Isabelle Moreau
L’esprit fort a-t-il un sexe au début de l’époque moderne ? Selon Londa Schiebinger (The Mind has no sex?, 1989) le cartésianisme rompt avec la tradition médicale en rendant impossible la liaison entre sexe et tempérament. En témoigne notamment le cartésien Poullain de la Barre et son livre De l’égalité des deux sexes, publié en 1673. C’est à la lumière de cette thèse que je voudrais évaluer la position des libertins érudits, et ainsi aborder la question du genre masculin, dans sa relation supposée privilégiée à l’incrédulité et au rejet des superstitions. Pour La Mothe Le Vayer, Naudé ou encore Cyrano, en effet, il n’existe pas de raison universelle « asexuée ». Ces libertins rejettent le dualisme cartésien et disqualifient la notion même de sens commun, pour mieux promouvoir une faculté de bien juger ou « Ingenium », directement héritée de Charron. Pour comprendre la masculinité de l’esprit fort, il faut ainsi revenir aux origines médicales de la hiérarchie entre les esprits, construite à partir de l’ancienne théorie humorale et tempéramentale héritée de Hippocrate, Aristote et Galien, retravaillée par Huarte en 1575, reprise ensuite par Charron et par sa postérité libertine. En revenant sur les discours médicaux et philosophiques qui construisent la masculinité de l’esprit fort, je montrerai comment cet idéal se construit sur un modèle de masculinité monologique (certes capable de degrés et de variations), plutôt que par opposition au féminin. - Texte
Isabelle Moreau, « Hiérarchie des esprits et esprit fort : le discours médical », Les Dossiers du Grihl [En ligne], 2010-01, mis en ligne le 07 mai 2010, Consulté le 10 mai 2010. URL : http://dossiersgrihl.revues.org/4001
À procura de textos e pretextos, e dos seus contextos.
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