Le principe du fair-play, selon lequel toute participation à la coopération sociale implique la réciprocité des devoirs et la reconnaissance de sa défaite lorsque la coopération ne joue plus à notre avantage, pose que l’on peut être obligé de respecter les lois sans nécessairement penser un consentement préalable. Il permettrait ainsi de déjouer l’accusation contre la désobéissance civile qui fait de celle-ci un acte irrationnel selon lequel le citoyen se dédit en revenant sur son propre consentement ou sa propre promesse d’obéissance à la loi. Mais il l’expose à un nouveau défi en déplaçant seulement l’accusation : il s’agirait en effet à propos de la désobéissance civile de prouver qu’elle n’est pas un acte déloyal lorsqu’elle rompt la coopération. Comment en effet peut-on légitimement se délier, non pas d’un engagement pris, mais d’une règle coopérative ou mutuellement avantageuse ? Comment peut-on revendiquer un droit si de fait nous avons une dette envers la société ? La désobéissance dans ce cas ne relève-t-elle pas plutôt de l’ingratitude ? Nous soutiendrons, pour notre part, que la désobéissance civile, pour les cas les plus radicaux, est bien une forme de résistance à l’oppression témoignant d’une autre forme d’engagement que le loyalisme légaliste : l’infraction à la loi ressemble alors à une tentative d’effraction dans un système institutionnel dénoncé comme injuste ou oppressif et dont l’enjeu est la lutte pour la reconnaissance.
Hourya Bentouhami, « La désobéissance civile à l’épreuve du principe du fair-play : entre ingratitude et reconnaissance », Tracés. Revue de Sciences humaines, n° 11, L’engagement, octobre 2006 [en ligne], mis en ligne le 11 février 2008. URL : http://traces.revues.org/index234.html. Consulté le 07 septembre 2008.
À procura de textos e pretextos, e dos seus contextos.
Sem comentários:
Enviar um comentário