Lundi, après les places asiatiques, les Bourses européennes se sont envolées : Wall Street a ouvert en hausse, l’euro a repris des couleurs face au dollar. Les taux des obligations d’État grecques à dix ans se sont sensiblement détendus. Ces réactions interviennent à la suite de la publication, par les ministres des Finances de la zone euro, dans la nuit de dimanche à lundi, de ce qu’ils ont appelé un "mécanisme de stabilisation européen". Ce dispositif est articulé autour de deux volets. En premier lieu, des prêts de la Commission européenne pouvant aller jusqu’à 60 milliards d’euros pour les pays de la zone euro en difficulté, accompagnés de contreparties sévères. A cette fin, la Commission empruntera sur les marchés. En second lieu, un système de prêts et garanties pouvant aller jusqu’à 440 milliards d’euros est mis sur pied. Une société spéciale empruntera sur les marchés avec une garantie apportée par les États de la zone euro proportionnellement à leur participation dans le capital de la Banque centrale européenne. La France apportera une garantie de 88 milliards d’euros qui, selon la ministre des Finances, n’alourdira la dette française que si elle est effectivement utilisée. Le FMI, pour sa part, pourrait apporter une participation supplémentaire de 250 milliards d’euros et ce "à travers ses lignes de crédit habituelles" selon le communiqué final des ministres.
Parallèlement à ce mécanisme, la Banque centrale européenne, en "toute indépendance", spontanément en quelque sorte, a annoncé "des interventions sur le marché obligataire privé et public de la zone euro" sans préciser immédiatement leur forme. On apprenait, dans l’après-midi d’hier, que la banque centrale allemande, la Bundesbank, et la Banque de France avaient commencé à acheter des obligations d’État européens. La plupart des grandes banques centrales (États-Unis, Japon, Canada, Grande-Bretagne, Suisse, etc.) ont annoncé, dans la nuit de dimanche à lundi, des mesures concertées afin d’alimenter les marchés et les banques -et particulièrement celles de la zone euro- en liquidités, essentiellement en dollars.
En outre, les ministres des Finances sont tombés d’accord pour dire que "les projets de consolidation budgétaire et de réforme fiscale seront accélérés là où c’est justifié", Lisbonne et Madrid ont promis des mesures d’économies supplémentaires pour réduire leurs déficits en 2010 et en 2011, et les présenteront lors de la prochaine réunion des ministres européens des Finances, le 18 mai. Mais ce durcissement va bien au-delà de l’Espagne et du Portugal. Les chefs d’État ou de gouvernement de la zone euro, lors de la réunion préalable à celle de leurs ministres des Finances, qu’ils ont tenue vendredi 7 mai, ont en effet à la fois avalisé le prétendu plan d’aide à la Grèce avec son cortège de mesures draconiennes et déclaré que "l’assainissement des finances publiques est une priorité pour chacun d’entre nous, et nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour atteindre nos objectifs budgétaires". Ils ont affirmé être "tous prêts à prendre les mesures nécessaires pour accélérer l’assainissement". Ce point a été particulièrement réclamé par la chancelière allemande, Angela Merkel.
Ces mesures de "secours" de la zone euro risquent plutôt d’enfoncer encore davantage celle-ci dans la crise. Elles ne visent pas, en effet, à consolider et développer la dépense publique. Leur objectif est d’éviter un effondrement des titres publics de la zone euro qui aurait un effet en cascade sur tous les systèmes bancaires et financiers de la planète, y compris aux États-Unis (ce qui explique les interventions répétées du président Obama dans le débat), sur tous les porteurs de titres de dettes publiques européens. Par ailleurs, des deux côtés de l’Atlantique, on craint que ne se renouvelle la situation de 2008 avec une paralysie du marché interbancaire, chaque banque ayant peur de prêter aux autres, craignant qu’accablées de titres européens de mauvaise qualité, ces dernières ne puissent la rembourser.
Par ailleurs, ces mesures sont contradictoires. Elles visent à soulager les budgets publics mais elles vont accroître l’endettement des États auprès des marchés financiers. La contradiction est d’autant plus explosive que les plans d’austérité adoptés vont anémier encore plus une croissance déjà fragile.
Pierre Ivorra
http://www.humanite.fr/Un-plan-au-secours-de-l-Europe-ou-des-marches
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