En entrant dans le capital des grandes banques, les Etats semblent participer non plus au sauvetage des institutions financières mais à leur restructuration, renforçant les responsables de la crise sans chercher à assainir le système.
Les nouvelles se ressemblent mais en apparence seulement: Berlin entre dans le capital de la Commerzbank à hauteur de 25% de son capital, l’OCDE annonce que les banques auront besoin de nouveaux fonds aussi longtemps qu’elles ne seront pas débarrassées de leurs avoirs "toxiques", la Bank of China a perdu en un jour 5,6% de sa valeur dès lors que UBS se retire de son capital tout comme Li Ka Shing, magnat de la finance hongkongaise. La Bank of Scotland (elle-même en difficulté) pourrait en faire autant.
Les nouvelles se ressemblent mais en apparence seulement. Car désormais l’Etat semble participer non plus au sauvetage des institutions financières mais à leur restructuration. Cela avait été la première vision du plan Paulson, en ligne droite de l’orthodoxie néolibérale financière.
Sans vouloir se perdre dans les détails des fusions acquisitions, Berlin ne fait que faciliter l’achat de la Dresdner Bank par la Commerzbank. Il semblerait que le parti-pris du moment est de se débarrasser du plus grand nombre d’institutions financières petites et moyennes, et de ne laisser que quelques géants à chaque pays.
Les Etats renforcent les responsables de la crise
Or, une des raisons de la crise actuelle, c’est justement le rôle joué par ces géants (City Bank, UBS AG, Bank of America, etc) dans l’élaboration de produits toxiques, le rôle joué par leurs succursales dans les places offshore et la difficulté de les contrôler. Ainsi, l’Etat, s’engage dans un processus de renforcement non pas d’une solution mais du problème lui-même, tandis que les institutions bancaires intermédiaires et petites, qui ne régissaient souvent que les comptes courants, se meurent sans que personne ne s’en soucie.
Les autres victimes de cette restructuration semblent être les institutions financières gérant des clients hyper fortunés. Mais dans ce cas les victimes, a priori, ne seront pas à plaindre. Et pourtant. La perte de plusieurs milliers de milliards pose problème. Apparemment déconnectés de l’économie réelle, ils étaient en fait utilisés pour les produits "gris". Ceux qui, à travers le marché obligataire, les "one perpus compagnies", les "hedge fonds", les "trusts" et leurs produits dérivés, transformaient les places offshore en machines d’investissement pour les pays émergeant et du tiers-monde, sous la forme certes contestée de panachage d’argent légal et illégal, à travers des opérations financières, visant une réinsertion globale. Ce marché s’effondre littéralement. Ainsi, non seulement la confiance interbancaire freine le crédit classique, mais aussi la place offshore cesse de financer par ses « produits d’insertion ».
Interdire à ces banques d'utiliser les places offshore n'est pas envisagé
Des pays comme la Malaisie, la Thaïlande, la Turquie, le Mexique etc, se voient amputés d’une manne qui, tout en étant suspecte de procédures de blanchiment et de fraude fiscale, n’était pas moins un outil de développement.
On pourrait considérer, naïvement, que cela participe à l’assainissement du système financier. On aurait tort. En effet, une fois encore on déclare qu’il faut en finir avec les places offshore, chose impossible. Mais ce qui est possible, interdire aux grands groupes financiers de s’installer et d'agir au sein de ces places, on s’abstient même d’y penser.
A très court terme, des banques géantes vont désormais remplacer les institutions "du deuxième étage" -toutes ces petites banques des îles Caïman, de Vanuatu et de centaines d’autres places-, contrôlant et monopolisant l’économie grise, qui sera autant plus difficile à combattre.
L’expérience montre que dès lors qu’on identifie des pratiques de ce genre chez les géants, à commencer par City Bank, on baisse les bras. Au moins, les "International Business Corporations", les enfants chéris des places offshore étaient des proies relativement faciles… si un jour la volonté politique s’affirmait.
in Rue89
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