Les dirigeants européens, réunis hier soir à Bruxelles, confirment
leur tentation d’une dérive autoritaire
et centralisée pour imposer
à toute l’Europe une super-austérité qui tue le malade
au lieu de soigner la crise.
Les politiques d’austérité des dirigeants de la zone euro souffrent déjà d’un terrible passif. Mises en œuvre pour tenter de réduire les déficits d’États surendettés après le renflouement du système financier lors du krach de 2007-2008, elles n’ont fait qu’aggraver les problèmes. Au point de pousser l’euro au bord du gouffre et derrière lui la construction européenne. Pourtant les chefs d’État, réunis pour un sommet dit de la dernière chance hier soir à Bruxelles, font part de leur détermination à… poursuivre toujours plus fort dans la même direction.
La Grèce poussée dans le vide
Les peuples sont étranglés. La croissance est en berne. La Grèce, au bord de la faillite, a été poussée dans le vide. Et en France plusieurs spécialistes annoncent désormais que le pays s’inscrit « dans une perspective récessive ». Mais rien y fait, la ligne reste la même, celle soumise au diktat des marchés financiers. Et la puissance dominante, l’Allemagne, a imposé ses vues. En matière de restructuration de la dette grecque, une décote de 50 % était envisagée (et non plus de 21 % comme convenu en juillet lors du précédent sommet extraordinaire), moyennant un plan de recapitalisation des banques qui pourrait dépasser les 100 milliards d’euros.
L’élargissement de la capacité du Fonds européen de stabilité financière (FESF), destiné à « secourir » les États de la zone euro en difficulté, est prévu. Non pas aux conditions de Paris, qui a un moment envisagé d’autoriser ledit Fonds à emprunter directement auprès de la BCE. Angela Merkel y a mis un veto catégorique et Nicolas Sarkozy s’est incliné. Le FESF devrait être abondé par des investisseurs extérieurs, selon un mécanisme technique très complexe. Dont l’objectif est que les États « pourvoyeurs du Fonds » qui sont aussi les mieux notés ne soient pas contraints de remettre trop la main à la poche. Comme Paris qui risque la perte de son sacro-saint triple A.
Rome, priée de se serrer la ceinture
Parmi les investisseurs extérieurs, les regards se tournent avec insistance vers la Chine pour qu’elle place en Europe une partie de ses gigantesques excédents. Le président du FESF, Klaus Regling, est attendu dès demain à Pékin, qui serait prêt à un accord. D’autres pays émergents pourraient en faire autant. Moyennant un engagement des Européens à renforcer encore leurs disciplines budgétaires.
Pour faire passer les nouvelles « purges » induites par leur stratégie, les dirigeants européens sont prêts à impulser une dérive autoritaire et centralisée au nom de la « gouvernance européenne ». Pour mettre au pas tous ceux qui ne respecteraient pas les normes du pacte euro plus. « Quand on a une monnaie unique, cela veut dire qu’il faut intégrer davantage nos politiques budgétaires et fiscales », plaidait hier matin Alain Juppé sur France Inter, agitant le drapeau fédéraliste européen. Athènes, mise sous tutelle, ou Rome, priée de se serrer la ceinture, après une visite éclair de Jean-Claude Trichet, président de la BCE, savent déjà très précisément ce que cela veut dire : nouvelles coupes sociales, nouveaux reports de l’âge de départ à la retraite, nouvelles pressions sur les salaires, nouvel étranglement des services publics, nouveaux rationnements de la santé ou de la culture. Avec donc en prime un recul démocratique. Arrêtons le massacre. Des choix radicalement différents sont indispensables pour mettre l’euro et la construction européenne à l’heure des aspirations profondes à la solidarité et à l’émancipation des peuples de l’UE.
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