"Bernard Madoff s'offre une pyramide à 50 milliards de dollars. "Haro sur les escrocs !" clament les érudits de tous les continents. Fannie, Freddie, spécialistes des Subprimes et autres "responsables" de la crise financière tapent dans les milliers de milliards, mais c'est la faute à pas-de-chance... Vraiment ?
Pyramide instable
Bernard Madoff a arnaqué la planète finance de 50 milliards de dollars. Le plus simplement du monde. Il promettait à de riches investisseurs des retours sur investissements hors normes : 11% par an, quelle que soit la météo. Et ça marchait. Et puisque ça marchait, de plus en plus d'investisseurs voulaient en être et le petit génie voyait affluer les milliards par palettes entières. Le hic, c'est que l'argent entrant n'était jamais investi, il servait simplement à rémunérer les intérêts des plus anciens et le reste finissait dans les poches de Madoff. Cette méthode s'appelle la "Pyramide de Ponzi", du nom de l'inventeur de ce schéma. Elle fonctionne tant que les investisseurs se bousculent au bas des escaliers, poussant les précédents vers le haut. Mais lorsqu'il n'y a plus personne en bas de la pyramide, ou que quelques mauvais coucheurs demandent à retirer leur mise de départ, alors ça coince. L'ouvrage s'écrase, et ses ingénieurs restent prisonniers des décombres.
D'un Ponzi à l'autre
50 milliards de dollars. Un tremblement de terre dont l'onde de choc résonnera longtemps. Un milliard d'euros pour les banques françaises, au minimum, 3 milliards pour l'Espagne, autant pour la Suisse et la Grande-Bretagne, etc. Le monde entier se réveille éberlué. Ou presque. Girish Reddy, directeur financier de Prisma Partners, fonds américain d'investissement spéculatif, a déclaré au New-York Times : "les résultats étaient trop beaux pour être vrais et depuis longtemps". Paul Jorion nous apprend aussi que Franco Modigliani, Prix Nobel d'économie, écrivait en 1992 : "une banque dans une position délicate ne doit pas automatiquement déposer son bilan tant qu'elle est à même de verser à ses épargnants des intérêts, faisant pour cela appel à ses réserves, ou liquidant certains de ses actifs, mais surtout, en utilisant la technique dite 'de Ponzi' : en attirant de nouveaux clients". Revendre du capital pour financer des intérêts. Merci du conseil...
Et les Subprimes dans tout ça ?
L'aspect frauduleux du système mis en place par Bernard Madoff cache pourtant un principe fondamental de l'économie mondiale actuelle. Les Subprimes en sont un exemple flagrant. En résumé, les Subprimes sont des prêts hypothécaires dont les taux d'intérêt sont au plus bas pendant deux années. Passées cette période de soldes, les intérêts grimpent en flèche, et ce, pendant une trentaine d'années. A la fin de la période à prix bradés, très peu revendaient leur maison. Ils profitaient plutôt de la hausse de l'immobilier pour renégocier un prêt plus avantageux leur permettant de rembourser les intérêts du premier. Ce qu'on appelle... la "finance Ponzi", un empilement de produits financiers qui fait finalement oublier l'investissement initial. Si le nombre d'"entrants" baisse, alors l'immobilier dégringole, et le système tout entier se bloque, totalement.
Mais si le cas de Bernard Madoff est clairement frauduleux, celui des Subprimes ne l'est pas... au même niveau. Il est maintenant avéré, depuis leur audition devant le Congrès US, que les dirigeants de Freddie Mac et Fannie Mae connaissaient (tous) les risques du système et qu'ils ont entrainé la planète finance dans leur sillage, consciemment. Ils ont aussi, pour l'anecdote, vendu des contrats incompréhensibles à leurs clients, en toute connaissance de cause. Le résultat final était connu d'avance mais ils ont foncé, tête baissée. La seule inconnue de l'équation était la date de l'explosion. Avidité et cupidité sont (toujours) bien récompensées !
Des Subprimes en forme de pyramide ?
Alors, non, les Subprimes ne sont pas une pyramide de Ponzi, mais les schémas se ressemblent terriblement. Dans les deux cas, les acteurs étaient conscients que la seule issue était l'implosion. Et si, dans le cas des Subprimes, le capital était bel et bien investi, il n'en constituait plus le centre du jeu, loin de là. Il n'était qu'un point d'entrée indispensable, finançant un empilement de crédits et de produits dérivés totalement démesuré, dont on savait qu'il s'écroulerait un jour. Arriva donc le moment où les investissements se firent plus rares, où les acteurs commencèrent à vouloir retirer leurs billes, et le château de carte s'écroula. Dans les deux cas.
Le dicton du jour (en vogue dans les cercles financiers) : "99% des banquiers donnent une mauvaise réputation à tous les autres".
16 décembre 2008, 10:40, Les mots ont un sens
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