvent pas s’empêcher de comprendre la désespérance de leurs frères. Pas étonnant non plus si les parents immigrés (père comme mère) peuvent aussi manifester une grande ambivalence face à la révolte de leurs enfants. On a souvent observé qu’à la condamnation la plus ferme de la violence (parce que « ce n’est pas une solution ») succède, presque dans le même mouvement, l’évocation timide de « circonstances atténuantes » à leurs conduites qui ont pour noms : chômage, racisme, discrimination. Pas étonnant enfin si les cadets des familles immigrées, qui voient tous les jours la situation dans laquelle se trouvent leurs aînés - à 25-30 ans, ils habitent encore chez leurs parents et naviguent de CDD en CDD sans espoir de travail stable -, sont tentés de se radicaliser de plus en plus tôt. Ce groupe des mineurs habitant en cité, qui est décrit comme étant de plus en plus « dur », n’est pas né par génération spontanée mais constitue, au contraire, une génération sociale qui a grandi dans la crise et dans la précarité, qui a bien souvent assisté au « désastre » dans leurs familles : disqualification sociale des pères, divorce ou séparation des parents, chômage récurrent des frères aînés, impossibilité pour beaucoup d’entre eux de « faire leur vie », prison ou internement psychiatrique, suicide, etc.
Pour comprendre les émeutes urbaines, il faut avoir pu mesurer et sentir à quel point est décisive l’expérience vécue, de plus en plus tôt, de la désespérance sociale. On s’aperçoit donc que la réalité sociale que vivent les jeunes de cité est fort éloignée de la sociologie de bazar dont nous gratifie, chaque jour, notre Ministre de l’intérieur. La fuite en avant du gouvernement dans la logique répressive (couvre-feu de trois mois) illustre une profonde méconnaissance des structures mentales des populations qui habitent en banlieue. Abdemalek Sayad, sociologue, grand connaisseur de l’immigration algérienne en France, écrivait dans un de ses textes de La Misère du monde que « le monde de l’immigration et l’expérience de ce monde sont sans doute fermés à la plupart de ceux qui en parlent ». Ce qui inquiète dans la réaction de nos gouvernants, c’est leur grande difficulté, d’une part, à mesurer la fragilité sociale des habitants de cité, ce monde de souffrance qui s’enracine dans une histoire (comme le montre de manière exemplaire l’histoire de la famille de Fouad, ce jeune de 19 ans violemment frappé par des policiers devant les caméras de France 2, retracée dans Le Monde du 16 novembre) et, d’autre part, à percevoir le potentiel d’énergie et de ressources que recèle cette jeunesse des cités. Encore faut-il pouvoir un temps suspendre ses préjugés de classe et de caste et considérer la commune humanité qui habite « au-delà de nos périphs ».
http://www.liens-socio.org/article.php3?id_article=977
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